jeudi 30 novembre 2006

[+/-]

Le «plan média» des anti-Kyoto

Occuper l’espace, entretenir le doute

La tribune intitulée «Vers un totalitarisme écologique», publiée coup sur coup dans L’Echo du 16 novembre et dans La Libre Belgique du lendemain, offre un bel exemple de la stratégie médiatique d’une certaine industrie pétrolière: occuper le terrain et entretenir le doute.
L’auteur de ce brûlot anti-Kyoto (également paru dans le quotidien conservateur allemand Die Welt du 8 novembre), n’est autre qu’Edgar Gärtner, collaborateur de Science & Vie dans les années 80 et ancien rédacteur en chef de la revue allemande du WWF. Depuis 2005, Gärtner est employé par le Center for the New Europe (CNE), un think-tank ultralibéral connu notamment pour son «Bal du capitalisme» qu’il organise chaque hiver à Bruxelles.
Or le CNE est notamment arrosé par Exxon, «l’une des plus grandes compagnies pétrolières privées, très active dans le financement de la désinformation en matière de changements climatiques», comme l’ont rappelé hier cinq climatologues de l’université catholique de Louvain en réponse à Gärtner, dans une tribune dont on ne sait si le titre – «Effet de serre: ne nous trompez pas!» – s’adresse au lobbyiste d’Exxon ou aux médias qui ont publié sa prose. Certes, le quotidien du boulevard Emile Jacqmain avait averti ses lecteurs du financement pétrolier de Gärtner. Mais ni L’Echo ni Die Welt n’ont jugé bon de le faire...
Bilan de ce «plan média»? Primo, deux pleines pages «gaspillées» dans La Libre – la première en désinformation pure financée par une industrie rétrograde, la seconde en réfutation scientifique rendue nécessaire par la seule existence de la première. Secundo, un nuage de désinformation a asphyxié les lecteurs de L’Echo et de Die Welt, et tous ceux de La Libre qui n’ont pu lire la réplique des climatologues publiée 13 jours plus tard. Tertio, la nécessaire réflexion sur les actions concrètes à mener pour contrer l’effet de serre n’a pas avancé d’un iota. Pour Exxon, c’est l’essentiel.
Bref, on a ici un exemple éloquent de cette «censure invisible» que dénonce Pascal Durand, professeur au Département des arts et sciences de la communication à l’université de Liège, dans son bref et percutant dernier essai...

UPDATE 06/12/2006 :
Près de trois semaines après la parution dans
L’Echo du texte d’Edgar Gärtner, le quotidien des affaires publie ce jour la réaction des cinq climatologues de l’UCL (réaction déjà publiée dans La Libre Belgique du 29/11).

UPDATE 03/01/2007 :
Après
Die Welt, L’Echo et La Libre Belgique, c’est au tour des quotidiens Le Figaro et Les Echos de publier la prose d’Edgar Gärtner, respectivement dans leurs éditions du 26 et du 28 décembre 2006. Une fois de plus, sans aucune mention du financement du CNE par Exxon en 2003, 2004 et 2005 (170.000$ au total).

UPDATE 07/01/2007 :
L’association étasunienne Union of Concerned Scientist (UCS) publie un rapport très documenté (273 notes de bas de page!) sur les agissements d’Exxon en matière de désinformation climatique. Le rapport est en ligne et documente une stratégie que l’UCS apparente à celle suivie par les cigarettiers pour nier ou minimiser la nocivité du tabac sur la santé.
(Via M a n u & DeDefensa)

UPDATE 22/01/2007 :
Le Figaro a publié le 11/01 la réponse à M. Gärtner des climatologues néolouvanistes.

Lire la suite...

samedi 25 novembre 2006

[+/-]

Voler avec la fée électricité

J’ai déjà évoqué le «Lifter» de l’ingénieur français Jean-Louis Naudin, ici et ici. Je découvre à l’instant que ce pionnier du «Linux énergétique» a récemment reçu les honneurs du 19/20 de France 3. Rien de tel qu’une petite vidéo pour mieux cerner de quoi il retourne:

Lire la suite...

jeudi 23 novembre 2006

[+/-]

«Je ne peux plus m’en sortir seul»



200 visites d’huissiers à domicile, 30 procédures en cours... «J’ai dû me rendre à cette évidence: je ne peux plus m’en sortir seul». Face aux moyens colossaux de ses détracteurs – Clearstream, ses banques clientes, des autorités judiciaires françaises et luxembourgeoises –, le journaliste Denis Robert ne peut opposer que son énergie, ses livres et sa bonne foi. Mais ça ne suffit plus. Voilà pourquoi un groupe de soutien a été constitué pour l’appuyer moralement et financièrement dans ses multiples déboires judiciaires.

«Je manque de temps, d’argent, d’énergie pour répondre à chaque coup porté»
, concède désormais l’auteur de Clearstream, l’enquête. «Avec le gros temps qui se profile, les mises en examen qu’on veut me coller sur le dos, les nouvelles plaintes de Clearstream contre des interviews à la presse, les procédures au civil très onéreuses lancées à Luxembourg où je suis également mis en examen, cette initiative devenait indispensable.»

Selon Reporters sans frontières, Denis Robert est susceptible de se faire condamner à trois ans d’emprisonnement et à 375.000 euros d’amende, rien que dans le cadre de la récente procédure judiciaire lancée en France contre lui. «Si les professionnels de la presse doivent être poursuivis chaque fois qu’ils sont amenés à entrer en possession ou à prendre connaissance de documents qui n’étaient pas destinés à être rendus publics, c’est tout le travail du journalisme d’investigation qui pourrait être compromis», a notamment déclaré l’association de défense de la liberté de la presse.

Pour Robert, pas de doute: derrière cette énième procédure à son encontre se trouve évidemment Clearstream, par l’intermédiaire du cabinet d’audit Barbier Frinault (repreneur d’Arthur Andersen après le fiasco d’Enron), mais aussi «le Parquet de Paris et son représentant Jean-Claude Marin, le garde des Sceaux Pascal Clément et le Premier ministre Dominique de Villepin, forcément associés dans cette atteinte grave à la liberté d’écrire».

Cette semaine, Les Inrockuptibles publient un texte que Le Monde avait refusé, sous prétexte qu’il était diffamatoire. Le lecteur jugera...

Lire la suite...

mardi 14 novembre 2006

[+/-]

Ultramoderne spermitude

Gluant, blanchâtre mais surtout biologiquement sinistré: dans sa nouvelle campagne, Greenpeace vous révèle tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur le sperme sans jamais avoir osé le demander. Avec en prime, pour appuyer le message, un pastiche d’une scène d’anthologie tirée du film quasi éponyme de Woody Allen:



En focalisant sa campagne uniquement sur les substances chimiques, en grande partie responsables du déclin de la qualité du sperme dans les pays industrialisés, Greenpeace est en phase avec ses références cinématographiques, mais en retard d’une guerre. Certes, le problème de la pollution chimique de l’environnement est plus que préoccupant, et les débats actuels sur REACH au parlement européen ne sont pas sans orienter les priorités de l’ONG environnementaliste en matière de communication (le vote de REACH, en seconde lecture, est prévu la semaine du 11 décembre). Mais la «pollution du sperme» de l’homo sapiens occidental est très vraisemblablement amplifiée par l’impact des champs électromagnétiques (CEM) émis par les téléphones portables et autres antennes relais de téléphonie mobile (GSM et UMTS), y compris les bornes DECT des téléphones sans fil domestiques, les réseaux WiFi et WiMax.

Effets aigus confirmés... et à long terme?

En effet, il y a quelques semaines, une étude turque faisait état de résultats préoccupants en la matière. Sa conclusion? La motilité des spermatozoïdes est influencée in vitro par les CEM (900 MHz) émis par un téléphone portable classique. Des résultats qui se basent sur les échantillons de sperme de 27 hommes sains (la moitié de chaque échantillon a été exposée aux CEM, l’autre moitié pas). «En plus de ces effets aigus, soulignent les chercheurs de la Gulhane Military Medical Academy à Ankara, une exposition à ces CEM sur le long terme pourrait entraîner des changements comportementaux ou structurels dans les cellules germinales mâles. Ces effets pourraient s’observer plus tard au cours de l’existence, et ils devraient être étudiés plus sérieusement.»

Mais ce n’est pas tout. Une étude étasunienne présentée fin octobre à la Nouvelle-Orléans lors de la réunion annuelle de la Société étasunienne de médecine reproductive, a également montré que plus un homme passe de temps au téléphone portable, plus on observe de problèmes en termes de nombre, motilité, viabilité et morphologie des spermatozoïdes. Cette recherche a quant à elle été réalisée sur 364 hommes qui consultaient, avec leur partenaire, des cliniques de fertilité dans la région de Mumbai, en Inde.

Brosse à dents de la mort

Le Dr. Ashok Agarwal, principal auteur de l’étude et chercheur au Centre de recherche reproductive de la clinique de Cleveland, un des meilleurs hôpitaux des Etats-Unis, a déclaré à la presse, en parlant du téléphone portable: «C’est comme utiliser une brosse à dents, sauf que cela pourrait avoir un effet dévastateur sur la fertilité.»

Malgré cette citation taillée sur mesure pour des médias avides de contenus «sexys», l’info qui la sous-tend n’a été reprise que par une fraction de la presse étrangère anglophone (anglaise, australienne, néo-zélandaise et indienne). Aux Etats-Unis, où 225 millions d’Américains utilisent un téléphone portable, ce fut un non-événement total, s’étonne Louis Slesin, rédacteur en chef de la lettre d’information Microwave News, lue par tout le landerneau «branché CEM». Silence radio dans la presse francophone également, sauf une brève de... 63 mots dans Le Vif/L’Express du 10 novembre. Google Actualités recense quant à lui une seule citation, dans un quotidien électronique français, spécialisé et payant.

Etonnant, tout de même, quand on sait que ces deux études sont déjà des réplications de résultats antérieurs, connus depuis 1999 (Slesin cite une étude australienne, une hongroise et une turque). Et qu’en juin 2006, le cap des deux milliards d’utilisateurs de GSM a été franchi, 12 ans seulement après l’introduction de ce joujou qui pulvérise tous les records antérieurs d’adoption technologique. Le tiers de l’humanité possède donc aujourd’hui un téléphone portable. Dont une grande majorité d’hommes.
D.L.


Un dossier sur la téléphonie mobile, l’influence des sources de financement sur la recherche scientifique en la matière, et l’étrange attitude d’un haut responsable de l’OMS dans ce dossier sanitaire d’envergure, est disponible dans la dernière livraison du magazine bimestriel Imagine. En vente dans toutes les bonnes librairies et en ligne au format PDF.

Lire la suite...

samedi 11 novembre 2006

[+/-]

Ségo, de gauche par ambition?

Ce rush du film La sociologie est un sport de combat de Pierre Carles, tourné en mai 1999, a déjà fait pas mal de buzz en France. Pierre Bourdieu y affirme que Ségolène Royal, alors qu’elle était encore sur les bancs de l’ENA, s’est «posé la question du choix entre la gauche et la droite en termes de plan de carrière». Elle aurait finalement choisi la gauche faute de places intéressantes à droite. Bourdieu s’appuye sur le témoignage d’un de ses anciens élèves, Remi Lenoir, qui a enseigné à l’ENA lorsque Ségo y usait ses tailleurs, et qui dirige aujourd’hui le Centre de sociologie européenne de l’Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS), à Paris.



Cet extrait est tiré d’une séquence de 11 minutes intitulée Gauche/Droite et diffusée en septembre par la chaîne associative et citoyenne Zaléa TV. On peut la voir dans son intégralité sur DailyMotion et YouTube.

Lire la suite...

jeudi 9 novembre 2006

[+/-]

Premier prisonnier politique en Belgique

Conséquence directe du 11-Septembre et de l’épidémie mondiale de lois liberticides qui a frappé la planète suite à ce tragique événement: la Belgique peut être «fière», depuis mardi soir, d’avoir condamné son premier prisonnier politique depuis la dernière guerre mondiale, Bahar Kimyongür, à 5 ans de prison fermes.
Sur son blog, le journaliste Mehmet Koksal fait un point nuancé sur ce jugement, qui concerne également d’autres militants du DHKP-C, cette organisation marxiste-léniniste turque radicale étiquetée «terroriste» par l’Union européenne. Outre bien évidemment, et à juste titre, le CLEA (Comité pour la liberté d’expression et d’association), la Ligue des droits de l’homme est scandalisée, tout comme Josy Dubié et Céline Delforge d’ECOLO, notamment. Curieusement, Amnesty international, qui se définit pourtant comme «un mouvement mondial de personnes qui luttent pour les droits humains», reste muette dans toutes les langues sur cette sombre affaire...
Je ne partage pas la vision marxiste-léniniste de la société défendue par Bahar Kimyongür et le DHKP-C, ni les opinions du philosophe français Robert Redeker, victime d’une fatwa outre-Quiévrain. Mais c’est une question de principe. Comme dit l’adage voltairien, «Je ne suis pas d’accord avec ce que vous dites, mais je me battrai jusqu’au bout pour que vous puissiez l’exprimer».

UPDATE 13/11:
Un intellectuel (vous savez, cette espèce en voie d’extinction...) s’engage sur ce dossier. C’est Jean-Marie Klinkenberg, prof à l’université de Liège, dans un mail collectif envoyé jeudi passé à de nombreux collègues. Extrait:
«Dorénavant, plus aucune personne désireuse de contester quelque chose dans notre pays, du moins de manière tant soit peu efficace, ne sera à l'abri : grévistes, syndicalistes, militants de tous poils, résistants, altermondialistes, objecteurs, sachez ce qui vous attend. Intellectuels qui analysez, citoyens qui prenez la plume, artistes qui caricaturez, terroristes vous êtes déjà, même si vous ne le savez pas.»

Lire la suite...

mardi 7 novembre 2006

[+/-]

Un métier formidable !

Dans le cadre de sa grande campagne Pigiste pas pigeon, l’Association des journalistes professionnels (AJP) fait le pari de l’humour et du marketing viral – par YouTube interposé, s’il vous plaît! – pour décourager les jeunes à se lancer dans des études de journalisme, mais aussi, plus généralement, pour sensibiliser les masses aux conditions hyper-précaires du «noble» métier de journaleux free-lance. Un clip de 2 minutes qui vous donne tout de suite le tempo de ce job d’enfer:



Cette vidéo, ainsi qu’une seconde, tournée à Bruxelles lors du happening urbain du 22 septembre dernier, a été réalisée par la société privée Gabal Productions. Question: les techniciens (caméraman, preneur de son, monteur...) qui ont réalisé ces vidéos sont-ils eux aussi pigistes? L’AJP ne le dit pas...

UPDATE 9/11:
Simone, de l’AJP, précise ceci: «A propos des professionnels qui ont réalisé les videos, les contrats ont été pris directement par Gabal prod., certains sont des pigistes, d'autres pas. Les tarifs sont des tarifs très corrects (on n'imagine pas le contraire !).»

Lire la suite...

jeudi 2 novembre 2006

[+/-]

Marginalisées

Margi Geerlinks, c’est des yeux de 36 ans marqués par un questionnement incessant, celui de la féminité et de l’identité sexuelle. Pour le plaisir du cortex, quelques clichés d’une expo d’il y a 4 ans déjà chez Aeroplastics, à Bruxelles. Hé non, ce n’est pas Dominique de Villepin qui joue à l’apprenti couturier...






Puce à l’œil: Hubert Guillaud d’InternetActu et Régine Debatty de We Make Money Not Art. Photos (c) Margi Geerlinks.

Lire la suite...

lundi 30 octobre 2006

[+/-]

Après McDo...

Ce petit bouquin, qui se lit d’une traite, démystifie avec brio et une bonne dose d’humour les «promesses» sociales et écologiques de la séduisante multinationale jaune et bleue.
Paradis fiscaux, travail des enfants, syndicats indésirables, produits polluants,... : le capitalisme nordique d’Ingvar Kamprad, quatrième fortune de la planète selon Forbes, ne déroge guère à la règle du profit à tout prix malgré une image sociale-écolo soigneusement entretenue.
Une enquête signée Oxfam-Magasins du monde, qui brise ainsi le rêve ikéen en allant notamment pousser la porte des sous-traitants asiatiques du géant suédois...

Ikéa, un modèle à démonter, Olivier Bailly, Denis Lambert & Jean-Marc Caudron, Luc Pire/Oxfam, 2006, 114 p.

Lire la suite...

jeudi 26 octobre 2006

[+/-]

Les récrés de Denis et Edwy

C’est la guerre entre Denis Robert et l’ex-trotskard en «exil» rue Royale. La vraie! Non seulement les deux hommes sont en concurrence directe pour la reprise de Libération, mais ils se fritent aussi violemment au sujet de l’affaire Clearstream (ceci expliquant sans doute cela et inversément). L’auteur de Révélation$ s’est ainsi donc fendu hier, sur son blog, d’une longue réplique à la chronique cinglante de Plenel parue dans Le Soir du 20 octobre.

«Depuis le début, ce gars-là se sert de son journal pour faire ou faire faire des articles assassins sur moi et personne ne lui dit jamais rien, s’énerve Robert. Ensuite ses papiers servent à l’avocat de Clearstream pour bâtir ses plaintes. Et personne ne dit jamais rien. Normal, il est salarié dans un grand journal et fait peur à tout le monde parce qu’il peut rouler ses petits muscles et écrire des papiers fielleux n’importe quand sur n’importe qui. (...) La moustache de Plenel et ses tirades de joueur de flûte ne m’ont jamais impressionné. Pour tout dire, je pense que Plenel est un usurpateur, un opportuniste, une sorte de kapo sans foi ni loi, très doué pour le baratin et pour monter des coups.» Le ton est donné!

Quand l’ego éclipse le fond

Ce différend passionnel entre les deux hommes est nourri semble-t-il par une vieille rancœur tenace comme une tache de fruit rouge. «Quand j’étais à Libé et que son journal et le mien étaient concurrents sur le terrain des affaires mettant en cause les balladuriens ou les socialistes, nous lui avons mis des dizaines de unes dans la vue, fanfaronne Robert. J’étais en concurrence directe avec lui et Gattegno. Neuf fois sur dix, Libé sortait des scoops avant le Monde

Sur le fond, la chronique de Plenel, nombriliste et déontologiquement douteuse (l’ex-directeur de la rédaction du Monde s’est porté partie civile dans le dossier Clearstream 2, son nom étant cité par le corbeau dans les bénéficiaires de comptes bidons), est à côté de la plaque. La réplique de Robert, si elle est légitime, est sans grand intérêt autre que sociologique. Le vrai sujet, ce «combat du 21e siècle» qui concerne tous les démocrates désireux d’une plus grande justice fiscale, c’est celui du contrôle des transactions financières internationales. Pas cette guéguerre d’ego entre deux journalistes rivaux et narcissiques. Or la question de la fiscalité à l’heure de la mondialisation reste sur le carreau politique. Seule la société civile semble s’en être réellement emparée (via notamment le Réseau mondial pour la justice fiscale), avec les moyens modestes qui sont les siens.

«Européaniser» Clearstream

Pendant ce temps, Robert est obligé de perdre son temps au tribunal ou de se justifier dans les médias. Il est vrai qu’il l’a en partie cherché en étant pour le moins léger dans son interprétation de l’acronyme DGSE. Mais balayer d’un revers de main, pour cinq lignes erronées, des années d’enquête (trois bouquins, deux films), une mission parlementaire sur le blanchiment, des témoignages accablants, etc., ce serait faire une erreur monumentale.

«Clearstream est devenu, dans les faits, un intermédiaire incontournable pour le versement de commissions occultes, l’évasion fiscale et des transactions secrètes portant sur des montants colossaux, lesquelles échappent ainsi au contrôle des banques centrales (qui ne protestent guère!): un vrai trou noir de la finance internationale», résumait Philippe Béchade dans une récente chronique proposant ni plus ni moins de... nationaliser Clearstream. Ce qui ne changerait sans doute pas grand-chose connaissant le nationalisme financier grand-ducal. Transformer Clearstream en institution publique européenne, sous contrôle direct des eurodéputés, voilà ce qu’il conviendrait sans doute de faire. Tout l’enjeu consisterait, dans un premier temps, à rendre ce combat «sexy» aux yeux du politique et de l’électeur. Et il ne l’est a priori pas moins que d’autres.

Lire la suite...

lundi 23 octobre 2006

[+/-]

16 millions d’idiots

Je découvre, grâce à l’excellent Philippe Gammaire, cet extrait percutant de Jean-Louis Murat (que j’aime beaucoup musicalement et axiologiquement) lors d’un passage chez Ruquier mi-septembre. Le populisme de marché défendu par la lamentable rédactrice en chef de Closer (un ramasse-pubs people dans la veine de Voici et Gala), déprimera tout qui a la moindre ambition de travailler à faire progresser la démocratie dans le monde.



Lire également le post de Philippe sur Stéphanie Gonier, cette femme courageuse qui s’est légitimement insurgée contre son employeur, Nissan, pour des raisons archéo-sexistes que je vous laisse déplorer ici. Le vrai capitalisme, mondialisé, déteste les femmes, ces jolies créatures qui font vendre mais qui sont incapables de trimer quand elles ont un mioche dans le bide ou sur les bras.

Lire la suite...

mercredi 4 octobre 2006

[+/-]

Le combat du 21e siècle

«Le problème, c’est que le contrôle public des transactions financières est un sujet très compliqué dont tout le monde se fout. Mis à part Montebourg et moi-même, rares sont les politiques à s’être intéressés à ces questions. Et pour cause: ce n’est pas porteur électoralement. Pourtant, il faut que la gauche prenne conscience que le contrôle des transactions financières constitue le combat du 21e siècle.»
Vincent Peillon, à propos de l’affaire Clearstream 1 (Technikart, juin 2006).

Début août, le journaliste-écrivain-réalisateur Denis Robert a reçu une «lettre inamicale» du premier ministre français, Dominique de Villepin, qui le poursuit pour diffamation. En cause, notamment, l’affirmation de Robert dans son dernier livre Clearstream, l’enquête (2006) selon laquelle de Villepin aurait joué un rôle actif dans l’affaire Clearstream 2, pour éliminer son rival Nicolas Sarkozy «en utilisant la justice pour règler les comptes politiques de la Chiraquie».

Début septembre, c’est la chambre de compensation luxembourgeoise elle-même qui s’est rappelée au bon souvenir du journaliste. Clearstream assignait alors Robert à comparaître devant le tribunal d’arrondissement de Luxembourg pour diffamation avant le 6 octobre, et lui réclamait – au passage – 100.000 euros de dommages-intérêts. De quoi inciter les journalistes «fouille-merde» à la prudence...

Quand Barroso couvre Bolkestein

Robert, ex de Libé (lire notamment sa «lettre de rupture» historique à Serge July), enquête depuis plusieurs années sur Clearstream et les coulisses de la finance mondialisée. Il a publié trois livres, un roman et réalisé deux films sur cette affaire complexe qui lui pollue désormais méchamment l’existence. Depuis 2001 en effet, une avalanche de procès pour diffamation s’abbat sur lui dans la plupart des pays où ses ouvrages et ses films ont été diffusés. L’essentiel de ces poursuites provient de Clearstream et de la sulfureuse banque russe Menatep, où Frits Bolkestein officie en tant que conseiller de la direction depuis la fin de son mandat de commissaire européen.

Précisons qu’en 2001 Bolkestein lui-même s’est opposé à l’ouverture d’une enquête parlementaire sur Clearstream. A l’époque, le très libéral commissaire hollandais était déjà lié à la Menatep puisqu’il y siégeait au sein du Conseil consultatif international. Interpellé en mai 2005 par l’eurodéputé batave Paul van Buitenen (l’homme qui fit tomber la Commission Santer en 1999), Jose Manuel Barroso n’a pas jugé bon d’ouvrir une enquête parlementaire sur cet embarrassant conflit d’intérêt. «A Bruxelles, tout repose sur les réseaux informels pour faire bouger les choses», déclarait, fataliste, van Buitenen en avril dernier.

Ami débauché par Clearstream

Bref, Denis Robert croule sous les assignations. Mais il gagne presque toujours ses procès, m’expliquait-il lors d’un entretien réalisé il y a deux ans et demi. Quand ce n’est pas le cas, ses rares condamnations se résument la plupart du temps à un euro symbolique. Cette «stratégie de l’épuisement» n’a jusqu’ici pas (encore?) porté ses fruits. Même si, dans cette guerre des nerfs aux enjeux planétaires, Clearstream est allée jusqu’à embaucher comme attaché de presse un de ses proches amis, journaliste à l’AFP, avec lequel il avait couvert de longs mois durant la sombre affaire Villemin. Mais Denis Robert, journaliste de combat, a des nerfs d’acier. Son dernier livre, paru avant l’été, lui a valu «une petite dizaine» de nouveaux procès, dont celui intenté par Villepin. «Je suis une petite PME à moi tout seul», ironise-t-il sur son blog...

L’intégrale de ses films, dont deux consacrés à Clearstream, sort demain en DVD.

Lire la suite...

mercredi 27 septembre 2006

[+/-]

Les tribulations d’un nanotechnologue


«Les informateurs, comme on les appelle, sont souvent des gens qui sont à la fois dedans et dehors. Des gens qui sont marginaux dans le groupe et, de ce fait, à la fois plus lucides et plus libres que les autres. Il faut des gens qui sont un peu "traîtres", qui ont un peu mauvais esprit. Et alors ça, ça fait gagner beaucoup de temps. Mais il faut se méfier en même temps, parce que ces gens-là, eux aussi ont des enjeux, ils veulent faire passer leur truc...»
Pierre Bourdieu, au début de Enfin pris? (Pierre Carles, 2002).


C’est le très utile service d’alertes Google qui a déposé ce témoignage dans ma boîte aux lettres dimanche matin. Le texte a été posté samedi sur le site d’Indymedia Grenoble. Intitulé «Pourquoi j’ai quitté le CEA» (Commissariat à l’énergie atomique), il n’est ni daté, ni signé. On apprend juste que l’auteur a ouvert un lieu culturel alternatif depuis son départ de l’organisme de recherche public français.

Ce texte, en gros, retrace l’histoire de Richard, un jeune chercheur un peu naïf qui, au fil de sa thèse, perd progressivement ses illusions sur son travail en particulier, et sur le fonctionnement de la recherche et du monde en général. L’action se déroule à Grenoble (capitale européenne des nanotechnologies), au LETI, le laboratoire d’électronique de technologie de l’information du CEA. Un témoignage rare, caustique et plutôt pessimiste sur les coulisses du petit monde très fermé de la recherche de pointe en micro et nano-électronique. Une réflexion, surtout, sur la place du chercheur et de la recherche scientifique dans nos sociétés post-industrielles.

Course en avant

En 2000, Richard entre au CEA. Jeune ingénieur en électronique fraîchement diplômé, il y travaillera trois ans, grâce à une bourse de l’Etat, pour y réaliser un doctorat. Son job consiste à mettre au point des mémoires électroniques d’un nouveau type. «En fait, il s’agit de bidouiller les techniques existantes pour gagner encore quelques dizaines de nanomètres (un cheveu fait entre 50.000 et 100.000 nanomètres). Les intérêts commerciaux sont énormes: d’une part réduire la taille d’une puce permet d’en mettre plus sur une même plaque de silicium et donc d’abaisser les coûts (...). D’autre part, changer de technique de production des mémoires (qui sont les mêmes grosso modo depuis les années 80) coûterait bien trop cher: cela signifierait changer de machines et former à nouveau les techniciens, créer de nouvelles filières. Il faut donc durer le plus longtemps possible.»

Et pour «durer», l’industrie finance de nombreuses équipes du CEA. «À Grenoble, il y a STMicroelectronics, Philips, Motorola, et d’autres encore. STMicroelectronics travaille avec d’autres centres de recherche publics (en Italie, par exemple), Philips travaille avec des universités belges. Bref la recherche est payée en grande partie par des industriels, et effectuée par des chercheurs d’instituts publics, en lien avec des groupes de recherche de l’entreprise concernée. Très grossièrement, les laboratoires publics cherchent une recette et quand celle-ci fonctionne, elle est fournie clé en main aux industriels. Rien de bien scientifique là-dedans. On appelle ça "développer le partenariat public-privé en créant des transversalités fortes et durables". Moi j’appelle ça déglinguer la recherche publique pour en faire un outil entre les mains du privé. Mais on dira que j’exagère.»

Chacun sa soupe

Richard regrette également que l’hyperspécialisation de la recherche tende à isoler les chercheurs les uns des autres, y compris au sein d’une même équipe. «Vers la fin de ma thèse, j’ai présenté mes travaux devant un parterre de chercheurs du LETI qui travaillaient plus ou moins tous en relation avec mon sujet, sans en avoir forcément grand chose à faire. Dans ce petit monde, tout est cloisonné. Ce n’est pas forcément lié à l’oppression du travail, mais tout simplement, les techniques devenant de plus en plus complexes (je n’ai pas dit compliqué, les deux mots sont différents), les domaines de spécialisation deviennent de plus en plus pointus. (…)»

«Chacun fait sa soupe dans son coin sans forcément savoir ni comprendre ce que fait son voisin d’étage. (…) Moi par exemple, je testais des dispositifs et j’essayais de modéliser sur ordinateur leur comportement. Mais je suis incapable de comprendre ce que font des amis en optique, en télécommunications, ou même quand il s’agit d’assembler les mémoires que je teste pour créer une puce que l’on installera dans un ordinateur. Je ne connais pas les techniques de fabrication de ces transistors que je teste. Et je n’ai aucune idée des enjeux industriels, économiques ou même politiques liés à tel ou tel programme de recherche. Les équipes de recherche vivent dans le brouillard (…).»

Des brevets et des armes

«A la fin de ma présentation, une des rares questions qui me fut posée était "envisages-tu une application militaire de ces dispositifs mémoires, pour par exemple programmer les plans de vols des avions de chasse". J’avoue que ça m’a totalement surpris, d’autant plus que la question m’a été posée par une femme (totalement "dégenrée"!). Que vouliez-vous que je réponde? Remarquez, à la première présentation que j’avais faite en arrivant en thèse devant un parterre de chercheurs (qui faisaient d’ailleurs plutôt de la gestion administrative) on m’avait posé une seule question: "Les procédés que tu nous présentes sont-ils brevetables?". Pas mal non plus… Mais à part ça, je faisais tout cela pour "la grandeur de la science" n’est-ce pas?»

Sa thèse, il la décrochera finalement avec une mention «très bien», alors qu’il est «convaincu pendant trois ans d’avoir fait un travail lamentable», cela grâce surtout aux remarques de son encadrante «qui se déchargeait de son stress sur moi en me pourrissant la vie. Et de poursuivre: Mon jury de thèse était quand même bien arrangé: les deux personnes chargées d’examiner mon opus travaillaient avec nous, et le président du jury m’avait suivi durant ma thèse. Mais beaucoup de thésards sont dans ce cas. Il s’agit plus d’un exercice formel que d’autre chose. Nous sommes entre nous. Et rejeter un des nôtres tendrait à prouver que nous pouvons nous tromper. Une fois qu’on l’a compris, on peut faire n’importe quoi: on n’est jamais viré!»

Dans son témoignage, Richard évoque également la précarité qui s’est sournoisement installée dans le milieu de la recherche française. «J’ai soutenu ma thèse deux mois ou trois mois après la fin de mon contrat de travail, ce qui signifie que la fin de mon travail a été financée par les Assedic. Là aussi une pratique courante.» Lui-même, pendant les trois ans de sa thèse a gagné 980 euros nets, grâce à sa bourse de l'Education nationale. «Mais il est vrai que dans d’autres domaines (sciences humaines, sciences sociales, musicologie ou autre…), il n’y a pas de bourse du tout.»

De la mort et du divertissement

Mais pourquoi diable a-t-il quitté le CEA? Notamment parce que son travail lui semblait «inutile, voire dangereux». Deux débouchés s’offraient à ses recherches: «une application militaire (à long terme visiblement), et une application "gadgetale": nouveaux téléphones portables faisant appareil photo, nouvelles applications pour les ordinateurs portables, pour la voiture, pour des machins et des trucs dont la majeure partie de la population mondiale n’a pas besoin, voire pas envie… De la mort, et du divertissement. (…) J’ai choisi le chômage (et pourtant, j’en avais encore peur à l’époque, de ce chômage) plutôt qu’une place à 2000 euros par mois, car cette somme était le prix de ma résignation à l’ordre établi. Mon prix d’achat, quoi. De la corruption.»

Un témoignage à prendre pour ce qu’il est, rien de plus. Pour celles et ceux que ça intéresse, l’association radicale grenobloise Pièces & main d’œuvre, à l’origine des manifestations anti-nanotech qui ont eu lieu lors de l’inauguration de Minatec en juin dernier, diffuse également quelques autres témoignages de scientifiques grenoblois. Sous couvert de l’anonymat, ils peuvent donc exprimer des avis personnels contraires à l’establishment et sortir d’un discours 100% politiquement correct dans lequel ils sont très souvent contraints de s’enfermer.

Lire la suite...

samedi 23 septembre 2006

[+/-]

Google s’exécute

Ca y est. Depuis ce samedi matin vers 7h56, Google affiche sur sa page d’accueil belge Google.be le fameux jugement du tribunal de première instance de Bruxelles du 5 septembre 2006. Il s’agit d’un copié-collé indigeste, en petits caractères et sans retours à la ligne, mais il ne fallait pas en attendre plus du géant de Mountain View.

Absent à l’audience du 5 septembre du procès en référé intenté à son encontre par la société Copiepresse (représentant les éditeurs francophones et germanophones de la presse écrite belge), Google a notamment été condamné «à publier, de manière visible, claire et sans commentaire de sa part sur la home page de ‘google.be’ et de ‘news.google.be’, pendant une durée ininterrompue de 5 jours, l’intégralité du jugement (...) sous peine d’une astreinte de 500.000 € par jour de retard». L’entrée en vigueur de cette mesure étant fixée au lundi 18 septembre, l’addition à payer pour les cinq jours de la semaine qui vient de s’écouler se chiffre donc à 2,5 millions d’euros.

Question à 100 millions de francs belges: Copiepresse partagera-t-elle le gâteau avec les journalistes «lésés» (lire post précédent), pour lesquels elle prétend également se battre? Hier en effet, le tribunal correctionnel de Bruxelles a rejeté l’appel de Google qui refusait jusqu’ici de publier le jugement sur ses deux sites belges (d’où la publication de ce matin). Commentant cette victoire judiciaire hier après-midi, la secrétaire générale de Copiepresse a notamment déclaré: «J’espère que les journalistes se rendent compte que nous nous battons aussi pour eux». On verra dans les prochains jours si les journalistes du Soir, de la Libre et de la DH ont envie de la prendre au mot. A moins que ce combat anti-Google mette les rédactions elles-mêmes mal à l’aise, à l’instar de Renaud, grand manitou des sites du groupe IPM?

De leur côté, les internautes belges devront attendre jusqu’au matin du jeudi 28 septembre pour retrouver leur page d’accueil Google habituelle, vierge de tout jugement. L’affaire, elle, sera jugée sur le fond le 24 novembre prochain.

Bizarrement, à 10h01, soit plus de deux heures après la publication du jugement sur Google.be, le portail belge d’actualités News.Google.be n’affichait toujours pas le jugement. Ce fut finalement chose faite avant 11h20.

Lire la suite...

vendredi 22 septembre 2006

[+/-]

Google News, Napster de la presse?

Le portail Google News, parce qu’il est une structure centralisée, semble considéré par les éditeurs belges comme le Napster de la presse, pillant son contenu sans scrupules. Il n’en est pourtant qu’une très pâlote et éphémère transposition. Avec Google News, l’intégralité des «œuvres» journalistiques n’est aucunement «piratée». D’ailleurs, le droit de citation est un droit dont Google, me semble-t-il, pourrait tout à fait se prévaloir lorsque l’affaire sera jugée sur le fond le 24 novembre prochain.

Pour Sébastien Canevet, maître de conférences en droit privé, il n’y a pas de règle bien précise pour évaluer ce qu’est une «courte citation» permise par la loi. Il faut bien sûr citer l’auteur et mentionner la source, mais côté longueur, il évoque le «bon sens»: «quelques paragraphes, voire quelques pages d’un livre, si cela est justifié par l’usage qui est fait, mais pas la moitié (ou plus) d’un article, d’un livre...» Selon Wikipedia, «le caractère bref de la citation est laissé à l’appréciation de l’auteur original. Certains jugent qu’il s’agit d’un paragraphe, d’autres que ce n’est toute l’œuvre (poème, etc), d’autres encore limitent l’extrait à 1500 caractères d’un livre, etc. En cas de doute, il faut toujours contacter l’auteur ou ses ayant droits.» Ce que n’a jamais fait Google, provoquant de facto l’ire des éditeurs du monde entier.

250 signes: du vol?

Les chapôs d’articles publiés par Google News n’excèdent pas 250 signes. En tant que journaliste, il ne me viendrait jamais à l’esprit de poursuivre quelqu’un qui cite 250 de mes signes et renvoie l’internaute directement à la source. Copiepresse, dont le métier est de gérer les droits des éditeurs belges de la presse quotidienne francophone et germanophone, n’est évidemment pas de cet avis. Mais où est le problème? L’entreprise de Mountain View se sucrerait-elle sur le dos des éditeurs? Non: elle ne place pas de pub sur son service d’actualités en ligne. Google News prive-t-il alors les grands médias de recettes publicitaires en «détournant» les internautes de la page d’accueil des quotidiens en ligne? Pas sûr, puisque ceux-ci débarquent sur des pages d’articles qui contiennent de la pub – parfois d’ailleurs générée par Google...

Par ailleurs, Google News ne pèse pas grand chose dans la galaxie des sites Google: 2 à 3% du trafic seulement. Parallèlement, le moteur de recherche générerait 10% du trafic du Monde.fr (selon Le Monde lui-même, qui demande qu’on le croit sur parole), alors que «certaines estimations» annoncent une moyenne de 50 à 80% tous sites éditeurs confondus. Combien tout ce trafic représente-t-il de bénéfices directs (pub) et indirects (nouveaux lecteurs)? Mystère. Les éditeurs se gardent bien de le préciser...

Interviewé par Le Soir, Bruno De Vuyst, spécialiste en droit intellectuel au cabinet Lawfort, est formel sur la question des droits d’auteur. «Créer des hyperliens est parfaitement légitime même s’ils ne renvoient pas vers la page d’accueil d’un journal. De même, publier une brève citation pour résumer un article ne viole en rien le droit d’auteur. Plutôt que d’intenter un procès à Google, les éditeurs auraient pu utiliser des moyens techniques simples pour éviter un référencement de leurs pages qu’ils jugeraient abusif».

Photographes: les vraies victimes

Pour les photographes, c’est une autre paire de manches: force est de constater que leur travail est intégralement piraté, même si les photos sont reprises en plus petit format. En France en tout cas, «la jurisprudence interdit la citation d’une image ou d’un son, même s’il s’agit d’un simple extrait sonore ou du détail d’une image...», précise Sébastien Canevet. Bref, si aucun accord n’est trouvé à l’amiable – ce que souhaite Google et dont doute Damien– et que l’affaire se règle frontalement lors de l’audience du 24 novembre, il n’est pas impossible que Google obtienne gain de cause concernant les articles de presse mais soit sévèrement condamné pour son utilisation abusive de photos et graphiques.

Imaginons un instant que ces chapôs soient les débuts de romans – la première page – ou de films – une bande d’annonce. Il ne viendrait à l’esprit d’aucun écrivain ou réalisateur de poursuivre Google, grand pourvoyeur de trafic, devant les tribunaux. Sauf, peut-être, si Google est… Google. C’est-à-dire une entreprise qui dérange parce que riche, jeune et «cool», tentaculaire et menaçante.

Riche. L’entreprise a engrangé 2,46 milliards de dollars de revenus au cours du second trimestre 2006 (77% de croissance et 110% de profits en plus par rapport au même trimestre en 2005). Sa capitalisation boursière est la 32e du monde, devant Coca-Cola ou Walt Disney. Et certains observateurs attentifs estiment que fin 2006 Google vaudra plus cher que Microsoft...

Jeune. Le géant californien vient juste de souffler sa huitième bougie. Si l’âge moyen de ses employés est inférieur à 30 ans et que les quadras ne représentent que 2% du personnel, c’est surtout sa culture d’entreprise très horizontalisée, plutôt libertaire, qui bouscule les certitudes managériales des entreprises classiques, verticalisées. Il faut quand même pas mal d’audace pour accorder à ses informaticiens 20% du temps de travail rémunéré au développement de «projets personnels». Transposé au journalisme, ça en ferait rêver plus d’un...

Tentaculaire. Est-il exagéré de dire que Google incarne à lui seul l’idée que l’on peut se faire du totalitarisme numérique? Les dirigeants de Mountain View ambitionnent de contrôler Internet et la plupart des bases de données de la planète numérique. Si un site est mal indexé sur Google, il n’existe quasi pas sur la toile. Google, tout comme la Chine, effraye, fascine et attise les jalousies. (D’ailleurs, ce sont deux géants économiques qui s’entendent bien: en acceptant de supprimer de son index chinois des milliers de mots-clé comme démocratie, liberté, Tibet, dalaï-lama ou Taiwan, Google a signé en janvier dernier un véritable «pacte de corruption» avec le Parti communiste chinois – tout comme Yahoo! et Microsoft, d’ailleurs).

Menaçante. Google donne notamment de l’urticaire aux régies publicitaires, vaches à lait de la presse écrite et audiovisuelle. Début août, le moteur de recherche californien devenait la régie pub de MySpace.com et de la majorité des sites web de Fox interactive Media, tous dans le giron d’un des plus grands empire médiatiques de la planète: NewsCorp. En décembre dernier, c’était avec AOL que Google signait un accord du même type et, fin août, avec eBay, pour lui fournir de la pub en ligne hors du marché étasunien.

Le droit d’auteur n’est qu’un prétexte

Bref, si Google est aujourd’hui dans le collimateur des éditeurs de presse, industrie pas vraiment florissante, c’est sans doute un peu pour toutes ces raisons. Le droit d’auteur n’est qu’un prétexte. Le révélateur d’un malaise bien plus profond. D’ailleurs, si les éditeurs avaient quelque considération pour le quart des auteurs qui les alimentent en contenu (25% des journalistes belges sont indépendants), l’AJP n’aurait pas besoin de publier de Livre noir des journalistes indépendants, de lancer sa campagne «Pigiste pas pigeon», ni d’organiser aujourd’hui un happening urbain dans les rues de Bruxelles.

Que l’affaire Google News vs Copiepresse éclate en même temps que les actions de dénonciation de l’AJP ne doit pas grand chose au hasard. Ces deux événements posent crûment la question du financement de la presse en démocratie. Le voilà, le véritable enjeu. Et ce n’est pas en faisant passer Google à la caisse – même s’il le mérite amplement pour ses piratages photographiques– que le problème sera résolu. Ce n’est pas un combat corporatiste d’arrière-garde qu’il faut mener, mais un vrai débat démocratique qu’il faut ouvrir.

Lire la suite...

vendredi 15 septembre 2006

[+/-]

Non mais!



Lire la suite...

mercredi 13 septembre 2006

[+/-]

Le paradis perdu des écoradicaux

Je rebondis sur le post de The Mole concernant un gratuit très largement distribué dans les réseaux de magasins bio, car c’est quelque chose qui me trotte dans la tête depuis quelques temps déjà. On nage ici en plein «écoradicalisme», une philosophie à laquelle Alan Sokal consacre quelques pages intéressantes dans son dernier ouvrage (Pseudosciences & postmodernisme, Odile Jacob, 2005), dont je me permets au passage de recommander la lecture à tous les adeptes d’un «scepticisme raisonnable».

Dans son essai, Sokal cite essentiellement l’historien étasunien Martin Lewis, auteur d’un article séminal sur la question (1). En gros, que dit Lewis, explicitement ou entre les lignes? Qu’être à la fois un gros réac’ (qui peste contre «l’épidémie de divorces et la banalisation de l’homosexualité», tel l’éditorialiste ici pointé) et un opposant à la rationalité scientifique (qui défend en l’occurrence une pseudoscience comme la «biomnémologie» et fait l’apologie des anges) est monnaie courante dans les milieux écologistes radicaux.

Etat de grâce écologique

Sa démonstration n’est pas inintéressante. «La plupart des écoradicaux, analyse Lewis, pensent que pendant des millénaires les êtres humains ont vécu dans un état de grâce écologique, comme une espèce parmi une multitude d’autres, au sein d’un écosystème planétaire équilibré et harmonieux». La Révolution industrielle aurait brisé cet équilibre. Pire, elle nous mènerait aujourd’hui au bord du gouffre.

«La mission de l’écophilosophie, poursuit Lewis, est d’expliquer comment une rupture aussi totale a pu avoir lieu et surtout de montrer comment cet équilibre peut être rétabli à temps» pour sauver la planète. Au passage, Lewis précise que pour de nombreux écophilosophes, les raisons de cette rupture sont à trouver «dans le culte de la raison apparu en Europe au début de l’ère moderne, dont l’apogée a été la méthodologie scientifique moderne». La faute au progrès et rien qu’au progrès, en somme.

Cela dit, un problème de taille est vite apparu: l’«état de grâce écologique», ce paradis perdu prémoderne où l’homme vivait en paix avec lui-même et la nature, n’a jamais existé. L’examen minutieux des données archéologiques, anthropologiques et celles de l’écologie scientifique l’a amplement démontré, assène Lewis. Avant la Révolution industrielle, en effet, «si la torture des animaux, l’oppression des femmes par les hommes et la dévastation (locale) de l’environnement n’étaient peut-être pas universellement répandues, elles n’en demeuraient pas moins assez fréquentes un peu partout.» Bref, les fondements de l’écophilosophie radicale ont vite été réduits à néant.

Le postmodernisme comme 3e voie

Dès lors, comment réagir lorsqu’on est écophilosophe? «C’est ici qu’intervient le postmodernisme, estime Lewis : il leur fournit un moyen idéal d’échapper à leur dilemme», lequel étant soit d’abandonner rationnellement cette philosophie aux bases bancales, soit de s’y accrocher irrationnellement dans une ferveur qui confine à la religiosité.

En effet, une position postmoderne «élimine l’encombrante nécessité d’une confirmation empirique. Dans les versions les plus extrêmes du postmodernisme, la notion de preuve tout comme les règles de la logique sont considérées comme une simple construction sociale que les détenteurs du pouvoir utilisent pour conserver et justifier leur position. De ce fait, il devient possible de soutenir que les scénarios du passé humain engendrés par l’imagination fertile des écoradicaux sont tout aussi légitimes que les théories des archéologues professionnels et d’autres “scientifiques” emprisonnés dans les méandres du discours objectiviste.»

Ce qui ouvre la voie au poujadisme antimédical et aux délires pseudoscientifiques véhiculés par certaines publications «bioradicales», comme celle épinglée par The Mole. CQFD.


(1) Lewis, Martin W. 1996. «Radical Environmental Philosophy and the Assault on Reason». In The Flight from Science and Reason, edited by Paul R. Gross, Norman Levitt, and Martin W. Lewis, pp. 209–230. New York: New York Academy of Sciences.


Illustration: Adélie, Creative Commons By-NC-SA.

Lire la suite...

lundi 11 septembre 2006

[+/-]

Nous, les médias

Il y a un mois, Canal+ rediffusait le reportage de l’émission Lundi Investigation sur les «citoyens journalistes», diffusé initialement en avril dernier. Dans «Tous reporters: la fin des journalistes?», Ariel Wizman et Laurent Lunetta livrent le fruit de leur enquête, réalisée en France, en Italie, en Angleterre et aux Etats-Unis, sur ces nouveaux réseaux en train de modifier drastiquement la donne informationnelle.
Au générique, de nombreux grands noms du mouvement dont Cyril Fiévet, Loic Le Meur, Dan Gillmor (auteur de la bible We The Media), Christophe Grébert, Joël de Rosnay et Carlo Revelli (Agoravox.fr), Alban Gonord et Joëlle Menrath (auteurs de Mobile Attitude) ou encore Bruno Patino (coauteur de Une presse sans Gutenberg).
Plusieurs extraits de cette émission, remontés en une séquence de 9 minutes, sont visibles grâce à DailyMotion, le YouTube frenchy:


Dans la même veine, et si l’anglais ne vous rebute pas, le documentaire de la Cambridge Community Television, intitulé «Citizen Journalism: From Pamphlet to Blog» (12 minutes) et diffusé pour la première fois le 10 août dernier, vaut également le coup d’œil (via Damien Van Achter) :


J’en profite pour saluer (tardivement) l’arrivée dans la blogosphère belge d’un honorable confrère qui, depuis bientôt un mois, blogue anonymement sous le pseudonyme de The Mole («la taupe», en français), mais donne tellement d’informations sur son profil qu’il est assez facile de l’identifier. Il s’agit d’une des plumes les plus progressistes d’un grand quotidien de la capitale qui s’octroie un espace de liberté rédactionnelle où la critique des médias et l’évolution du métier de journaliste font figure de piliers thématiques.

Enfin, si vous avez loupé le paquebot MySpace, ne manquez pas l’analyse prospectiviste que propose Benoît Raphaël sur son blog du modèle économique en devenir de la plateforme n°1 du social networking: «Ce n’est pas ce qu’est MySpace qui est intéressant. C’est ce qu’il permet. Avec ses quarante millions d’internautes qui restent chaque mois en moyenne plus de deux heures sur le site à socialiser et à crier ce qu’ils aiment ou n’aiment pas, MySpace est un moteur à business en puissance. Une machine sur laquelle on devrait pouvoir brancher toute une série de services, de médias et surtout de nouveaux projets.» Parmi ceux-ci, justement, le probable futur jackpot de Rupert Murdoch proposera sous peu un service de news entièrement personnalisées, basé sur le contenu de la page perso des membres de la communauté. «Car finalement, poursuit Benoît, et c’est là la force extraordinaire de ce service, MySpace est surtout une façon ludique de faire remplir à des millions de gens un formulaire d’une rare profondeur sur ses goûts, ses choix, ses relations. Une précieuse base de données». Le coup marketing du 21e siècle?

Lire la suite...

mercredi 30 août 2006

[+/-]

«Le gratuit stresse tout le monde»

«La promo aujourd’hui commence avec les gratuits. McDo, Carrefour, Conforama, ils ont tous des gratuits; être dedans fait vendre, il paraît. Les gratuits, ça se joue là-dedans, comme on dit à France Culture. Le gratuit stresse tout le monde. Ils ont des tirages énormes. Et les gens écoutent ce que dit le gratuit, comme si le conseil du gratuit était plus fiable. Ils doutent du conseil du payant, comme si le gratuit était libre et le payant inféodé. C’est un mouvement de fond. Nous sommes au cœur du sujet: la gratuité est synonyme de liberté. Puisque la liberté ne coûte rien, forcément. Ce qui est un mensonge.»

Jean-Louis Murat, évoquant la promo de son nouvel album, Taormina (Scarlett/V2), dans Le Monde.

J’aime bien Murat et sa grande gueule de franc-tireur montagnard. Complètement atypique – le bonhomme a sorti sept CD, DVD ou livres en 3 ans –, ce fouteur de pieds dans le plat a récemment été débarqué par Virgin en fin de contrat. Le voici à présent sur le label indépendant V2, auquel il aurait bradé son nouveau disque: «Je leur ai fait à moitié prix», dit-il. Le prix de l’indépendance...
Si la presse gratuite et le Web rendent nerveux les «vieux» médias de la galaxie Gutenberg, la «gratuité» de la musique sur le Net stresse depuis des années les majors musicales. Seraient-elles en train de se réveiller? Apparemment oui, mais discrètement. Elles expérimenteraient depuis peu de nouveaux modèles économiques: création d’un label à part qui tente un nouveau mode de partage des bénéfices avec les artistes, vente de chansons plus chères mais sans DRM, offre de différentes options tarifaires pour des CD (du CD de base à l’objet de collection), vente de packages combinant abonnements et supports à prix promotionnels… Une démarche innovante dopée par la forte progression des ventes de musique en ligne qui, selon la RIAA, devraient atteindre 1 milliard de dollars en 2006.
Mais pourquoi ne pas carrément vendre de jolies pochettes vides que les internautes rempliraient de CD gravés contenant le fruit de leurs téléchargements? Que ceux-ci soient issus d’une plateforme de téléchargement légale ou non, la vente d’un bel emballage permettrait de colmater des «fuites» – de toutes façons inéluctables – de revenus potentiels. Pour 3 euros, par exemple, on trouverait la pochette vide du dernier Robbie Williams à la FNAC, et toutes celles de la longue traîne par e-commerce sur la toile.
Bien sûr, la génération i-Pod s’en tape des pochettes. Mais va-t-elle seulement fouiller dans les bacs des disquaires, si ce n’est des disquaires virtuels? La cible, c’est les nostalgiques du CD qui téléchargent. Et il y en a beaucoup.

Lire la suite...

lundi 28 août 2006

[+/-]

Sublimer l’insoutenable

C’est la cascade de dominos sublimée par Calder. Deux minutes de poésie en mouvement. Le petit film ci-dessous, splendide exemple de marketing viral (dont vous me pardonnerez d’être à mon tour l’agent), montre un ensemble magistralement calculé de réactions en chaîne de pièces détachées d’une voiture.
Formellement grandiose, cette pub mégalo – sans trucage, elle aurait nécessité plus de 600 prises, trois mois de tournage et coûté la bagatelle de 6 millions de dollars – est surtout extrêmement puissante sur le plan symbolique, quand on connaît le bilan écologique de nos chères voitures. En l’occurrence, il s’agit ici d’une Honda Accord Tourer, dont la contribution au réchauffement climatique varie entre 196 et 237 g de CO2/km, selon les modèles essence, pour une moyenne européenne de 163 g/km.

Lire la suite...

jeudi 24 août 2006

[+/-]

Embryons d’e-journal

Voici deux petits clips d’entreprise qui pourraient bien en émouvoir plus d’un d’ici quelques années. Que montrent-ils? Deux prototypes différents d’e-paper (papier électronique) flexible. Deux candidats parmi d’autres dans la course technologique à l’après-papier.
Il manque encore la couleur, certes, mais la recherche avance. A grands coups de talons.

L’e-paper SVGA de Plastic Logic :



...et la diode électroluminescente organique (OLED) flexible de Universal Display:



Sans sombrer dans la technobéatitude – il est indéniable que les déchets électroniques constituent une menace écologique majeure pour les pays industrialisés –, rappelons tout de même que l’industrie du papier est une industrie lourde, gourmande en eau et polluante. Comme le résume Greenpeace, «on distingue deux types de pollutions: la pollution atmosphérique, due à des composés sulfurés, et la pollution de l’eau liée aux effluents et, en particulier, à l’usage du chlore».
Par ailleurs, selon une étude réalisée en 2001 par le Laboratoire fédéral suisse d’essai des matériaux, «du papier recyclé fabriqué en Allemagne avec des techniques ordinaires se révèle deux fois plus polluant que du papier à base de cellulose fraîche produit en Norvège». Autrement dit, le papier recyclé n’est pas toujours une alternative durable. Tout dépend essentiellement des sources d’énergie utilisées...


Sources vidéos: Jeff Mignon / Visual Editors/ YouTube.com

Lire la suite...

lundi 7 août 2006

[+/-]

Mais où est le monde?

L’appel ci-dessous vient d’être lancé par des journalistes italiens, envoyés ou correspondants au Liban. Puissent-ils être entendus.

«La guerre continue. Heure après heure. Jour après jour. Epouvantable. Cruelle. Horrible. Impossible de faire le compte des morts et des blessés, de trouver les mots pour exprimer les souffrances des populations rescapées des massacres à ce jour, d’estimer l’ampleur des destructions. Nous, journalistes, témoins de la guerre qui est en train de dévaster le Liban et le Moyen-Orient, éprouvons le devoir de relayer l’appel désespéré des enfants, des femmes, des hommes, des blessés, des réfugiés, des malades de cette terre ensanglantée: mais où est le monde? Faites quelque chose pour arrêter cette folie démesurée. Exigez un cessez-le-feu immédiat. Ne restez pas silencieux. Faites-le tout de suite. Faites-le maintenant.»

Gianluca Ales, Sky TG24 - Giuseppe Bonavolontà, Rai TG3 - Stefano Chiarini, Il Manifesto - Luca Del Re, Tg La7 - Marc Innaro, Rai - Daniele Mastrogiacomo, La Repubblica - Andrea Nicastro, Corriere della Sera - Ferdinando Pellegrini, GR Rai - Ennio Remondino, Rai - Claudio Rubino, Rai TG3 - Barbara Schiavulli, Avvenire - Neliana Terzigni, Rai - Giuseppe Zaccaria, La Stampa

Source: Acrimed

Lire la suite...

vendredi 4 août 2006

[+/-]

ReTeBe mon amour

Publicité, infotainment, tyrannie de l’audimat…: la radiotélévision publique belge, financée par les contribuables, n’échappe décidément pas à la logique de marché.
Le journaliste Bernard Hennebert, emmerdeur salutaire, «lanceur d’alertes», interpelle via ce livre les citoyens-contribuables que nous sommes pour que nous fassions pression sur le politique en vue de «démocratiser» une RTBF qu’il estime de moins en moins en phase avec ses missions de service public.
Ce qui ne veut pas dire qu’elle les évacue complètement. Il suffit, pour s’en convaincre, de regarder la qualité de l’émission d’investigation Questions à la une et le succès d’audience qu’elle rencontre. Mais dans l’esprit de l’auteur, les programmes de ce type se font de plus en plus rares, alors qu’ils étaient quasi la norme il y a une quinzaine d’années encore...
Bref, Hennebert lance ici un cri du cœur civique, solidement argumenté, pour que la «ReTeBe» (re)joue pleinement son rôle de stimulant de la citoyenneté. Sera-t-il entendu?
On peut en tout cas y prêter une oreille attentive en (ré)écoutant l’émission Objecteurs de croissance (1h15) consacrée exclusivement à l’avenir de la RTBF dans le contexte actuel de la renégociation de son contrat de gestion.
Bernard Hennebert et Jean-Baptiste Godinot (ASBL Respire), qui sont les deux seuls invités (un représentant de la RTBF, de sa régie publicitaire ou de la ministre Fadila Laanan n’aurait sans doute pas été superflu...), y expliquent avec beaucoup de pédagogie le processus d’élaboration du contrat de gestion de la RTBF, les raisons pour lesquelles ils estiment nécessaire une réforme en profondeur du CSA, certaines pistes alternatives pour financer la RTBF sans aucune manne publicitaire (23% de son budget actuel!), les dangers de la révision en cours de la directive européenne «Télévision Sans Frontières», etc.

Ecouter:



Télécharger le fichier MP3 de l’émission.


La RTBF est aussi la nôtre, Bernard Hennebert, Aden, 2006, 210 p.

Voir également ConsoLoisirs.be, le site de Bernard Hennebert.

Lire la suite...

lundi 31 juillet 2006

[+/-]

La fin et les moyens (4/4)

Philippe Van Roey, responsable des relations presse du WWF:

«C’est déplorable d’aller chercher la petite bête!»

«Rock Werchter nous offre la possibilité de toucher 300.000 personnes. Les sponsors de l’événement? Ce n’est pas nos affaires. Si nous voulons survivre, trouver des fonds, il faut qu’on joue dans la logique commerciale. Si on se contente d’essayer de toucher le public de façon "archaïque", sans utiliser Internet, les grands médias ou les événements grands public, on peut fermer boutique dans quelques mois.
La question de l’exploitation de notre image par les organisateurs sur le site Internet du festival est hors de propos. Ils mettent un stand gratuitement à notre disposition pour que nous puissions, avec un budget très réduit, toucher un maximum de gens. Ca m’a l’air évident comme collaboration. On peut toujours aller chercher la petite bête dans n’importe quelle démarche. Je trouve ça assez déplorable. C’est souvent le cas avec les journalistes, malheureusement. Au lieu d’être constructifs et de voir le bon côté des choses, il y a toujours des gens pour voir le côté un peu obscur.
On est dans un monde où tout le monde se rend bien compte qu’il faut agir au niveau écologique. Y compris les grandes multinationales. Nous nous inscrivons dans un dialogue, une relation constructive. Nous avons par exemple un partenariat avec Lafarge, le leader mondial des matériaux de construction. Comme ils polluent énormément, nous leur fournissons des recommandations pour qu’ils limitent leurs rejets de CO2.»

Lire la suite...

vendredi 28 juillet 2006

[+/-]

La fin et les moyens (3/4)

Claire Pierson, responsable des campagnes chez Oxfam-Solidarité:

«On en débattra l’an prochain»

«Nous sommes présents depuis 2001 dans la plupart des grands festivals d’été pour toucher un nouveau public. Si nous allons à Rock Werchter, c’est parce que c’est un très grand festival où il y a très peu d’ONG. Nous recevons 4 places par jour, pour les bénévoles qui tiennent les stands.
Cela dit, nous nous investissons beaucoup plus dans le festival Esperanzah, dont nous sommes partenaires (ce n’est pas le cas d’Amnesty et du WWF, NDLR) et que nous préparons activement. Parfois, il est peut-être bon aussi de participer à de grands événements comme Rock Werchter, pour mettre des grains de sable dans les rouages. Nous faisons donc les deux : soutenir de vraies alternatives, comme Esperanzah!, et rencontrer le grand public de Rock Werchter. En étant sur place, on peut faire changer les choses. Aujourd’hui, Bacardi ne sponsorise plus Couleur Café... A Werchter, l’an dernier, des jeunes nous ont interpellés parce que nous buvions des cartons de jus d’orange Minute Maid: "Pourquoi ne buvez-vous pas du jus d’oranges Oxfam?" Cette année, il y en avait dans le stand d’Oxfam-Magasins du monde Flandre, qui a vendu également des produits "épicerie" du commerce équitable. Il y a donc eu des alternatives sur place.
Pourquoi a-t-on réagi à la présence de Bacardi à Couleur Café et pas à celle de Coca-Cola à Werchter? Peut-être parce que sur le dossier Bacardi, on est très forts. Nous avons un spécialiste de Cuba qui connaît très bien le dossier. Cela dit, le problème de l’eau en Inde, c’est quelque chose que nous suivons aussi de près… Les femmes du Kérala, on les soutient.
Mais il est vrai qu’il faudrait se poser la question de savoir si l’on va ou pas à Werchter. Mettre dans la balance le nombre de gens qu’on peut toucher et ce que cela peut coûter symboliquement parce que c’est organisé par Clear Channel et sponsorisé par Coca-Cola. Je proposerai que l’on en débatte l’an prochain.»

Lire la suite...