samedi 18 mai 2013

Les 18 panaméennes du prince Henri de Croÿ-Solre


Son procès en appel se tient à Bruxelles depuis le 15 avril. L’an dernier, le prince Henri de Croÿ-Solre a été condamné, au pénal, à trois ans de prison avec sursis pour une fraude fiscale estimée à 75 millions d’euros. Il a par ailleurs fait l’objet de poursuites au civil par l’Etat belge, auquel il doit rembourser 4,4 millions d’euros (solidairement avec deux autres condamnés pour fraude fiscale).

De quoi s’agit-il? D’un des serpents de mer de la lutte antifraude en Belgique: le système dit des sociétés de liquidités (cash companies). Ce montage fiscal visait à diminuer la base imposable d’une société en la vidant fictivement de ses richesses. Les faits remontent à 1995. Le prince est accusé d’avoir organisé un vaste réseau frauduleux en exploitant ce mécanisme de manière quasi industrielle. Pour l’Etat belge, c’est clair: il en est la «tête pensante» et le «bénéficiaire économique». La défense du prince, elle, parle plutôt d’une technique d’ingénierie fiscale permettant d’emprunter légalement la voie la moins imposée.

Ce précepte semble en tout cas inscrit dans l’ADN du prince: les documents panaméens obtenus par Marianne révèlent que Henri de Croÿ-Solre apparaît comme administrateur de pas moins de 18 sociétés offshores créées entre 1978 et 1994, dont 13 sont toujours vivantes, selon le Registre des sociétés. Dans l’une d’elles, Aquacalda Inc., créée en 1987, il apparaît avec son épouse Maria et son frère aîné Emmanuel. Ce dernier l’accompagne d’ailleurs dans 17 des 18 offshores identifiées.
A quoi servent ces coquilles panaméennes? Vraisemblablement aux activités de gestion de fortune des deux frères, Henri ayant été formé au métier de family office par la banque MeesPierson à Hong-Kong, et «aux techniques anglo-saxonnes de défiscalisation» par la filiale londonienne de la… Générale de Banque.
D.L. et Q.N.


Mise à jour:
Dans son arrêt rendu le 21 octobre 2013, la Cour d’appel de Bruxelles a déclaré irrecevables les poursuites à l’égard du prince Henri de Croÿ-Solre et des autres prévenus car les droits de la défense auraient été violés en cours d’instruction (vice de procédure). La Cour d’appel ne s’est donc pas prononcée sur la matérialité des faits reprochés. Cet arrêt, véritable gifle pour l’Etat belge, a fait l’objet d’un recours devant la Cour de cassation, qui, le 30 avril 2014, a cassé le jugement de la Cour d’appel de Bruxelles et ordonné un nouveau procès. Le dossier de Croÿ sera rejugé au fond devant la Cour d’appel de Liège.

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