samedi 31 décembre 2011

[+/-]

Defour et Mangala à Porto: 1,5 million € de commission pour Luciano D’Onofrio?


Photo: UEFA.

La société Robi Plus Limited, qui a reçu gratuitement 10% des droits sportifs des joueurs Steven Defour et Eliaquim Mangala, est administrée par Maurizio Delmenico, le conseiller financier et prête-nom de Lucien D’Onofrio dans de nombreux transferts douteux scrutés par la justice liégeoise. Robi Plus négocie actuellement la revente de ces droits avec un hedge fund domicilié dans le paradis fiscal de Malte, qui possède déjà 33,3% des droits des deux joueurs.

Si le FC Porto n’était pas côté en bourse, on n’aurait sans doute jamais appris l’existence ni le montant de la commission que Lucien D’Onofrio devrait toucher pour son rôle en coulisses lors des transferts de Steven Defour et d’Eliaquim Mangala du Standard de Liège à Porto l’été dernier.

C’est en vertu de l’article 248 du Code des valeurs mobilières que le club portugais a été contraint de révéler, dans un discret communiqué adressé mardi au gendarme de la Bourse portugaise (CMVM), la cession de 43,3% des droits sportifs des joueurs à deux obscures entités privées.

Concrètement, Doyen Sports Investments Limited, un hedge fund domicilié dans le paradis fiscal de Malte, a acquis 33,3% des droits des joueurs pour 5 millions d’euros, alors qu’une autre entité, Robi Plus Limited, a reçu 10% de ces mêmes droits... sans contrepartie financière, selon le communiqué du club.

Un «cadeau» de 1,5 million €

Proportionnellement aux 5 millions déboursés par le hedge fund, les 10% de Robi Plus correspondent à un «cadeau» d’une valeur de 1,5 million d’euros. Cette cession de droits signifie qu’en cas de départ des joueurs de Porto, Doyen Sports touchera 33,3%, Robi Plus 10%, et le FC Porto 56,7% sur chaque transfert réalisé.

Or Robi Plus, société boite-aux-lettres de droit britannique, est administrée par Maurizio Delmenico, le conseiller financier et prête-nom de Lucien D’Onofrio dans de nombreux transferts douteux scrutés par la justice liégeoise. Elle est domiciliée à la même adresse londonienne que Corporate Press Limited, une société de la «galaxie offshore» du tandem D’Onofrio-Delmenico, inculpée en juin dernier pour faux et usage de faux lors de transferts de joueurs.

Comme Corporate Press, Robi Plus a été créée par Delmenico en juillet 2002, a changé deux fois d’adresse aux mêmes dates, et compte un mystérieux actionnaire qui détient, via un unique titre au porteur, la totalité du capital (1.000 livres sterling). Les titres au porteur ont été bannis dans la plupart des pays parce qu’en garantissant l’anonymat des actionnaires, ils permettent de contourner les règlementations financière et fiscale.

Contacté par Le Soir, Maurizio Delmenico a refusé de dévoiler l’identité de l’actionnaire de Robi Plus. Il assure avoir «travaillé» pour toucher ces droits, obtenus «dans le cadre de [ses] activités d’agent de joueurs». Il ajoute qu’il négocie actuellement la revente de ces droits avec Doyen Sports Investments.

Selon Stéphane Vande Velde, journaliste à Sport/Foot Magazine, qui a enquêté sur les transferts du Standard l’été dernier, Defour et Mangala ont été transférés par leurs agents respectifs, Paul Stefani et Fabrizio Ferrari, «mais c’est Lucien D’Onofrio qui a tiré toutes les ficelles et finalisé les deals, en ayant recours à des prête-noms». D’après plusieurs agents interrogés par notre confrère, l’ex-homme fort du Standard a été rétribué «à l’intéressement», c’est-à-dire sur les montants des futurs transferts des joueurs, «une pratique assez courante au Portugal».

D’Onofrio radié des agents FIFA

Condamné pénalement à plusieurs reprises pour malversations financières en France, Lucien D’Onofrio ne peut plus agir comme agent de joueurs. L’article 6 du règlement FIFA des agents est formel: le candidat agent doit être «de réputation parfaite», une qualité acquise «si aucune peine n’a jamais été prononcée contre lui pour délit financier ou crime de sang».

Un agent agréé, tel Delmenico, qui jouerait les prête-noms pour un tiers, risque de perdre son agrément FIFA. «Tout agent de joueurs a le droit de s’organiser sous forme d’entreprise pour autant que l’activité de ses collaborateurs se limite aux tâches administratives. La gestion des intérêts de joueurs et/ou de clubs vis-à-vis de joueurs et/ou de clubs est exclusivement réservée à l’agent de joueurs», précise l’article 3 du règlement.

Joint par téléphone en Afrique, où il passera le réveillon de nouvel an, Lucien D’Onofrio nie être intervenu dans ces transferts au-delà d’un conseil ou l’autre prodigué au FC Porto ou à Maurizio Delmenico.

L’international belge Steven Defour et l'international espoirs français Eliaquim Mangala ont débarqué en août dernier au FC Porto, champion du Portugal en titre, pour un montant global de 12,5 millions d’euros. En cas de transfert dans les cinq ans, le club acquéreur devra s’acquitter d’une clause libératoire de 50 millions d’euros par joueur, «preuve que Porto veut les vendre à ce prix-là», analyse Stéphane Vande Velde. Dans ce cas, la commission de Robi Plus Limited grimperait à 10 millions d'euros...

David Leloup

Le Soir, 31 décembre 2011 (html) (PDF)

Lire la suite...

lundi 19 décembre 2011

[+/-]

Anderlecht rattrapé par l’«affaire D’Onofrio»



Le Sporting d’Anderlecht, et son ex-manager général Michel Verschueren, sont éclaboussés par l’enquête de la justice liégeoise sur les transferts douteux du Standard sous l’ère de Lucien D’Onofrio. Pour minorer le salaire officiel d’Ivica Mornar, acheté au Standard en 2001, le Sporting a payé une fausse facture de 250.000 euros à une société écran au Luxembourg. Cette société a entre autres versé au joueur un complément de salaire occulte de 155.000 euros sur un compte en Autriche.

Quand il a dû choisir un paradis fiscal pour cacher au fisc belge son petit trésor – un complément de salaire occulte versé par Anderlecht en 2001-2002 –, l’attaquant croate Ivica Mornar, surnommé le «Pirate» par ses fans, a préféré les forêts autrichiennes au sable fin des plages caraïbéennes.

Son agent officieux de l’époque, Djuro Sorgic, inculpé pour faux et usage de faux par la justice liégeoise en juin dernier, s’est par contre abrité derrière l’anonymat de sociétés écrans battant pavillon des îles Vierges britanniques, dans les Caraïbes, pour toucher discrètement, au Luxembourg, une commission sur le transfert du joueur.

C’est notamment ce qui ressort de la longue enquête instruite par le juge financier Philippe Richard à propos d’une ribambelle de transferts douteux réalisés au Standard de Liège entre 1996 et 2004. Ces investigations, démarrées suite à une perquisition dans les bureaux du club principautaire en février 2005, constituent le second volet du dossier 24/04, ouvert initialement pour suspicion de blanchiment de fonds gagnés par Lucien D’Onofrio lorsqu’il était agent de joueurs.

Bouclé l’été passé, le dossier d’instruction a été transmis le 21 septembre au parquet de Liège, actuellement occupé à tracer son réquisitoire. Dans la foulée, le parquet pourrait aussi procéder à de nouvelles inculpations.

Cas d’école

Dans le cadre du volet «transferts douteux», les enquêteurs de la brigade financière de Liège sont tombés tout à fait par hasard, au Sporting d’Anderlecht, sur un véritable cas d’école de ce que d’aucuns ont peut-être un peu trop vite appelé le «système D’Onofrio», c’est-à-dire la pratique, illégale, consistant à verser une rémunération occulte à certains joueurs, plutôt que de leur verser les gros salaires qu’ils réclament. L’objectif de la manœuvre est d’éviter au club acheteur de payer les charges fiscales et sociales liées à ces compléments de salaire, tout en satisfaisant les joueurs particulièrement gourmands sur le plan de la rémunération.

Ce cas d’école concerne donc l’achat, par Anderlecht, d’Ivica Mornar au Standard, à l’été 2001. A l’époque, après trois saisons de bons et loyaux services à Sclessin, l’international croate se retrouve dans le noyau C. Vexé, il souhaite alors rejoindre Anderlecht qui cherche un attaquant.

Lucien D’Onofrio, plaque tournante des transferts au Standard, lui donne son feu vert, et après d’âpres discussions, le Pirate se lie au pavillon Mauve et Blanc pour quatre saisons. Le transfert est signé le 17 juillet 2001 pour la somme de 50 millions de francs belges hors TVA – soit 60,5 millions (1,5 million d’euros) TVA incluse.

Lors des négociations, Anderlecht avait jugé Mornar trop gourmand sur le plan salarial. «On avait fait une offre que Michel Verschueren [manager général du Sporting à l’époque] avait jugée trop élevée», racontait récemment Djuro Sorgic à la Dernière Heure. «On avait attendu quelques jours et le Sporting avait perdu sa rencontre suivante. Le transfert de Mornar s’est alors fait rapidement et à nos conditions.» Des conditions pour le moins troubles que Le Soir est aujourd’hui en mesure de révéler.



Infographie réalisée avec le soutien du Fonds pour le journalisme en Communauté française.

Convention bidon

Le 16 juillet, soit la veille de la signature du transfert, une convention bidon est signée entre le Sporting d’Anderlecht et Concordia Investments S.A., une société luxembourgeoise dont les actionnaires se cachent derrière des titres au porteur. Concordia n’est en réalité qu’un véhicule financier anonyme «loué» par Sorgic à un expert-comptable du Grand-Duché.

But de la manœuvre: payer un complément de salaire en noir au joueur en gonflant artificiellement la commission de son agent, afin que celui-ci en rétrocède une partie à Mornar. Un montage bien peu orthodoxe pourtant avalisé par Michel Verschueren, qui a directement négocié l’opération avec Sorgic.

Selon les termes de cette convention, Anderlecht versera 10 millions de francs (250.000 euros) à Concordia pour «frais d’honoraires et d’assistance» dans le cadre de la cession du joueur. Soit l’équivalent de 20% du prix du transfert qui sera signé le lendemain. C’est énorme pour une commission d’agent de joueurs, la moyenne oscillant autour des 7%...

D’après l’enquête judiciaire, c’est Jurica Selak, un agent de joueurs qui compte aujourd’hui Jérémy Perbet, Laurent Ciman et Mbark Boussoufa dans son «écurie», qui signe à l’époque la convention pour Concordia. Djuro Sorgic nous le confirme: «Je n’ai jamais été un agent officiel reconnu par la FIFA [Fédération internationale de football, NDLR]. Un club ne peut donc pas signer de conventions avec moi. J’ai demandé à mon ami Jurica de me rendre ce service.»

Contacté par Le Soir, Jurica Selak nie avoir signé quoi que ce soit et dit ne pas connaître Concordia: «J’ai juste servi de traducteur pour le papa de Mornar qui ne comprenait pas bien certains termes lors des négociations avec Anderlecht. Je l’ai fait par pure amitié pour Mornar et parce que ça me permettait de rencontrer de visu la direction d’Anderlecht. C’était mon seul intérêt.»

L’agent a en outre déclaré aux enquêteurs ne pas reconnaître sa signature sur la facture de 10 millions de francs envoyée par Concordia à Anderlecht le 26 août 2001… Une facture dont le Sporting versera le montant en quatre tranches sur le compte de Concordia à la Banque de Luxembourg: 2 millions le 19 septembre, 3 millions le 23 octobre, 3 millions le 27 novembre, et 2 millions le 2 janvier 2002.

Retraits cash et sociétés écrans

Qu’est-il ensuite advenu de ces fonds? Les enquêteurs le découvriront grâce à un document capital retrouvé lors d’une perquisition chez Jeannot Mousel, un expert-comptable luxembourgeois qui gérait les affaires de Djuro Sorgic tout en lui servant aussi de prête-nom. Ce document manuscrit détaille neuf mouvements financiers – retraits en cash et virements à des sociétés écrans – réalisés entre septembre 2001 et janvier 2002 pour rétribuer quatre individus: le joueur, son agent officieux, Mousel et un intermédiaire.

L’enquête pénale confirmera que plus de 6,2 millions de francs (154.629 euros) ont été versés en trois tranches sur le compte n° 722.90.20 d’Ivica Mornar ouvert à la Hypo Alpe-Adria Bank de Klagenfurt, en Autriche, pays où le secret bancaire est l’un des plus stricts au monde.

Selon le document, trois autres millions (74.368 euros) – soit 6% du prix du transfert – sont revenus dans les poches de Djuro Sorgic. Une partie en cash: un million retiré du compte de Concordia le 19 septembre, et 750.000 francs le 23 octobre. Le reste, 1,25 million, a été injecté le 20 novembre dans le capital d’Investgest S.A., une société luxembourgeoise appartenant à Sorgic et dont les actionnaires étaient à l’époque International Allied Services Ltd. et Britanica Asset Management Ltd., deux opaques sociétés offshore enregistrées aux îles Vierges britanniques et administrées par Mousel. L’expert-comptable luxembourgeois recevra d’ailleurs 300.000 francs (7.437 euros) de «commissions» pour ses bons services.

Djuro Sorgic nie fermement avoir perçu ces fonds: «Je suis intervenu dans ce transfert pour faire plaisir à Mornar. Dans cette histoire, c’est moi qui ai été le moins bien payé.»

Nanesse et le 4e homme

Le nom d’un quatrième homme apparaît également sur le document retrouvé chez Mousel: Valère Facchini, un comptable liégeois et ex-agent de joueurs (suspendu). C’est lui qui a présenté Mousel à Sorgic. Le document indique qu’il aurait touché 405.000 francs (10.040 euros) – soit 4% du montant versé par Anderlecht –, la moitié en cash, l’autre moitié sur un compte de Contragest S.A., une coquille luxembourgeoise pilotée par Mousel via une offshore irlandaise.

Détail troublant: le bureau de Facchini, perquisitionné par les limiers liégeois au tout début de l’enquête, était situé à Beyne-Heusay, dans la banlieue de Liège, à 500 mètres à peine de chez Jurica Selak. Le premier aurait-il servi d’«homme de paille» pour le second? Selak le nie farouchement: «Je n’ai touché aucune commission sur ce transfert», insiste-t-il. Valère Facchini n’a pu être joint ce weekend.

En épluchant les documents saisis au Standard, les enquêteurs découvriront une autre transaction illicite intervenue dans ce transfert, indépendante du montage Concordia. Via sa société Village de Nanesse, active dans l’horeca, Sorgic a facturé au Standard 500.000 francs belges hors TVA (12.395 euros) pour le «bon déroulement du transfert du joueur Mornar».

Une commission à laquelle, une fois de plus, seul un agent agréé par la FIFA pouvait prétendre. La justice reproche d’ailleurs au directeur général du Standard de l’époque, Alphonse Costantin, inculpé en juin dernier pour faux et usage de faux, d’avoir notamment signé, le 16 juillet 2001, la convention illicite entre le club et Sorgic à l’origine de cette fausse facture. Contacté par Le Soir, Alphonse Costantin n’a pas souhaité réagir.

D’Onofrio charge Anderlecht

Lors d’un interrogatoire, Lucien D’Onofrio, qui contrôlait tous les transferts en coulisses (son nom n’apparaissait pas à l’époque dans l’organigramme du Standard), a chargé le club bruxellois pour le montage visant à rémunérer secrètement Mornar. Le montage Concordia, a-t-il expliqué aux enquêteurs, a été mis en place «à la demande du club» acheteur, à des fins d’«optimisation fiscale et sociale».

«Luciano n’a joué aucun rôle dans le transfert de Mornar», affirme Djuro Sorgic. «Tout ce qui l’intéressait était que le Standard touche l’indemnité de transfert de 50 millions de francs. Quand Michel Verschueren a signé la convention avec Concordia, il devait se douter que l’argent retournerait dans les poches de Mornar. Je suppose qu’il savait, mais je ne peux pas parler pour lui. C’est un vieux renard.»

S’il ne le savait pas, pourquoi aurait-il signé la convention avec Concordia, dont le montant est largement supérieur à une commission d’agent habituelle? «Je vous répète ce que j’ai dit à la police judiciaire de Liège: pour éviter de payer une somme importante à l’Etat belge. Si l’argent était revenu sous forme de salaire au joueur, Anderlecht aurait dû payer le fisc et la sécurité sociale en plus.»

Contacté par Le Soir, Michel Verschueren n’a pas souhaité s’exprimer sur cette affaire. «Des agents du fisc liégeois sont venus contrôler ce transfert chez nous et nous leur avons donné toutes les informations nécessaires. Cette affaire date d’il y a presque 10 ans et je n’ai plus les détails en tête. Je ne tiens pas à faire des déclarations qui pourraient nuire à qui que ce soit. Je ne veux pas attaquer Lucien D’Onofrio en public.»

Ivica Mornar n’a pas donné suite à nos appels et Jeannot Mousel était injoignable ce weekend. Jusqu’ici, seuls Djuro Sorgic et Alphonse Costantin ont été inculpés pour faux et usage de faux en lien, notamment, avec le transfert d’Ivica Mornar.

David Leloup

Le Soir, 19 décembre 2011 (html) (PDF)


Les faits ne sont pas prescrits

«Tant Anderlecht que M. Verschueren restent susceptibles d’être inculpés par le parquet de Liège», analyse un avocat pénaliste.

Les révélations du Soir concernant les commissions occultes versées à Ivica Mornar et son agent lors du transfert du joueur au Sporting d’Anderlecht, en 2001, ne sont pas passées inaperçues. La direction du club a réagi via un bref communiqué dans lequel elle rappelle que Michel Verschueren, l’ex-manager général d’Anderlecht, «avait apporté aux enquêteurs toutes les informations utiles à ce propos le 21 novembre 2007 et qu’il avait fait preuve d’une collaboration totale à cette occasion.» Elle précise en outre que «ni elle-même, ni Michel Verschueren n’ont fait l’objet de la moindre inculpation et elle n’entend faire aucun commentaire, tant (sic) en demeurant à l’entière disposition des dits (re-sic) enquêteurs si ces derniers devaient solliciter toute précision complémentaire.»

Le Soir
pour sa part précise que les faits rapportés lundi ne sont pas prescrits, tant sur le plan pénal que fiscal. «En regard des informations publiées, tant le club que M. Verschueren restent susceptibles d’être inculpés par le parquet de Liège pour faux et usage de faux, faux fiscaux, fraude fiscale et faux bilan, soit comme auteurs ou coauteurs», analyse Pierre Monville, avocat pénaliste et assistant à l’université de Liège. «Quant au joueur et son agent, ils pourraient être inculpés pour fraude fiscale. Tout cela est une question d’appréciation du parquet.» Celui-ci pourrait aussi demander des devoirs d’enquête supplémentaires au juge d’instruction pour identifier d’éventuels faits de blanchiment.

L’article 358 du code des impôts précise en outre que les revenus occultes perçus dans le cadre du transfert en 2001-2002 sont taxables dès lors qu’«une action judiciaire fait apparaître que des revenus imposables n’ont pas été déclarés au cours d’une des cinq années qui précèdent celle de l’intentement de l’action». Bref, toute malversation fiscale découverte par les enquêteurs entre 1999 et 2004 (début de l’enquête) peut faire l’objet d’une taxation par le fisc, et ce jusqu’à un an après un jugement définitif.

Les revenus occultes perçus par le joueur, son agent et l’intermédiaire belge en 2001 pourraient donc être taxés dès aujourd’hui par le fisc au taux d’imposition normal, assorti d’un taux d’accroissement de 50% lié à l’«intention frauduleuse» mise au jour par la justice. L’arriéré d’impôt serait d’environ 155.000 euros pour le joueur, de 55.500 euros pour son agent, et de 500.000 euros pour le club en vertu du régime spécial de taxation des commissions secrètes.

D.L.

Lire la suite...

[+/-]

Affaire D’Onofrio: nouveaux flux suspects vers le Liechtenstein



Bien que l’enquête de la justice liégeoise sur Luciano D’Onofrio et le Standard de Liège soit bouclée, les résultats de certains devoirs d’enquête continuent d’arriver à la brigade financière de Liège.

Les enquêteurs ont ainsi reçu, la semaine dernière, des informations bancaires concernant des flux financiers suspects entre Corporate Press Limited, une société écran contrôlée par Luciano D’Onofrio jusqu’à sa récente dissolution, et Acquira Anstalt, une mystérieuse structure du Liechtenstein créée en 1990 et liquidée en février 2006.

Les enquêteurs suspectent Acquira d’être le paravent d’un joueur auquel Luciano D’Onofrio aurait rétrocédé des commissions occultes dans le cadre d’un transfert. Les flux datent de 2004 et 2005, période où la justice liégeoise venait de débuter son enquête sur les activités de l’ex-homme fort du Standard.

Lors d’une perquisition, les enquêteurs avaient déjà découvert plusieurs fausses factures émises par Corporate Press dans le cadre de transferts de joueurs, dont celui de Sergio Conceiçao de l’Inter de Milan à la Lazio de Rome, à l’été 2003.

Société boite-aux-lettres basée à Londres, Corporate Press a été créée en juillet 2002, à une époque où Luciano D’Onofrio pilotait le Matricule 16 en coulisses, sans poste officiel au sein du club. L’ex-homme fort du Standard en était l’unique actionnaire via un titre au porteur anonyme.

Au quotidien, la société était administrée depuis Lugano par Maurizio Delmenico, un agent de joueurs et réviseur d’entreprises suisse très proche de D’Onofrio, et qui fut administrateur du Standard de 1998 à 2005.

Dans les comptes 2007 de Corporate Press, Delmenico déclare sur l’honneur être «incapable d’identifier le bénéficiaire ultime de la société», alors que les enquêteurs ont établi qu’il l’a créée pour son ami Luciano D’Onofrio.

Corporate Press n’est qu’une des nombreuses sociétés offshore utilisées par Luciano D’Onofrio dans ses activités d’intermédiaire dans le milieu du football. Elle a été officiellement radiée du registre des sociétés britannique le 28 juin 2011, soit trois jours après les inculpations de Luciano D’Onofrio et Maurizio Delmenico pour blanchiment d’argent, faux, et usage de faux.

David Leloup

Le Soir, 19 décembre 2011 (PDF)

Lire la suite...

lundi 7 novembre 2011

[+/-]

Le G20 et ses 220 € de «petits cadeaux» aux journalistes



En débarquant au G20, la semaine dernière à Cannes, les quelque 3.000 journalistes, caméramans et photographes qui ont couvert le sommet ont été particulièrement chouchoutés par la présidence française et ses nombreux sponsors.

Lors de la collecte des badges au centre d’accréditation, chaque représentant de la presse s’est vu délivrer une ribambelle de «petits cadeaux» made in France (pour l'essentiel) pour une valeur totale estimée de 219,94 euros. En voici l’inventaire détaillé:

  • un sac marin tricolore Artiga: 69 €
  • une serviette de bain «G20 France 2011» 160x90 cm: 18 €
  • un baume après-rasage Cade 75 ml L’Occitane: 22 €
  • un baume des yeux Immortelle 15 ml L’Occitane: 29 €
  • un shampooing réparateur 75 ml L’Occitane: 5 €
  • une huile de douche Amande 75 ml L’Occitane: 5,50 €
  • un savon extra-doux lait au karité 100 g L’Occitane: 4 €
  • une crème pour les mains 30 ml L’Occitane: 6,50 €
  • un flacon d’eau de parfum «Soleil» 7 ml Fragonard: 9 €
  • un guide vert Côte d’Azur Michelin: 15,40 €
  • un carnet de notes Moleskine: 11,50 €
  • un stylo à bille Parker Jotter: 7,65 €
  • un stylo à bille Bic quatre couleurs «G20 France»: 3,09 €
  • une clé USB 2Gb en forme de clé: 6 €
  • du chocolat Valrhona «Initiation grands crus»: 3,30 €
  • une pochette de cinq cartes postales «L’histoire s’écrit à Cannes»: 5 €
D.L.

Lire la suite...

vendredi 14 octobre 2011

[+/-]

Un Gorbatchev à 400 € la minute



Les honoraires de Mikhaïl Gorbatchev pour sa conférence donnée lundi passé à Liège seraient de 100.000 dollars. La SRIW, l’organisme public qui a payé l’addition, refuse de confirmer ce montant.

Le passage éclair de Mikhaïl Gorbatchev à Liège, le temps d’une conférence donnée lundi soir au Palais des Congrès devant 2.000 personnes, aurait coûté la bagatelle de 100.000 dollars (73.000 euros) au contribuable wallon. Des honoraires réglés par la Société régionale d’investissement de Wallonie (SRIW), un organisme dont la Région Wallonne est actionnaire à 98,66%. La SRIW refuse de confirmer ce chiffre, recueilli pourtant à bonne source.

A 80 ans, l’ancien président de l’Union Soviétique monnaie au prix fort ses apparitions publiques. Et ce même lorsqu’il est en tournée pour faire la promotion d’un de ses livres. Le titre de sa conférence liégeoise, « De la guerre froide à un monde durable », était en effet identique à celui de son dernier ouvrage, paru en mars dernier.

Le 21 octobre prochain, le prix Nobel de la paix 1990 prononcera le même exposé devant la chambre de commerce de Montréal. Le prix des places les moins chères est fixé à 325 dollars canadiens (232 euros). A Liège, l’entrée était gratuite.

Mikhaïl Gorbatchev est resté en tout et pour tout trois heures dans la cité ardente. «Il est arrivé peu avant 18 heures et est reparti sur Bruxelles vers 21 heures», confirme Eric Winnen, le patron de la société de communication qui a assuré la logistique de la soirée. La présence à Liège de cet invité de prestige aurait ainsi coûté 400 euros la minute au contribuable wallon.

Jean-Pascal Labille, président de la SRIW, refuse de confirmer le «prix» de Gorbatchev, estimant que ce serait du «voyeurisme». «Le chiffre que vous citez est supérieur à la réalité des choses, c’est tout ce que je peux dire. Cela fait quatre ans que nous organisons des conférences avec des gens qui sont des pointures dans le domaine financier ou géopolitique. En 2008, nous avons invité Joseph Stiglitz à Liège, en 2009 Paul Krugman à Louvain-la-Neuve, et en 2010 Muhammad Yunus à Mons. Le budget de la conférence de lundi était comparable à celui des événements précédents.»

Et Jean-Pascal Labille d’insister sur les aspects positifs de ces conférences. «Nous faisons venir en Wallonie des hommes qui n’y viendraient pas naturellement. Lundi, trois à quatre cents étudiants ont pu bénéficier de l’expérience de Mikhaïl Gorbatchev, un penseur puissant. Ces conférences permettent aussi de réunir dans un même cénacle le monde de l’entreprise et de l’université. Mais il est clair que ces orateurs ne sont pas des philanthropes, et qu’ils ne viennent pas pour rien.»

Quant à l’université de Liège, elle a profité de la venue de Stiglitz et Gorbatchev pour leur décerner ses insignes de docteur honoris causa. Sans bourse délier.

David Leloup

A lire également dans Le Soir (html) (PDF)

Lire la suite...

jeudi 1 septembre 2011

[+/-]

Sérigny n’a pas retiré sa plainte de 5 millions € contre Rue89



C’était donc du bluff. Dans un droit de réponse fleuve publié sur Rue89 le 12 janvier dernier, le financier français Eric Le Moyne de Sérigny annonçait solennellement l’abandon de ses poursuites en diffamation contre Rue89 et l’auteur de ces lignes, «en raison du dialogue, certes tardif mais constructif, qu'il m'a été permis d'avoir avec vous».

La vérité c’est que le dialogue, l’ex-conseiller d’Eric Woerth ne le supporte pas. Son ego n’a pas encaissé que nous rectifions, en commentaire à son droit de réponse, quelques contre-vérités qu’il avait assénées. Eric Le Moyne de Sérigny n’a par conséquent pas retiré sa plainte, qui court toujours. Une nouvelle audience a été programmée jeudi 26 janvier 2012 au tribunal de grande instance de Paris.

L’ami du président Nicolas Sarkozy et de l’ex-gestionnaire de fortune de Liliane Bettencourt réclame donc toujours 5 millions d’euros à la société Rue89, à son directeur de publication Pierre Haski et à moi-même pour diffamation. Sérigny exige également le retrait de l’article qu’il estime diffamatoire du site Rue89 sous peine d’astreinte de 5.000 euros par jour de retard, ainsi que le paiement des frais occasionnés par la procédure, soit 25.000 euros.

Depuis le début, nous estimons cette procédure intimidatrice et abusive.

D.L.

Photo: givikat/Flickr/CC.

Lire la suite...

lundi 27 juin 2011

[+/-]

La galaxie offshore de Luciano D’Onofrio

Panama, Liechtenstein, Îles Vierges, Pays-Bas, Irlande...

La fortune personnelle de l’ex-homme fort du Standard de Liège se trouve sur des comptes suisses détenus par un réseau de sociétés écran pilotées par Maurizio Delmenico: deux holdings, quatre réceptacles de fonds occultes présumés, trois véhicules réinjectant ces fonds dans l’économie légale, et une mystérieuse panaméenne inconnue des enquêteurs...


C’est à Tortola (Îles Vierges britanniques) qu'étaient domiciliées les deux obscures sociétés actionnaires de Barnross Developments (Irlande), une offshore contrôlée par Luciano D'Onofrio, l'ex-dirigeant du Standard. Lors de transferts de joueurs, Barnross aurait surfacturé de pseudos services de consultance à certains clubs, pour ensuite reverser ces sommes en noir aux joueurs transférés. (Photo: Johnny Shaw/Flickr/CC)

C’est un véritable réseau, opaque, de sociétés offshore domiciliées aux quatre coins du globe, qui était piloté par Maurizio Delmenico pour chapeauter les activités professionnelles de son ami Luciano D’Onofrio, l’ex-agent de Zidane et ex-homme fort du Standard de Liège.

Pour rappel, les deux hommes ont été inculpés, mercredi dernier, par le juge d’instruction liégeois Philippe Richard pour faux, usage de faux et blanchiment d’argent dans le cadre d’une association criminelle. Ils risquent jusqu’à cinq ans de prison et des amendes.

Le Soir a identifié pas moins de dix coquilles administrées par Delmenico, l’«architecte» de ces montages. Trois offshore sont domiciliées au Panama, deux au Liechtenstein, deux aux Îles Vierges britanniques, une aux Pays-Bas, une en Irlande et une au Royaume-Uni. Au moins cinq de ces coquilles sont encore actives aujourd’hui.

Toutes ces sociétés auraient des comptes bancaires en Suisse, plaque tournante des flux financiers de Luciano D’Onofrio. Un homme qui cultive la discrétion à l’extrême: son nom n’apparaît officiellement que dans deux panaméennes. Mais il contrôlerait, selon une source proche du dossier, les huit autres coquilles via des prête-noms – dont principalement Delmenico.

Cette galaxie de sociétés offshore financièrement interconnectées sert essentiellement deux objectifs. D’abord, récolter les commissions perçues par D’Onofrio lors des dizaines de transferts de joueurs dans lesquels il est intervenu, soit comme agent, soit comme «facilitateur» entre un club et un autre agent. Au moins quatre offshore auraient été utilisées à cette fin par l’ex-vice-président du Standard.

Ensuite, dans un second temps, il s’agit de réinjecter ces fonds dans l’économie réelle. Trois offshores ont joué ce rôle en Belgique, en investissant dans la SA Standard de Liège ou en achetant des biens immobiliers (appartement, maisons).

L’inculpation de Luciano D’Onofrio et de Maurizio Delmenico signifie que la justice estime posséder suffisamment d’éléments attestant qu’une partie des commissions perçues par D’Onofrio sont le fruit de fausses factures et ont échappé au fisc et à la sécurité sociale. Bref, qu’il s’agirait d’argent noir et que celui-ci aurait ensuite été blanchi en Belgique via des sociétés-écrans domiciliées aux Pays-Bas, au Panama et au Liechtenstein.

Outre D’Onofrio et Delmenico, cinq sociétés ont été inculpées par la justice liégeoise en tant que personnes morales: Mondial Service International Ltd. Inc. (Panama), International Agency for Marketing Ltd. (Liechtenstein), Corporate Press Limited (Royaume-Uni), Alalunga Anstalt (Liechtenstein), et Kick International Agency B.V. (Pays-Bas).

Contacté par Le Soir, Luciano D’Onofrio n’a souhaité faire «aucun commentaire sur cette affaire». Quant à Maurizio Delmenico, il n’était pas joignable ce week-end.

David Leloup


Les dix sociétés écran

1 Mondial Service International Ltd. Inc.
Domicile: Panama City, Panama
Création: 5 novembre 1986
Statut: active


Créée à l’époque où Luciano D’Onofrio était manager général du FC Porto, Mondial Service (MSI) apparaît dans l’affaire de la comptabilité occulte du SC Toulon, un scandale qui éclate au début des années 1990. En 1989, cette offshore émet une fausse facture d’une valeur de 222.000 euros au préjudice du SC Toulon pour des frais fictifs «de commission, publicité et marketing». Une partie de cet argent sera discrètement reversée à Rolland Courbis, à l’époque l’entraîneur du club. En 1995, D’Onofrio sera condamné pour ces faits par le tribunal correctionnel de Marseille: un an de prison avec sursis et 7.600 euros d’amende. MSI, dont Delmenico est le trésorier, est toujours active aujourd’hui: c’est elle qui loue la maison de D’Onofrio à Alalunga (lire ci-dessous). Autrement dit, Luciano D'Onofrio se loue sa propre maison via deux offshore qu’il contrôle...


2 International Agency for Marketing Ltd.
Domicile: Vaduz, Liechtenstein
Création: 20 avril 1988
Statut: active


Créée moins de deux ans après MSI, cette offshore a servi de caisse de transit pour la réception et le paiement de commissions occultes dans le cadre des transferts de plusieurs joueurs de l’Olympique de Marseille (OM), entre 1997 et 1999. Peu après l’acquisition de Fabrizio Ravanelli par l’OM en 1997, une commission de 808.000 euros a été versée sur le compte suisse d’IAM à la Corner Banca de Lugano. Sur ordre de Maurizio Delmenico, administrateur d’IAM, celle-ci reversera une rétrocommission de 152.000 euros à Rolland Courbis sur le compte anonyme «Frizione» ouvert à la Corner Banca.
Les statuts d’IAM ont été modifiés le 26 avril 2004, deux jours après que le juge d’instruction Richard ait été saisi de l’affaire.


3 Corporate Press Limited
Domicile: Londres, Royaume-Uni
Création: 11 juillet 2002
Statut: dissoute (juin 2011)


C’est l’une des deux sociétés identifiées créée après l’arrivée de Luciano D’Onofrio au Standard. Delmenico en est l’unique directeur depuis 2002. Le capital de cette société de consultance, soit 1.000 livres sterling, est réparti en une seule action au porteur détenue par D’Onofrio. Pourtant, dans les comptes 2007 que Le Soir s’est procurés, Delmenico déclare être «incapable d’identifier le bénéficiaire ultime de la société».
Lors de perquisitions, les limiers liégeois ont découvert des fausses factures émises par Corporate Press lors de plusieurs transferts, dont celui de Sergio Conceiçao, à l’été 2003, de l’Inter de Milan à la Lazio de Rome.


4 Barnross Developments Limited
Domicile: Dublin, Irlande
Création: 3 décembre 1992
Statut: dissoute (2001)


Créée par une fiduciaire de Guernesey, Barnross Developments aurait surfacturé des services de consultance, jugés bidon par les limiers liégeois, pour ensuite reverser ces sommes comme compléments de salaires à des joueurs fraîchement transférés.
Selon les derniers comptes que Le Soir s’est procurés, le chiffre d’affaires de Barnross atteignait 4.407.842 francs suisses en 1999, soit plus de 110 millions de francs belges à l’époque (2,7 millions d’euros). Fait significatif, l’auditeur qui a validé ces comptes indique dans son rapport qu’il a été «incapable de vérifier le chiffre d'affaires et le montant des ventes car les commissions et les frais étaient fondés sur des accords verbaux».
L’actionnariat de Barnross est encore plus opaque que ses comptes puisqu’il s’agit de deux offshore domiciliées aux Îles Vierges britanniques, l’un des paradis fiscaux les plus secrets de la planète...
Dissoute en 2001, Barnross était domiciliée au 41 Central Chambers à Dame Court, dans le quartier des banques de Dublin. Cette adresse est celle du cabinet Kearney Curran & Co., l’un des principaux «grossistes» irlandais en sociétés offshore, où sont domiciliées des centaines d’autres sociétés boite-aux-lettres.


5 Selancy Corporation
Domicile: Panama City, Panama
Création: 11 janvier 2005
Statut: active


C’est la seule offshore du réseau à avoir été fondée après l’ouverture de l’instruction judiciaire liégeoise, fin avril 2004. Delmenico en est le trésorier, mais c’est Luciano D’Onofrio en personne qui est aux commandes de Selancy, en tant que directeur et président du conseil d’administration, depuis le 30 mars 2005. Selon nos informations, les enquêteurs ignorent le rôle exact joué par cette société dans le réseau offshore de Luciano D’Onofrio. Lors de leur perquisition à la fiduciaire de Delmenico, à Lugano, les limiers liégeois n’ont rien trouvé concernant cette société. Pour l’heure, donc, Selancy reste un gros point d’interrogation...


6&7 Statefare Securities Limited
& Whitecourt Holdings Limited

Domicile: Tortola, Îles Vierges britanniques
Création: inconnue
Statut: inconnu


Domiciliées à Road Town, sur l’île de Tortola dans les Îles Vierges britanniques, Statefare Securities et sa jumelle Whitecourt Holdings détenaient à elles deux les 2.000 actions de l’irlandaise Barnross Developments. Les deux
sociétés holding sont gérées par la même fiduciaire de Guernesey, celle qui a créé Barnross en Irlande.
Aux Îles Vierges, le registre des sociétés n’est pas public. De plus, il ne renseigne ni le nom des administrateurs ni celui des actionnaires. Seule une commission rogatoire permet d’obtenir ces informations, au terme d’une procédure souvent très longue... Selon nos informations, les enquêteurs liégeois n’ont pas envoyé de commission rogatoire à Tortola.


8 Harry Finance & Trade Inc.
Domicile: Panama City, Panama
Création: 12 décembre 1988
Statut: dissoute (2003)


Lorsqu’il revient à Liège en 1998, fortune faite, Luciano D’Onofrio s’installe dans un appartement haut de gamme de 120 mètres carrés, perché au dernier étage du somptueux hôtel de Grady au 13 rue Saint-Pierre. Officiellement, l’appartement est acheté en 1999 par Harry Finance & Trade, une offshore administrée de décembre 1998 jusqu’à sa dissolution, en octobre 2003, par Maurizio Delmenico et deux prêtes-noms panaméens.
Luciano D’Onofrio n’apparaît pas dans les statuts de la société, et l’origine des fonds ayant servi à l’achat de l’appartement reste à ce jour un mystère. Cet achat pourrait bien être la première opération de blanchiment présumé en bord de Meuse.
A l’époque, le voisin direct du nouvel homme fort du Standard n’est autre que l’architecte Charles Vandenhove. En 2000, D’Onofrio le chargera de rénover, à grands frais, le très chic hôtel particulier du 18e siècle qu’il occupe aujourd’hui, rue Bonne Fortune à Liège.


9 Alalunga Anstalt
Domicile: Vaduz, Liechtenstein
Création: 19 juin 1973
Statut: active


Outre l’hôtel particulier habité par Lucien D’Onofrio, Alalunga possède aussi trois immeubles de rapport, à Ans, habités par des proches de l’ex-vice-président du Standard. Delmenico est le gestionnaire d’Alalunga. C’est lui qui a par exemple introduit la demande de permis d’urbanisme pour la restauration du bâtiment rue Bonne Fortune. L’ancien réviseur du Standard, Henri Lafosse, dispose quant à lui du pouvoir de signature pour Alalunga en Belgique. En juin 2008, tous les biens d’Alalunga ont été placés sous saisie conservatoire pénale par le juge d’instruction liégeois Philippe Richard.


10 Kick International Agency B.V.
Domicile: Amsterdam, Pays-Bas
Création: 9 septembre 1996
Statut: active


La société IAM de Vaduz est l’actionnaire unique de Kick International depuis le 28 mai 1998. Soit trois jours après l’assemblée générale extraordinaire des actionnaires du Standard au cours de laquelle le sauvetage du club s’est négocié. Kick International investira près de 3,6 millions d’euros dans la SA Standard de Liège entre avril 1999 et juin 2002. Domiciliée à Amsterdam chez le géant de l’audit KPMG, elle détient 10% des parts de la SA Standard de Liège. Ces parts ont été saisies le 20 juin par la justice liégeoise à titre conservatoire. Soit juste avant les inculpations de D’Onofrio et Delmenico, et la vente à Roland Duchâtelet des parts du club détenues par Magarita Louis-Dreyfus, l’actionnaire principale.


Enquête menée avec le soutien du Fonds pour le journalisme en Communauté française, publiée dans Le Soir du lundi 27 juin 2011 (PDF)


Lire la suite...

samedi 25 juin 2011

[+/-]

Luciano D’Onofrio aurait blanchi des fonds occultes lors du sauvetage du Standard

Photo: DR

L’ancien vice-président du Standard de Liège, Luciano D’Onofrio, a investi près de 3,6 millions d’euros pour sauver le club il y a dix ans. Selon la justice liégeoise, il s’agirait d’argent noir provenant notamment de commissions occultes perçues lors des transferts de Dugarry, Ravanelli et Baia en 1997.

Après plus de sept ans d’enquête, des perquisitions dans les plus grands clubs de la planète, des dizaines d’heures d’auditions de joueurs et dirigeants de clubs, Luciano D’Onofrio a finalement été inculpé, mercredi, pour faux, usage de faux et blanchiment d’argent, par le juge d’instruction liégeois Philippe Richard.

Les enquêteurs ont désormais la conviction que Luciano D’Onofrio a investi de l’argent noir dans la SA Standard de Liège, lors du sauvetage du matricule 16 il y a une dizaine d’années. Ces fonds proviendraient de commissions occultes versées lors de transferts de joueurs dont D’Onofrio était l’agent, ou un intermédiaire, dans les années 90.

Entre 1991 et 2004, l’ex-homme fort du Standard a été l’agent des plus grands joueurs de la planète foot: Zidane, Trézeguet, Desailly, Baia, Deschamps... Les opérations de blanchiment présumées en bord de Meuse ont quant à elles été réalisées entre 1999 et 2002.

En 1998, le Standard est financièrement exsangue. Robert Louis-Dreyfus, homme d’affaires suisse et principal actionnaire de l’Olympique de Marseille, entre au capital du club à la demande de son ami Luciano D’Onofrio. Les deux hommes sauveront le club de la faillite en y injectant pas moins de 35,6 millions d’euros.

Le sauvetage s’est effectué lors de quatre augmentations de capital en avril 1999, janvier 2000, décembre 2000, et juin 2002, selon les informations disponibles aux greffes du tribunal de commerce de Liège. Lors de chaque recapitalisation, 90% des fonds injectés provenaient de Robert Louis-Dreyfus, les 10% restant de Luciano D’Onofrio. Au total, l’ex-vice-président du Standard a injecté près de 3,6 millions d’euros.

Mais à l’époque, il avance masqué. D’Onofrio opère via Kick International Agency BV, une société boite-aux-lettres gérée par le géant de l’audit KPMG à Amsterdam. Le Soir a consulté les données de Kick International enregistrées au registre hollandais des sociétés: le nom de D’Onofrio ne figure nulle part.

Seul son ami Maurizio Delmenico, agent fiduciaire basé à Lugano, apparaît publiquement comme directeur. Delmenico, qui était encore l’an dernier agent de joueurs agréé par la FIFA, a représenté Kick International au conseil d’administration du Standard de 1998 à février 2005.


La société boite-aux-lettres Kick International Agency BV, derrière laquelle Luciano D'Onofrio s'est abrité pour investir 3,6 millions d'euros dans le Standard de Liège il y a dix ans, est domiciliée dans cet immeuble du géant de l'audit KPMG, dans la banlieue d’Amsterdam. Photo (c) Google
Le registre hollandais indique par ailleurs que Kick International est une filiale à 100% de International Agency for Marketing Ltd. (IAM), une sulfureuse société offshore du Liechtenstein dont la justice française a percé le voile d’opacité et mis à jour le bénéficiaire économique: Luciano D’Onofrio.

Fin des années 1980, cette coquille enregistrée à Vaduz apparaît dans l’affaire de la caisse noire du Sporting Club de Toulon. Dans son réquisitoire, en 1995, le procureur général de la cour d’appel d’Aix-en-Provence qualifiera Luciano D’Onofrio de «spécialiste de fourniture en fausses factures» émises par IAM.

A l’époque, D’Onofrio fournit ces faux en écriture à Rolland Courbis, alors entraîneur de Toulon, «pour détourner des fonds» du club et rémunérer des joueurs au noir. Au passage, l’intermédiaire D’Onofrio prend sa commission. «De plus, selon le procureur, il avait été mis en examen dans l’affaire des Girondins de Bordeaux pour des faits similaires.»

Dans l’affaire du SC Toulon, D’Onofrio sera condamné en novembre 1995 par le tribunal correctionnel de Marseille à un an de prison avec sursis et 50.000 francs (7.622 euros) d’amende pour faux, usage de faux et abus de confiance.

A Bordeaux, il écopera d’une amende de 300.000 francs (46.000 euros) pour abus de confiance et recel liés à son rôle d’intermédiaire dans les comptes occultes des Girondins. Il bénéficiera par la suite d’une grâce présidentielle.

Luciano D’Onofrio et sa société IAM apparaissent également dans le scandale des transferts frauduleux à l’Olympique de Marseille, fin des années 1990. En particulier dans les transactions liées aux transferts, en 1997, de l’attaquant français du FC Barcelone, Christophe Dugarry, et du centre-avant italien de Middlesborough, Fabrizio Ravanelli.

En novembre 2007, D’Onofrio sera condamné par la cour d’appel d’Aix-en-Provence à deux ans de prison dont 6 mois fermes (18 mois avec sursis), 200.000 euros d’amende, et 2 ans d’interdiction d’activité liée au football sur le territoire français. Un jugement confirmé en cassation.

Selon ce jugement, que Le Soir s’est procuré, les transferts de Dugarry et Ravanelli ont donné lieu à une «majoration frauduleuse» de leur montant destinée à être reversée aux joueurs, dans le but de minorer les salaires à leur payer. Ces majorations se sont traduites par des commissions respectives de 3,6 et 5,3 millions de francs (549.000 et 808.000 euros) à la société IAM «dont le montant devait faire l’objet de rétrocessions occultes».

Fin 2003, soit après la recapitalisation du Standard, les enquêteurs liégeois commencent à soupçonner Luciano D’Onofrio d’avoir blanchi ces commissions occultes en les injectant dans le club liégeois. Le juge d’instruction financier Philippe Richard est saisi de l’affaire le 24 avril 2004.

Les limiers de la cité ardente creusent le sillon français. Et après Sclessin, perquisitionnent dans les plus grands clubs: Barcelone, Madrid, Porto, Lisbonne, Hambourg... Ils recherchent d’autres transferts suspects dans lesquels Luciano D’Onofrio est intervenu comme intermédiaire.

Ils en trouveront au moins deux: celui du gardien portugais du FC Porto, Vitor Baia, transféré du FC Porto au FC Barcelone en 1996, et celui de Sergio Conceiçao, transféré de l’Inter de Milan à la Lazio de Rome à l'été 2003.

Dans ce dernier cas, des commissions occultes auraient transité par Corporate Press Limited, une coquille britannique créée en juillet 2002, à Londres, à quelques encablures de la City. Cette offshore vient tout juste d’être dissoute et sera définitivement rayée du registre britannique ce mardi.

David Leloup


Enquête menée avec le soutien du Fonds pour le journalisme en Communauté française, publiée dans Le Soir du samedi 25 juin 2011 (PDF)


Lire la suite...

lundi 30 mai 2011

[+/-]

La double casquette du procureur général de Genève

Le quartier des affaires de Panama City. Photo: Martin Garrido - Creative Commons

Le patron du pouvoir judiciaire genevois, Daniel Zappelli, apparaît comme administrateur de deux sociétés offshore panaméennes encore actives. Il vient d’entreprendre des démarches pour liquider cet héritage encombrant de ses années d’avocat.

Peut-on être à la fois gestionnaire d’entités opaques dans les paradis fiscaux et magistrat chargé de traquer la fraude et le blanchiment? Neuf ans après son élection au poste de procureur général du canton, Daniel Zappelli apparaît toujours au registre des sociétés panaméen comme gérant de deux sociétés ­offshore: Astromar Investments SA, créée en juin 1987, et Zigma Marine Services SA, fondée trois ans plus tard.

D’après les actes notariés que Le Temps s’est procurés, Daniel Zappelli a été nommé administrateur et trésorier d’Astromar en décembre 1993 avec pouvoir de signature individuelle, ce qui signifie qu’il peut engager légalement la société seul. Quant à Zigma, il en est devenu administrateur et secrétaire dès sa création, en juin 1990.

Daniel Zappelli a en outre administré deux autres offshore, Gems Distribution International SA et Precious Stones International SA, également avec pouvoir de signature individuelle, de mars 1993 à leur dissolution en 1995 et 1996. Lorsqu’il a pris ces fonctions, Daniel Zappelli était jeune avocat collaborateur au sein de l’étude de Me Enrico Monfrini, qui administre également ces offshore depuis Genève.

Créées devant notaire par le cabinet d’avocats panaméen Mossack Fonseca, sorte de grossiste spécialisé dans la vente en masse de structures offshore, les quatre sociétés sont dotées d’un capital de 10.000 dollars réparti en 100 actions au porteur. Leur objet social est tellement large qu’elles peuvent exercer à peu près n’importe quelle activité. Elles peuvent aussi «agir en tant qu’initiateur ou bénéficiaire de trusts en République de Panama ou à l’étranger», et donc potentiellement servir de véhicules opaques dans des montages visant à masquer l’identité de leurs ayants droit économiques.

D’autant qu’à ce jour, le Panama n’a toujours pas quitté la liste grise de l’OCDE des paradis fiscaux non coopératifs, ni la liste noire établie par la France. Son «score d’opacité financière», un indice calculé en 2009 par le Tax Justice Network sur la base de douze critères objectifs, atteint 92%.

Ironie de la situation, Me Monfrini se bat aujourd’hui pour restituer au peuple haïtien les millions d’une fondation liechtensteinoise créée par une offshore panaméenne similaire, elle-même contrôlée par des prête-noms vraisemblablement aux ordres du clan de l’ex-dictateur haïtien Jean-Claude «Baby Doc» Duvalier. Seule certitude: les actionnaires de cette panaméenne n’ont jamais été identifiés.

Sollicité à de multiples reprises, Daniel Zappelli n’a pas souhaité répondre directement à nos questions. Selon son porte-parole Christophe Tournier, le procureur général a été «extrêmement surpris» d’apprendre que son nom figure toujours parmi les administrateurs d’Astromar et Zigma, alors qu’«il n’aurait plus dû l’être depuis le 31 mai 1996, date de son départ de l’étude de Me Monfrini et de son entrée dans la magistrature».

Quant à Me Monfrini, il indique que c’est lui, à l’époque, qui a demandé à son employé d’alors de siéger au conseil d’administration de ces offshore. Et il précise que Daniel Zappelli n’était «ni actionnaire, ni propriétaire économique de ces sociétés, et n’a pas reçu de rémunération quelconque pour ces mandats, hors son salaire de collaborateur».

Me Monfrini ajoute que son étude a été «dessaisie» du dossier Astromar le 27 février 1996. Il ne fournit aucune date concernant le dessaisissement de Zigma. «Mes dossiers concernant ces sociétés ont été détruits 10 ans après la fin de mon mandat», justifie l’avocat.

Concernant le fait que le registre des sociétés panaméen annonce Astromar et Zigma en vie, Me Monfrini avance l’explication suivante: «Le représentant local à Panama, Mossack Fonseca, m’avait assuré que ces sociétés avaient été radiées avant le départ de M. Zappelli de mon cabinet et que les frais relatifs à ces off­shore n’avaient plus été payés, ce qui conduisait à leur radiation automatique. Cette information m’a encore été confirmée il y a quelques jours, de sorte que la source de l’erreur est manifestement imputable à Mossack Fonseca.»

Dans ce cas, qui a payé les frais annuels de ces deux coquilles pour les maintenir en vie – soit quelque 300 dollars de taxe gouvernementale et 250 dollars d’honoraires pour l’agent résident? Car effectivement, le non-paiement de la taxe signe l’arrêt de mort d’une offshore panaméenne: «En général, les sociétés sont radiées dans les deux ans», précise le cabinet d’avocats britannique SCF Group.

Autre question: pour quel type de clients Daniel Zappelli a-t-il été «prête-nom» au sein de ces quatre offshore? Et quel était l’objet de ces sociétés? Me Monfrini se retranche derrière le secret professionnel auquel il est astreint, et rappelle que le procureur général, en tant qu’ancien avocat, y est également soumis «même après avoir quitté le barreau».

L’existence de ces sociétés est susceptible de mettre Daniel Zappelli dans une position délicate, en particulier dans l’affaire Abacha, où il représente le Ministère public et Enrico Monfrini la partie civile.

L’avocat reconnaît qu’il est administrateur d’environ 80 sociétés, fondations et trusts, et rappelle qu’il s’agit d’activités parfaitement légales et contrôlées en Suisse. «Les offshore que j’administre ne sont pas toutes des sociétés qui ont pour but d’échapper au fisc des pays dont mes clients sont ressortissants. Mais certaines le sont», concède-t-il. «Je trouve inadmissible, comme certains de mes clients, que le fisc “tonde le mouton” pour plus de la moitié de ses revenus.»

Au nom du secret professionnel, Me Monfrini refuse d’indiquer si Astromar, Zigma, Gems Distribution et Precious Stones avaient pour vocation de flouer des autorités fiscales étrangères. Il précise juste qu’à la demande de Daniel Zappelli, il vient d’entreprendre des démarches pour liquider Astromar et Zigma.

D’après la loi sur l’organisation judiciaire, les magistrats ne peuvent en aucun cas exercer une autre activité lucrative ou «susceptible de nuire à leur indépendance, à la dignité de leur fonction ou à l’accomplissement de leur charge».

David Leloup


Version longue d’une enquête publiée dans le quotidien suisse Le Temps du lundi 30 mai 2011 (PDF)



Lire la suite...

vendredi 29 avril 2011

[+/-]

Prix de la presse Dexia 2010


Info service. Mon enquête en deux volets intitulée «Vaccin anti-H1N1: les dessous d’un contrat controversé» publiée en mai et novembre 2010 dans Le Soir et Politique, revue de débats a reçu hier soir le Prix de la presse Dexia 2010 dans la catégorie presse écrite. Ces prix, décernés chaque année depuis 1963 par des jurys composés de professionnels des médias, de personnalités académiques et de représentants du groupe franco-belge, ont également récompensé – et c’est une première – le webdocumentaire «Le bonheur brut» d’Arnaud Grégoire (publié sur un blog du Soir et soutenu par le Fonds pour le journalisme), le reportage télé «Les urgentistes de la justice» d’Adel Lassouli (RTL-TVI) et le reportage radiophonique «Kigali 2020» de Frédéric Moray (Bel-RTL, soutenu par la fondation Roi Baudouin, à écouter ici: 1, 2, 3).
En juillet 2009, dans l’urgence, sans appel d’offres public, l’Etat belge signait avec GlaxoSmithKline (GSK) un contrat exclusif de 110 millions d’euros pour l’achat de 12,6 millions de doses de vaccin contre la grippe A/H1N1. Le premier volet de l’enquête (Le Soir) dévoile et analyse les huit points controversés de ce contrat secret, qui dégage notamment le fabricant de toute responsabilité en cas de décès ou d’effets secondaires graves liés à son vaccin expérimental. Le second volet (Politique) montre l’absence de transparence sur les intérêts des experts qui orientent les décisions politiques en matière de santé publique, et révèle qu’un tiers au moins des experts académiques qui ont recommandé le vaccin de GSK au gouvernement présentaient un conflit d’intérêts selon la définition même du Conseil supérieur de la santé.

Photo: (c) Belga, dans Le Soir

Lire la suite...

dimanche 16 janvier 2011

[+/-]

L’ex-banquier Rudolf Elmer, source de WikiLeaks, jugé en Suisse mercredi


Facebook Twitter

L’ex-banquier Rudolf Elmer remettra au fondateur de WikiLeaks Julian Assange, lors d’une conférence de presse ce lundi à Londres, deux CD bourrés de données bancaires confidentielles contenant 2.000 noms d’individus suspectés de frauder le fisc via des structures offshore.

Elmer, 55 ans, ex-directeur de la filiale de la banque suisse Julius Bär aux îles Caïmans, est au centre d’un documentaire sur lequel je travaille depuis plusieurs mois. Il sera jugé mercredi à Zurich pour violation du secret bancaire suisse, faux et usage de faux, et menaces envers deux cadres de la banque.

C’est la première fois qu’une source de WikiLeaks passera devant un juge pour avoir «fuité» des informations bancaires confidentielles, d’abord à la presse suisse en 2005 – sans grand succès –, ensuite sur WikiLeaks en 2008 – ce qui a valu au jeune site son tout premier procès aux Etats-Unis et le blocage de son nom de domaine une semaine durant.

Suite aux premières fuites d’Elmer, plusieurs enquêtes fiscales ont été ouvertes, notamment aux Etats-Unis, en Allemagne, en Belgique et au Royaume-Uni. A Bruxelles, le fisc s’est intéressé de très près au financier belge Philippe Stoclet (l’un des héritiers du Palais Stoclet, patrimoine mondial de l’UNESCO) qui avait dissimulé dix millions de dollars dans un trust administré par la Julius Bär à Grand Cayman.

Motivé au départ par un esprit de revanche dû à un licenciement fin 2002 qu’il juge abusif, Elmer est par la suite devenu un authentique «lanceur d’alertes» (whistleblower) en dénonçant des faits de fraude fiscale réalisés ou facilités par ses employeurs ultérieurs: le Noble Group, un gestionnaire de fonds basé à Hong Kong, et la banque sud-africaine Standard Bank pour laquelle Elmer a travaillé notamment à l’île Maurice, l'île de Man, Jersey et Guernesey.

Lire la suite...

jeudi 13 janvier 2011

[+/-]

Eric de Sérigny jette l’éponge

Dans un long droit de réponse adressé ce 12 janvier à Rue89, le financier français Eric Le Moyne de Sérigny, ex-conseiller du ministre du Budget Eric Woerth, annonce qu’il abandonne ses poursuites pénales pour diffamation engagées contre Rue89 et moi-même devant le tribunal correctionnel de Paris le 20 octobre 2010. Il avait initié cette action suite à la publication d’une de mes enquêtes sur les sociétés offshore panaméennes qu’il administrait fin des années 1980 en tant que prête-nom pour le compte de très riches clients de la Chase Manhattan Bank, susceptibles de pratiquer l’évasion fiscale via un trust.

Pour avoir publié ces informations qui se fondent notamment sur des actes notariés publiquement accessibles auprès du registre des sociétés panaméen, Rue89 et moi-même nous sommes vus réclamer par Eric Le Moyne de Sérigny, 64 ans, la somme record de 5 millions d’euros pour le «préjudice professionnel» qu’il estime avoir subi. Dans les annales judiciaires françaises, jamais un tel montant n’avait été demandé par quelqu’un s’estimant diffamé dans une affaire de presse.

Face à l’offre de preuves de plus de 400 pages que nous avons produite devant le tribunal, Eric Le Moyne de Sérigny s’est visiblement rendu compte qu’il n’avait aucune chance de nous faire condamner et d’obtenir le moindre euro de dédommagement. Il a donc jeté l’éponge.

Rue89 et moi-même maintenons bien évidemment l’intégralité de nos informations, quoi qu’en dise Eric Le Moyne de Sérigny dans son droit de réponse, auquel nous n’avons d’ailleurs pas manqué de réagir.

David Leloup

Lire la suite...