«Nous n’avons pas besoin de défraiement pour être des assesseurs. Pas besoin d’indemnités pour vivre en démocratie!» Tel est en substance le cri du cœur d’un collectif de citoyens, indépendant du monde politique ou associatif, qui souhaite profiter des prochaines élections pour donner un coup de pouce à la démocratie.
Concrètement, si vous avez été désigné(e) comme assesseur pour le scrutin fédéral du 10 juin, le collectif «10-6» vous propose de reverser à Amnesty International les indemnités que vous recevrez des pouvoirs publics (entre 15 et 105 euros) pour vous remercier d’avoir accompli votre devoir citoyen.
Si tous les assesseurs et présidents de bureaux de vote reversaient leur indemnité, plus de 1,75 million d’euros seraient récoltés (voir tableau ci-dessous).
Cette action caritative originale avait déjà été menée lors du scrutin communal d’octobre 2006. Elle avait alors rapporté près de 1.750 euros, soit un millième de la somme potentielle. Ce qui signifie qu’une centaine d’assesseurs avaient joué le jeu. Le buzz aidant, et sachant que 100.000 assesseurs ont été désignés pour l’élection du 10 juin, cette deuxième édition pourrait rapporter bien plus encore.
Les assesseurs séduits par l’idée peuvent d’ores et déjà s’inscrire sur le site de l’action. Bien sûr, n’importe qui, assesseur ou non, peut soutenir cette initiative dont la logique est résumée sur une page A4 couleur en PDF, page que le collectif «10-6» vous propose de diffuser sur votre lieu de travail. Tout don de 30 euros ou plus donne droit à une attestation fiscale délivrée par Amnesty.Cliquer sur le tableau pour l'agrandir. Il combine les infos suivantes:
1/ nombre de bureaux et de membres par bureau.
2/ valeur des jetons de présence selon la fonction.
(source: collectif «10-6»)
mercredi 30 mai 2007
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Un défraiement, ça va pas non!? |
vendredi 25 mai 2007
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Soirée «portes ouvertes» au centre fermé de Vottem |
Petit clin d’oeil électoral épinglé par l’ami Pierre Ozer, alors que l'émission Reporters de RTL-TVi diffusera ce soir, à 19h50, les premières images filmées depuis huit ans au cœur de la «prison» de Vottem (des guillemets sont-ils nécessaires?) qui «accueille», sur les hauteurs liégeoises, des demandeurs d’asile. C’est le journaliste Daniel Nokin (qui a commis, en novembre dernier, un reportage «strip-teasien» sur Michel Daerden) qui a réussi le tour de force d’obtenir une autorisation de tournage. Rappelons que le centre fermé de Vottem a fait couler beaucoup d’encre ces derniers mois: dénonciations d’atteintes aux droits de l'homme, utilisation abusive de neuroleptiques pour «calmer» certains résidents, etc. Il y a deux jours encore, l’association Médecins sans frontières rappelait le «coût humain» exorbitant de ces centres fermés, où l’enfermement fait des ravages sur la santé mentale des demandeurs d’asile. Signalons, à toutes fins utiles, que l’ONG britannique Christian Aid estime à un milliard le nombre de réfugiés climatiques sur la planète en 2050...
lundi 14 mai 2007
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Ultra Di Rupo |
C’est tout l’art subtil du caméléon politique: lorsqu’il harangue la galaxie «alter», le président du PS Elio Di Rupo troque son légendaire nœud pap’ écarlate pour une tenue jean-baskets-gilet vintage. L’image est rare. Les caméras de télévision n’ont pas l’habitude d’aller se balader dans les débats qui animent les forums sociaux altermondialistes. Dans la vidéo ci-dessus – longue bande d’annonce du documentaire Avanti Popolo! signé Yannick Bovy (journaliste) et Mathieu Sonck (réalisateur) –, on assiste également à quelques fragments d’un échange franc et direct que l’on n’a plus guère l’occasion de voir aujourd’hui à la télévision. Non pas que les protagonistes témoigneraient d’une verve exceptionnellement haute en couleurs – quoique. Mais surtout parce que le débat porte sur les orientations mêmes de la gauche contemporaine, et sur son adhésion au «système capitaliste». Un questionnement qui taraude les deux réalisateurs tout au long des 45 minutes de ce documentaire, qui tombe à point pour relancer le débat politique à gauche en ces temps de défaite électorale française et de campagne législative mollassonne en Belgique.
La scène se passe à Paris, en novembre 2003, lors du Forum social européen. «Elio Di Rupo est-il schizophrène?», s’interroge le syndicaliste italien Piero Bernocchi, franchement remonté contre le fossé qui, à ses yeux, sépare trop souvent le discours et les actes politiques de la gauche européenne (sur la guerre en Irak, la mondialisation, etc.). Une gauche dont notre Elio national porte ici tout le poids sur ses petites épaules... Et dont il est pourtant généralement reconnu comme étant l’un des représentants sociaux-démocrates les plus... à gauche. Mais Bernocchi est très en verve: même la communiste Marie-Georges Buffet passera sous les fourches caudines du bouillonnant transalpin.
Evitant l’écueil de la dénonciation simpliste du discours relativement light d’Elio Di Rupo (qui se fait huer autant qu’applaudir à la fin de son speech), le film a l’intelligence de replacer ses propos en perspective historique et idéologique (les deux étant bien sûr liés). Ainsi Serge Halimi, docteur en sciences politiques, spécialiste de l’histoire de la gauche européenne et journaliste au Monde Diplomatique, souligne-t-il que la défense du capitalisme est devenue pratiquement impossible aujourd’hui pour la gauche de gouvernement. Et a fortiori devant une assemblée «altermondialiste». «D’où cette distance sémantique à l’égard d’un système qu’ils n’ont pourtant pas du tout l’intention de contester et dont ils indiquent très peu, voire pas du tout, comment ils rompraient avec son iniquité».
Au-delà d’une indignation de façade, poursuit Halimi, «ce qui serait intéressant, ce serait une liste de propositions concrètes, précises, qui permettraient de rompre avec une logique dont ils ont été eux-mêmes les artisans. (...) On se demande par exemple pourquoi des forces de gauche n’ont jamais proposé de renationaliser des entreprises ou des services qui avaient été privatisés.»
Pour clore la séquence, le sociologue des médias Alain Accardo, auteur notamment du séminal Journalistes précaires (qui vient tout juste d’être réédité), en remet une fameuse couche: «La gauche européenne est malade de la social-démocratie, tranche-t-il sans concession. Ces partis socialistes qui, officiellement et depuis longtemps, se sont installés à l’intérieur du système capitaliste pour le cogérer, constituent à mon sens aujourd’hui un des principaux obstacles à l’émancipation des peuples européens et plus largement des peuples de la planète.» Excessif? Froidement lucide? D’un autre âge? Ou d’une brûlante actualité? Chacun appréciera selon sa culture et sa sensibilité politiques...
UPDATE 16/05 :
Vu le buzz qui entoure cet extrait vidéo, les deux réalisateurs ont posté un message sur le blog d’Elio Di Rupo ce mercredi pour clarifier leur position. En effet, expliquent-ils, le film «est parfois récupéré par des gens avec lesquels on n’est pas vraiment (ou vraiment pas) d’accord – des gens qui parlent d’hostilité à votre égard par exemple, ou qui prennent appui sur ce film qui veut simplement donner à penser pour décréter ce qu’il faut penser». Les deux de Zogma précisent en outre qu’Avanti popolo!, «un tantinet provocateur, n’est pas une charge ad hominem ou anti-PS» et qu’il faut voir ce film «non pas comme un catalogue de certitudes trempées, mais comme une bouteille à la mer, une invitation au débat citoyen, populaire (...)».
UPDATE 18/05 :
Tous ces remous ont inspiré à Elio Di Rupo un billet sur son blog. Il invite notamment les deux réalisateurs du documentaire Avanti popolo! à «continuer ensemble le débat».
Est-ce une réponse déguisée aux analyses développées par les experts qui dissèquent son discours dans le film? Toujours est-il que le président du PS souligne que «la clairvoyance des analyses et la justesse du discours ne suffisent pas à faire changer les choses. Encore faut-il pouvoir traduire la théorie et la bonne volonté en action politique. Avoir totalement raison, si l’on est seul à le savoir, ne sert à rien, si ce n’est à flatter son ego et à se donner bonne conscience.»
Qu’en pensez-vous?Le DVD du documentaire (dans lequel on peut voir également Vincent Decroly, François Houtart, Pascal Lamy ou Anne-Marie Lizin) est en vente au prix de 15 euros sur le site Zogma.org.
jeudi 10 mai 2007
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Candide au pays de l’atome |
Sous des airs de simplet de service, Antoine Citoyen interroge avec humour et pertinence nos sociétés hautement nucléarisées. Attention: ses tribulations atomiques, diffusées sur Internet, pourraient bien vous contaminer...
Alain de Halleux, bientôt 50 ans, 4 enfants, est inquiet. La question de la sécurité nucléaire a fait irruption dans sa vie l’an passé. Lors de la commémoration des 20 ans de Tchernobyl, d’abord. Puis en juillet dernier, quand le cœur d’un des réacteurs de la centrale de Forsmark, en Suède, est passé à 7 minutes de la fusion. Dans une indifférence médiatique quasi générale. Ebranlé par ces événements, ce licencié en chimie de l’UCL, vite devenu réalisateur, crée alors Antoine Citoyen, un personnage de fiction qu’il propulse au cœur de la réalité nucléaire belge. Pour mieux la cerner. Et informer. Car une question obsède Alain de Halleux et son double fictionnel, efficacement joué par son excellent complice Michel Angely: sommes-nous prêts en cas d’accident nucléaire à Tihange ou à Doel?
Antoine entame alors un authentique périple de «journaliste citoyen» pour tenter de le savoir et poser, comme un enfant, bien d’autres (im)pertinentes questions sur l’atome. Les pharmacies belges ont-elles assez d’iodure de potassium pour protéger du cancer de la thyroïde les populations survolées par un éventuel nuage radioactif? Est-il possible d’assurer sa maison contre un accident nucléaire? Les politiques connaissent-ils les conditions de travail déplorables des ouvriers chargés de la maintenance des centrales? Et en cas d’accident nucléaire, qui ira «reboucher le trou»? Etcaetera.
«A Tchernobyl, de 600.000 à 800.000 personnes ont été enrôlées de force par le pouvoir de l’ex-Union soviétique pour faire le ménage autour du réacteur», rappelle Alain de Halleux. «Mais dans une démocratie libérale comme la nôtre, qui accepterait de courir ce risque?», s’interroge Antoine en écho. Bref, où se cachent les pro-nucléaires qui ont le courage d’être liquidateurs volontaires? Alain et Antoine les traquent dans la rue, dans les parcs publics, à la mer... Sans grand succès. Au cours de ses pérégrinations, Antoine croisera également des pompiers en colère, un sénateur médusé, un commissaire européen qui ne l’est pas moins, l’ex-patron de Suez en goguette chez Ecolo, des environnementalistes, un syndicaliste... Loin de l’apaiser, leurs paroles aiguiseront ses craintes.
Résultat: une première «saison» de 20 épisodes de 3 à 8 minutes diffusés gratuitement et au compte-gouttes sur Internet depuis janvier (sur AntoineCitoyen.eu et Google Video). «Je n’ai pas l’espoir que le travail d’Antoine change quoi que ce soit, mais le fait de bosser avec lui m’autorise à regarder mes enfants droit dans les yeux le matin», explique Alain de Halleux, qui regrette l’absence d’un vrai débat de société sur le nucléaire. Parallèlement à cette «thérapie fictionnelle» réalisée - pour l’instant - sur fonds propres, le réalisateur prépare un documentaire d’investigation sur les sous-traitants du nucléaire en France, Belgique, Angleterre, Suède...
Cet article fait partie d’un dossier de 8 pages sur le nucléaire disponible dans le numéro de mai-juin du magazine belge Imagine. S’il vous a plu, merci de bien vouloir envisager d’acheter le magazine en version papier ou électronique (PDF), voire de vous y abonner.
vendredi 4 mai 2007
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Le scandale écologique des «sauts de puce» flamands pour businessmen friqués |
Coup de tonnerre dans le ciel aérien belge! Le 25 avril, lors de la réunion du Comité de concertation regroupant les différentes entités fédérées belges, la Région flamande a opposé son veto à un projet d’arrêté royal visant à interdire les vols d’avion intérieurs de moins de 150 km. Et ce dans une indifférence quasi générale.
Proposé par le ministre fédéral de la mobilité Renaat Landuyt (SP.A), ce projet d’arrêté royal s’attaquait à ces fameux «sauts de puce» qui avaient défrayé la chronique en octobre dernier. Deux scientifiques avaient alors révélé, dans une tribune publiée par La Libre Belgique, que la compagnie marocaine Jet4You envisageait des vols Charleroi-Liège avant de redécoller pour Casablanca... Des vols ultra-courts (84 km !) qui auraient dégagé 33 tonnes de CO2 dans l’atmosphère par semaine, soit l’équivalent de ce qu’émet en moyenne une voiture qui parcourt plus de cinq fois le tour du monde, ou du CO2 émis hebdomadairement par 60 ménages belges.
A l’heure de la médiatisation massive des «bonnes paroles» d’Al Gore, de Nicolas Hulot et du GIEC, le politique se devait de réagir. Ce que fit assez vite le ministre régional wallon des transports, André Antoine (CDH), en interdisant purement et simplement ces vols 24 heures avant qu’ils ne démarrent. Pour généraliser au niveau fédéral ce (trop rare) bon sens écologique, Renaat Landuyt emboîta rapidement le pas de son homologue régional en pondant le projet d’arrêté royal qui vient d’être jeté aux oubliettes par des élus flamands schizophrènes.
400 vols-taxis annuels pour businessmen
Dans une tribune parue ce jour dans La Libre Belgique, un des deux scientifiques qui avaient découvert le «pot-aux-roses marocain» dévoile cette fois les raisons du veto de la Région flamande. Celle-ci souhaite tout simplement que puissent continuer les quelque 400 «sauts de puce» annuels qui ont lieu depuis des années, en toute discrétion, dans le ciel aérien du nord du pays.
Ces vols, d’un point de vue environnemental, sont pires encore que les vols à moitié pleins de touristes carolos que Jet4You entendait effectuer entre Charleroi et Liège. Les «sauts de puce» jalousement défendus par les politiciens flamands sont en effet essentiellement des «vols-taxis» destinés à une toute petite minorité d’hommes d’affaires fortunés qui voyagent généralement... tout seuls. Environ 90% de ces vols décollent d’Anvers et 10% d’Ostende. Une toute petite niche économique à laquelle la Flandre ne veut pas toucher. Et dont le bilan «CO2 émis par personne transportée» est bien évidemment plus anti-écologique encore que l’aberration environnementale un temps envisagée par Jet4You.
Suite à ce veto flamand, le cabinet Antoine a dénoncé, dans un communiqué de presse du 25 avril, «le mutisme du Premier ministre Guy Verhofstadt qui a pourtant suggéré la création d’un ministère du Climat au niveau fédéral, ainsi que l’absentéisme du Vice-premier ministre et président du MR Didier Reynders, qui a fait de la planète bleue un de ses thèmes de campagne». L’Echo est le seul et unique quotidien à avoir mentionné cette détonnante nouvelle, via un entrefilet de 155 mots publié dans son édition du 26 avril. Le Vif/L’Express qui sort aujourd’hui publie également une brève de 133 mots sur le sujet.
Triste combat d’arrière-garde
Rappelons encore que Jet4You a introduit, fin mars, une action au tribunal de première instance de Namur pour tenter d’obtenir réparation des conséquences de l’interdiction promulguée par André Antoine fin octobre dernier. Une interdiction, précisons-le, qui n’est pas remise en cause par la décision du comité de concertation intervenue la semaine dernière, mais qui pourrait être cassée prochainement à Namur. Et ce alors même que la Commission européenne a émis le souhait, fin mars, de donner la possibilité à un Etat membre de restreindre les services aériens dont le coût environnemental est bien plus élevé que le bénéfice – notamment social – que ces services procurent.
La Commission a même cité explicitement le cas de la Région wallonne «qui souhaite légitimement interdire les sauts de puce (Charleroi-Liège)». Une proposition qui a par ailleurs reçu «un accueil globalement positif d’une majorité de délégations» et qui pourrait donc prochainement se généraliser dans les 27 Etats membres de l’Union... Si c’était le cas, le combat d’arrière-garde de la Flandre pour sauver quelques emplois d’un autre âge apparaîtrait cruellement pour ce qu’il est: une gifle irresponsable lancée à la face des générations futures.
lundi 30 avril 2007
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La pub peut nuire gravement à l’environnement |
Ces messages publicitaires qui, à l’instar d’une certaine industrie rétrograde, naviguent volontairement à contre-courant de la lutte contre le réchauffement climatique vous horripilent? Ces pubs qui tentent de vous vendre des vessies polluantes pour des lanternes écologiques vous exaspèrent? Soulagez-vous donc en participant à une expérience de journalisme citoyen et collaboratif lancée par le magazine belge Imagine.
A vos scanners, appareils photo numériques ou paires de ciseaux! Envoyez-moi ces pubs qui vous choquent, vous excèdent, vous pompent l’air (celui qui n’est pas encore pollué par l’ozone, les microparticules diesel, les produits chimiques et le CO2...). Les plus tristement cyniques, consternantes et inciviques seront publiées dans le numéro estival d’Imagine, assorties d’un commentaire décortiquant les ressorts des messages mitonnés par les «créatifs» responsables de ces outrages aux générations futures. Sauf contre-ordre, les noms des bienveillants lecteurs et lectrices qui me les auront envoyées seront également publiés.
Pétition et Pacte «Hulot» à la sauce belge
Une pétition lancée il y a peu par une volée d’associations environnementales belges (Respire, Inter-environnement Wallonie, Amis de la Terre, etc.) demande déjà l’interdiction de la publicité pour les transports polluants, une mesure jugée «nécessaire pour une société soutenable».
Le Pacte écologique belge (que j’invite tout lecteur noir-jaune-rouge à lire et à signer) va un cran plus loin. Sur ce point, il propose ni plus ni moins d’interdire la publicité «pour les voitures, les systèmes de climatisation, ou encore les vols en avion (...) au nom de la protection de notre environnement, mais aussi par saine logique budgétaire». En effet, soulignent les initiateurs du Pacte, «l’Etat n’est-il pas, in fine, responsable financièrement du respect des limites d’émissions telles que celles fixées par le Protocole de Kyoto?»
Plus personne ne conteste aujourd’hui les limites imposées à la pub pour le tabac. Le temps où des publicités claironnaient dans la presse que «les médecins recommandent de fumer des Camel» est désormais révolu. Les enjeux en matière de santé publique et de budget des soins de santé crèvent les yeux. Mais il a fallu des décennies pour y parvenir, malgré les preuves scientifiques et le méticuleux travail de sape des cigarettiers au cœur même de l’Organisation mondiale de la santé...
L’auto-régulation ne suffit pas
Etant donné que le Jury d’éthique publicitaire (réceptacle belge des plaintes contre des publicités) est une organisation du secteur publicitaire lui-même, sans force d’exécution contraignante, le Pacte écologique belge propose de mettre en place «des mécanismes d’observation (Observatoire de la publicité) et de régulation dans lesquels les pouvoirs publics sont partie prenante, et qui permettraient de cadrer la publicité et ses messages, en particulier lorsqu’ils portent potentiellement atteinte aux valeurs de sobriété en matière de ressources naturelles et de respect de l’environnement».
L’initiative ici proposée, dans la foulée de celles réalisées en 2006 par le Réseau Eco-Consommation et l’Alliance pour la planète en France, est un pas citoyen dans cette direction. A vous de l’emboîter si vous le jugez pertinent...
EN PRATIQUE:
Envoyez vos photos numériques ou vos scans couleur (format JPEG ou PNG, 10x15 cm @300DPI) à: enviropub@imagine-magazine.com. Ou postez vos pubs papier soigneusement découpées et sans plis à: Pub & Environnement, Imagine, rue Pierreuse 23, B-4000 Liège.
Merci de mentionner la source (média, lieu géographique) et la date d’observation. Priorité aux publicités diffusées en Belgique francophone. Date de clôture: 31/05/2007.
vendredi 23 mars 2007
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Censure et fiction en démocratie |
Indicible car trop lourde de conséquences, l’«affaire Clearstream 1» est-elle condamnée à la censure et à la fiction? Alors que L’emmerdeur, le second roman sur l’enquête de Denis Robert, sort début avril, l’écrivain-journaliste annonce sur son blog qu’un papier très documenté sur Clearstream a été censuré cette semaine dans Paris-Match et qu’un second article, toujours sur Clearstream, devait passer en une du Financial Times mais, «suite au lobbying intensif de la banque des banques luxembourgeoise, il a été différé...»
Selon Robert, les deux papiers étaient «prêts à sortir, maquettés, et ont été sacqués in extremis. La peur des procès et l'utilisation malveillante de documents judiciaires tronqués a joué à mort. C’est une belle saloperie.» Furax, l’ex de Libé suggère aux juristes du quotidien anglais et de l’hebdo du groupe Lagardère de jeter un œil «au seul jugement argumenté qui vaille à ce jour» pour qu’ils reconsidèrent leur décision.
Quant au roman d’Elisabeth Butterfly (extraits ici), l’éditeur annonce qu’il «ne pourrait pas sortir sous la forme d’un document. Les procès déferleraient». Et pour lancer son bouquin, la maison d’édition Florent Massot mise sur le buzz de la blogosphère en surfant sur la vague complotiste. «Nous avons besoin de vous pour diffuser ce livre qui sera victime dans un premier temps de la censure de la presse traditionnelle – surtout en période électorale...», écrit l’attachée de presse dans un mail envoyé à plusieurs bloggeurs qui suivent les rebondissements de ce «combat du 21e siècle». On se demande bien pourquoi les médias bouderaient ce livre puisque la forme romanesque a précisément été retenue pour éviter que les procès ne déferlent. Enfin, on verra...
En attendant, malgré un énième procès sur le dos (intenté cette fois par Fortis à Luxembourg), galvanisé par le soutien croissant qui s’organise autour de lui – concert de Miossec, Cali, Groland Soundsystem, etc. le 17 avril à Paris –, Denis Robert annonce qu’il ne lâchera pas le morceau: «Oui, vous êtes nombreux à me dire de prendre du recul et de passer le relais. Et bien non, je ne laisse pas tomber (...) Désolé mais je ne suis ni mort, ni malade, ni encore complètement fauché...»
Qu’on se le dise...
samedi 10 mars 2007
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«Pas trop peur?» |
Alors que je viens à peine de regarder – avec un certain plaisir – Dans la peau de Jacques Chirac, Karl Zéro, qui embrasse une nouvelle carrière avec AOL sur Internet et ne cache plus son opinion sur le sujet journalistiquement tabou que sont les attentats du 11-Septembre, s’apprête à sortir son nouveau film, Ségo et Sarko sont dans un bateau... Voici les quatre bandes d’annonce à la suite, directement publiées sur YouTube par – semble-t-il – le sponsor du film Neuf Cegetel himself qui jouit de l’exclusivité en VOD (video on demand) avant la sortie de l’œuvre en salles/DVD:
lundi 5 mars 2007
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Faux pas publicitaire d’Oxfam? |
Enthousiasme, mais aussi étonnement, déception… La dernière campagne de pub d’Oxfam-Magasins du monde, ONG particulièrement active sur le front du commerce équitable (et qui a récemment débarqué en France), a fait pas mal de bruit ces derniers mois. Y compris, et surtout, chez des sympathisants et des bénévoles. Qui, en substance, ont le sentiment d’avoir été «trahis» dans leur militance.
Raisons du litige? L’affiche «Premier cru», à la gloire du commerce équitable mais aussi de… Baby Thatcher, surnom du très libéral Guy Verhofstadt avant qu’il ne lisse son discours pour convoiter le 16 rue de la Loi. Mais aussi ce poster sur lequel on peut admirer le président du PS Elio Di Rupo plongé «dans le bain du commerce équitable» et vantant les vertus de «l’effet papillon». Le tout à quelques mois des élections...
Renvoi d’ascenseur au PS et au VLD pour les commandes publiques de produits Oxfam passées par certaines administrations, comme l’interprètent certains mécontents? «C’est ridicule, répond Denis Lambert, secrétaire général de l’ONG tiers-mondiste. Nous comptons en revanche exploiter ces engagements pour concrétiser une proposition de loi visant à reconnaître le commerce équitable et ses acteurs historiques. C’est Guy Verhofstadt qui donne une caution au commerce équitable. Pas l’inverse.»
Autre affiche qui en a également ulcéré plus d’un, dont l’antenne bruxelloise de l’association Vie Féminine: celle de cette «Oxfam fatale» allongée nue sur un lit rouge de bouchées au chocolat préemballées. Ou comment une ONG qui se bat pour améliorer la condition de la femme au Sud véhicule au Nord l’éternel cliché pubard de la femme-objet instrumentalisée pour vendre des marchandises. «De toutes les affiches, c’est celle que je défends le moins», concède Denis Lambert, avec le recul...
«Vous placez ceux qui vous appuient dans une situation impossible», s’est plaint Attac-Liège dans un courriel indigné. A Bruxelles, le cinéma Nova a remballé sa dernière commande de produits Oxfam. Des jus de fruit bio de la région remplacent désormais les jus «équitables» de l’ONG. En interne aussi, des dents ont grincé: certains bénévoles ont refusé de placer les affiches dans «leur» magasin, quelques uns ont même remis leur tablier...
A ses détracteurs, le secrétaire général d’Oxfam-Magasins du monde a envoyé un courriel laconique dans lequel il se retranche derrière son conseil d’administration. Lequel estime que ce genre de campagne est «une bonne chose si on n’en n’abuse pas. Il faut évaluer la communication d’Oxfam-Magasins du monde dans son ensemble avec des approches diversifiées». Un «botté en touche» qui en a sidéré plus d’un. «C’est vrai, j’aurais dû soigner la forme, analyse rétrospectivement Denis Lambert. J’ai déconné, là. Mais je persiste et signe: il faut nous juger sur l’ensemble du projet – qui ne bouge pas d’un iota – et considérer cette campagne comme un “coup” parmi d’autres. Si je ne devais défendre que ce coup-là, je ne serais pas très à l’aise. Mais replacé dans l’ensemble de nos actions, j’en suis fier. D’ailleurs, la réaction ultra majoritaire à cette campagne était positive.»
Voilà qui clôt le débat?
mercredi 28 février 2007
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Dans la jungle des labels |
Une foule bigarrée de logos en tout genre «labellisent» aujourd’hui une multitude de produits selon des critères environnementaux, sociaux ou économiques. Résultat, les consommateurs nagent dans la purée de pois. Le point sur les labels, outils complexes dont le flou juridique actuel n’arrange rien...
Le désir de consommer des biens et des services «durables» fait progressivement son chemin dans l’esprit des citoyens consommateurs. Pas surprenant dès lors qu’une foule de labels «écologiques», «bio», «éthiques» ou «équitables» décorent aujourd’hui les emballages d’un nombre croissant de produits.
Mais comment se frayer un chemin sûr dans cette jungle de labels officiels gérés par les pouvoirs publics (la fleur de l’Ecolabel européen, l’épi étoilé de l’agriculture bio…), de labels privés collectifs (Biogarantie, FSC, Max Havelaar…), de marques privées contrôlées par un label (Oxfam Fairtrade par Max Havelaar, Bio de Delhaize par Biogarantie…) ou pas (Made in Dignity, Collibri, Citizen Dream…)? Surtout quand on sait que Max Havelaar, figure de proue du labelling équitable, fait l’objet d’un tir nourri de critiques dans un récent livre-enquête sur le commerce équitable (1) et que l’absence de contrôles indépendants est souvent loin de rimer avec «non fiable»...
Un Belge sur trois y croit
Actuellement il n’existe aucun label durable intégré, même si les choses évoluent. «Aujourd’hui, le bio devient de plus en plus social et l’équitable de plus en plus environnemental, analyse Jean-François Rixen, ancien responsable de la recherche et du partenariat chez Oxfam-Magasins du monde, devenu consultant pour l’ONG tiers-mondiste. Les deux vont progressivement fusionner, et cela se fera sans doute via l’Union européenne d’ici 10 ou 15 ans.»
La création d’un tel label durable intégré est-elle une bonne idée? La question fait débat. «Si le label Max Havelaar et les labels bio sont connus aujourd’hui, c’est parce que ces concepts sont dans les magasins depuis 30 ans. Si l’on créait maintenant un label “bio-équitable”, avec un nouveau logo, il faudrait sans doute à nouveau 20 ans avant qu’il ne devienne significatif», estime Jean-François Rixen.
Catherine Rousseau, directrice des recherches au CRIOC (Centre de recherche et d’information des organisations de consommateurs), reste quant à elle dubitative face au concept même de label. «Dans le secteur alimentaire, les études montrent que seul un Belge sur trois est prêt à faire confiance à ce type d’instrument, explique-t-elle, précisément parce qu’il ne maîtrise pas ce qu’il y a derrière. Le label est un instrument exigeant sur le plan intellectuel: il faut le connaître, s’informer sur sa fiabilité, le débusquer en magasin… Cela exige de la motivation et du temps. De plus, il y en a beaucoup, ce qui tend à décrédibiliser même ceux qui seraient fiables. D’autant que les autorités publiques n’ont toujours pas mis en place un système qui permettrait aux consommateurs de repérer ces “bons” labels.»
Tout n’est pas labellisable
Les labels sont par ailleurs des instruments relativement complexes (lire «Labellisation, mode d’emploi»). Les démarches administratives ne sont pas toujours simples et d’inévitables frais de dossier doivent être pris en charge par les requérants. Peu de gens connaissent l’Ecolabel européen, pourtant créé… en 1992. Et trois ans après son lancement, le Label social belge ne certifie aujourd’hui… que quatre entreprises.
Sur le front de l’équitable, tout produit qui vient du Sud n’est pas nécessairement labellisable, insiste Jean-François Rixen. «Chaque produit certifié par Max Havelaar repose sur des critères différents. Un gros travail de réflexion et de création de critères est donc nécessaire pour chaque nouveau produit. Ce travail n’est réalisé que s’il y a un marché à la clé... Chez Oxfam, c’est plus simple: ses propres critères s’appliquent aux organisations de producteurs du Sud, pas à leurs produits.» Mais Oxfam Fairtrade n’est pas un label. C’est une marque commerciale privée. La grande majorité de ses produits alimentaires sont labellisés par Max Havelaar, mais pas tous. Et aucun produit artisanal de la marque Made in Dignity ne l’est. Tout simplement parce qu’ils ne sont pas labellisables et ne le seront sans doute jamais, car trop nombreux.
D’ailleurs, Jean-François Rixen regrette que le commerce équitable s’oriente de plus en plus, sous la pression des consommateurs, vers le contrôle et l’exigence de garanties. «Si l’on effectuait des contrôles à l’aveugle sur place, on privilégierait in fine ceux qui en ont le moins besoin. Car les plus faciles à contrôler sont les mieux organisés, les plus proches de l’aéroport et des villes. Cela tuerait les petits artisans ruraux qui font de l’artisanat pour obtenir un revenu complémentaire à l’agriculture. Et on louperait notre objectif de développement.» Oxfam mise donc sur le partenariat horizontal plutôt que le contrôle vertical.
Relocaliser l’économie
D’une manière générale, les labels certifient des produits, rarement des filières. Si Oxfam maîtrise assez bien la filière de son coton bio et équitable Made in Dignity, cet exemple reste l’exception qui confirme la règle. Le transport, très souvent, reste le maillon faible de la chaîne. Les piètres conditions sociales des marins battant pavillon de complaisance sont connues. Tout comme la pollution au CO2 engendrée par les avions cargo. Bref, les trois piliers du développement durable – le social, l’économique et l’environnemental – sont très souvent mis en concurrence. Les roses Max Havelaar importées du Kenya par avion et vendues en grandes surfaces où l’on se rend en voiture sont-elles «durables»?
Dans ce contexte, de plus en plus de voix plaident pour une relocalisation de l’économie et l’instauration de filières courtes, intégrées et durables. Dans cette optique, la fédération d’économie sociale SAW-B (Solidarité des alternatives wallonnes et bruxelloises), porte-parole de plus de 300 entreprises du «troisième secteur» (2), met à la disposition des consommateurs son répertoire PREFERENCES. Sur son site Internet SAW-B.be, un moteur de recherche permet de trouver facilement, par secteur d’activité et par province, des entreprises ou associations proposant des produits ou services «socialement responsables».
De même, la filiale «bio» de Colruyt, Bio-Planet, vend pour sa part plusieurs produits biologiques issus de petites entreprises d’économie sociale – pains, quiches, lasagnes, lapin, etc. – dans ses magasins de Courtrai, Dilbeek et Gand. Tous ces produits sont livrables dans les 190 Colruyt du royaume si on les commande par Internet. Si l’enseigne orange et noire n’envisage pas de les labelliser d’une manière ou d’une autre, elle entend bien «communiquer» prochainement sur ce nouveau créneau éthique d’ici novembre. Car les produits aux reflets «durables» ont le vent en poupe…
L’enjeu des marchés publics
Selon le Baromètre des tendances Belgique/Pays-Bas 2006, 42% des Belges affirment acheter un produit «durable» au moins une fois par semaine. «Carrefour, qui avait retiré les détergents ECOVER de ses rayons, les a récemment réintroduits parce que le chiffre d’affaires de cette marque a bondi de 26% en 2005 – la plus forte croissance dans ce segment», souligne Catherine Rousseau. D’après FLO, l’organisation internationale de labellisation du commerce équitable, les ventes mondiales de produits certifiés ont grimpé de 37% en 2005, atteignant 1,1 milliard d’euros. Certes, le café équitable, produit phare du mouvement, ne représente que 0,009 % du chiffre d’affaires mondial du café. Mais c’est sa croissance à deux chiffres – et celle des autres produits «durables» – qui séduit les distributeurs.
A l’automne 2005, Colruyt lançait ainsi sa ligne de produits Collibri, dont 3 à 5% du prix de vente servent à soutenir des projets éducatifs au Sud. Un mois plus tôt, c’était l’importateur de café anversois Efico qui lançait son label de café Sustainable, Fair & Free Trade. Dans les deux cas, Max Havelaar et d’autres ONG sont montés au créneau, accusant ces initiatives de brouiller l’image du commerce équitable dans l’esprit des consommateurs car elles ne respectent pas ses principes de base (3).
Pourquoi ces poids lourds économiques en bout de filière développent-ils leurs propres labels privés? «L’hypothèse la plus crédible réside dans la volonté des entreprises de continuer à accéder aux marchés publics et dans leur opposition idéologique au Fair Trade, estime Pierre Biélande, rédacteur en chef d’Alter Business News. Elles le font alors dans le cadre des pratiques de la responsabilité sociale des entreprises et, si possible, à un moindre prix (4).» De l’équitable «light», en somme, pour décrocher des marchés publics dont le cahier des charges stipule de plus en plus souvent que les produits ou services sollicités doivent être «durables» d’une manière ou d’une autre. Pour le café, l’enjeu est de taille: «Les pouvoirs publics sont les premiers consommateurs de café en Belgique», précise Jean-François Rixen...
Le consommateur seul responsable?
Reste une question de fond, soulevée par le CRIOC: en promouvant les labels, les autorités publiques ne délèguent-elles pas au consommateur toute la responsabilité du choix relatif à ce qui est le meilleur pour l’écologie ou le social? «Les pouvoirs publics devraient au contraire prendre leurs responsabilités, estime Catherine Rousseau. Comment? En renforçant les normes sociales et environnementales des produits mis sur le marché. En baissant la TVA des produits les plus respectueux des critères du développement durable, ou en augmentant celle des produits qui le sont moins. En développant des étiquetages obligatoires sur les caractéristiques écologiques et sociales des produits, à l’instar de l’étiquette énergie des appareils électrodomestiques. Le consommateur pourrait ainsi comparer les performances environnementales ou sociales de deux produits équivalents, ce qui est actuellement impossible.»
Au cabinet d’Els Van Weert, secrétaire d’Etat au Développement durable et à l’Economie sociale, on répond que le gouvernement fédéral montre lui-même l’exemple. «Depuis 2005, les services publics fédéraux sont obligés d’acheter les produits “durables” recensés dans le Guide des achats durables que nous avons rédigé. Etant donné que les pouvoirs publics sont les premiers consommateurs d’un certain nombre de produits, à l’instar du café, ce guide a un impact considérable sur le marché de ces produits, explique Tomas Sweertvaegher, porte-parole d’Els Van Weert. Il ne faut par ailleurs pas jeter le bébé avec l’eau du bain. La réflexion sur un label durable fiable et intégré doit être poursuivie. Un seul label et des étiquettes claires permettront à chacun de distinguer facilement les produits durables des autres.»
En attendant cette machette publique salvatrice, bon périple dans la jungle...
David Leloup
(1) Les coulisses du commerce équitable, Christian Jacquiau, Fayard, 2006.
(2) L’économie sociale ou «troisième secteur» se compose d’activités économiques exercées par des sociétés (principalement coopératives), des mutualités et des associations qui ont pour finalité le service aux membres ou à la collectivité plutôt que le profit. Ces structures jouissent d’une autonomie de gestion, ont instauré un processus de décision démocratique et assurent la primauté des personnes et du travail sur le capital dans la répartition des revenus.
(3) Suite à ces protestations, trois projets de loi (Ecolo, PS-SP.a et cdH) visant à reconnaître juridiquement le commerce équitable ont vu le jour. Ils sont actuellement sur la table du Parlement fédéral.
(4) «Le Fair Trade sera-t-il victime de son succès?», dossier disponible sur Alter-BusinessNews.be.
Cet article a été initialement publié dans le bimestriel belge Imagine (télécharger le PDF). S’il vous a plu, merci de bien vouloir envisager d’acheter le magazine en version papier ou électronique (PDF), voire de vous y abonner.
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Labellisation, mode d’emploi |
Le processus de labellisation varie quelque peu selon la nature des produits labellisés, mais le schéma général est le suivant:
1. Un producteur P souhaite faire labelliser sa production pour s’ouvrir de nouveaux marchés. Il s’adresse à une structure S (organisme public, association, organisation professionnelle, etc.) qui gère un label symbolisé par un logo (marque privée déposée) et qui a établi un cahier des charges à respecter pour obtenir son label.
2. S prend contact avec un organisme de certifi cation et de contrôle C, indépendant de S. C doit lui-même être certifi é par un organisme accréditateur A (public) indépendant de C, selon les critères d’une norme internationale (ISO 65, par exemple) régulant la manière dont une certification devrait être faite (transparence sur la nature des contrôles, indépendance totale, contrôle interne de la qualité des audits, égalité de traitement des producteurs).
3. C effectue un audit de certification chez le producteur P. Si P répond au cahier des charges de S, il est certifié conforme aux critères du label.
4. S autorise alors P à apposer le logo sur ses produits.
5. P sera ensuite contrôlé annuellement par C (audits de suivi) pour s’assurer qu’il respecte bien le cahier des charges dans la durée. C contrôle également les autres acteurs de la filière (l’importateur I, le transformateur T et le distributeur D, par exemple) pour s’assurer que l’emballage qui porte le logo de S contient bien un produit issu d’un producteur certifié.
Qui paye quoi (flèches jaunes) ?
En général, P paye à C les audits de certification et de contrôle qu’il subit. Les autres acteurs économiques (I, T, D…) également. Tous achètent par ailleurs à S une licence pour avoir le droit d’apposer son logo sur leurs produits. Au final, ces surcoûts sont répercutés sur le prix du produit. Ainsi, seul le consommateur paye pour la bonne cause labellisée, mais il bénéficie en revanche de produits qui, selon le label, respectent mieux sa santé et les écosystèmes de la planète, ou encore les conditions sociales ou économiques des producteurs.
jeudi 22 février 2007
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Ikea, le film |
La campagne de l’ONG Oxfam-Magasins du monde sur les pratiques sociales et environnementales douteuses du chouchou de la middle-class mondialisée bat son plein. Malgré le gigantesque capital sympathie dont dispose la multinationale jaune et bleue, le livre-enquête Ikea, un modèle à démonter s’est déjà écoulé à plus de 4500 exemplaires en Belgique et en France. Un vrai succès quand on connaît les chiffres de vente moyens de l’édition pour ce genre d’ouvrage.
Des traductions en néerlandais, en espagnol et en italien sont en cours. Ainsi que des pourparlers avec le poil-à-gratter du PABF (paysage audiovisuel belge francophone), Jean-Claude Defossé, en vue d’un possible reportage journalistique dans «Questions à la une».
Ce que l’on sait moins, c’est qu’un reportage télé de 26 minutes a déjà été réalisé par une journaliste de Canal C (télé régionale namuroise) pour appuyer la campagne d’Oxfam. Adaptation partielle du livre, il pose de front la question franchement taboue que tout le monde ou presque évacue une fois à l’intérieur du temple aseptisé de l’ameublement: «Qui paie le prix fort pour notre ameublement à bon marché?».
Pour tenter d’y répondre, la caméra nous emmène dans le Tamil Nadu, un Etat du sud de la péninsule indienne. Un catalogue Ikea à la main, Denis Lambert et Jean-Marc Caudron d’Oxfam-Magasins du monde vont à la rencontre d’ouvriers de chez Atlantic Group et Ram Textiles, deux sous-traitants du géant suédois...
lundi 5 février 2007
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Technoscience |
Le mot technoscience apparaît à la fin des années 1970 sous la plume du philosophe belge Gilbert Hottois qui l’introduira ensuite dans la littérature scientifique pour «désigner l’entreprise en marche de ce qu’on appelle plus communément la “recherche scientifique” contemporaine, dont la technique (l’espace et le temps technicisés qui nous environnent de toutes parts) constitue le “milieu naturel” de développement et aussi le principe moteur (1)». Avant de se substantiver, le concept a d’abord pris la forme d’épithètes: scientifico-technique dans un premier temps, technico-scientifique ensuite, technoscientifique enfin (2), la disparition progressive du trait d’union signant la fusion des deux termes en un concept autonome et cohérent caractérisant cette activité qui, selon le biologiste Jacques Testart, «à la fois fait que la science n’est plus la science, mais que la technique n’est plus non plus la technique (3)».
Avant l’ère technoscientifique, la science produisait occasionnellement des techniques, mais cela ne constituait en aucun cas sa finalité qui était avant tout la quête exclusive et désintéressée du savoir. Aujourd’hui, l’activité scientifique vise presque essentiellement à produire des technologies qui, en retour, modifient l’activité des laboratoires – ne serait-ce qu’en leur fournissant des outils de sophistication croissante qui permettent de faire de la recherche générant à son tour des innovations technologiques. Ainsi, avec l’avènement de la technoscience et du basculement épistémologique qu’elle entraîne, la distinction familière entre recherche fondamentale et recherche appliquée tend à s’effacer au profit de ce que d’aucuns appellent la recherche «finalisée». Dans un nombre grandissant de disciplines, les scientifiques, même s’ils n’en ont souvent pas conscience, inscrivent leurs recherches «dans un contexte d’application (4)»: s’ils bénéficient de budgets pour effectuer ce qu’ils appellent de la recherche fondamentale, c’est principalement parce que la finalité de celle-ci est de produire de «nouvelles technologies». Ces dernières ne sont donc plus des applications de la recherche fondamentale: elles sont cette recherche. D’une certaine manière, la technoscience consacre le triomphe de l’invention sur la découverte. Et met à l’honneur la «rationalité technique», mouvement par lequel, au XXe siècle, la pensée technique – opératoire, orientée vers l’action efficace, où priment le fonctionnel et le quantitatif – est devenue modèle.
Alors que les Grecs méprisaient ouvertement la technique, plaçant la vie contemplative ou théorétique au sommet de la hiérarchie des finalités humaines, c’est chez des penseurs de la Renaissance qu’il faut rechercher les racines du projet technoscientifique. Au XVIIe siècle, des auteurs comme Descartes et Bacon feront l’apologie de la technique et proposeront pour la première fois de la rapprocher de la science afin de mieux maîtriser les phénomènes naturels. Selon l’historien des sciences John Pickstone, il faudra néanmoins patienter jusqu’à la deuxième Révolution industrielle (5), dans les années 1870, pour situer l’acte de naissance de la technoscience contemporaine, lorsqu’il ne fut plus possible de dissocier les intérêts gouvernementaux, industriels et académiques en jeu (6). De fait, avec l’essor des industries électrique, pharmaceutique et des colorants de synthèse, l’État devient à la fois producteur, consommateur et régulateur de matières premières scientifiques.
La mise au point des gaz de combat puis de la bombe atomique, principaux projets gouvernementaux d’envergure des deux guerres mondiales, signent l’âge d’or de la technoscience étatique. Lancé en 1941 dans le plus grand secret, le projet Manhattan porte le complexe technoscientifique nucléaire sur les fonts baptismaux, complexe qui joua ensuite, aux États-Unis, en Grande-Bretagne et en URSS notamment, un rôle essentiel en tant que modèle dans la reconstruction de la recherche scientifique d’après-guerre. À Washington par exemple, le Congrès accorda rapidement son soutien aux disciplines que la guerre avait fait triompher, au premier rang desquelles figurait la physique. Avec elle et son héritage militaire, une forme bien particulière de recherche fut alors privilégiée: «celle qui consiste à rassembler des études dont chaque partie peut éventuellement être peu coûteuse, en de vastes ensembles, en vue de la réalisation d’objectifs relativement précis mais exigeant des mises de fonds très importantes. C’est ce que l’on appelle la “big science” (7)». L’État restera fortement impliqué dans cette logique jusqu’à la révolution néolibérale à l’aube des années 1980. Sans jamais disparaître, la technoscience étatique cède alors progressivement du terrain à la technoscience privée. L’industrie électronique, les biotechnologies ainsi que, plus récemment, les nanotechnologies et la recherche sur la fusion nucléaire s’épanouiront sous ce double étendard.
A la fois symptôme et moteur du capitalisme cognitif qui s’est largement amplifié à la fin du XXe siècle dans les sociétés occidentales en voie de désindustrialisation, la technoscience actuelle constitue désormais le principal projet d’une société qui attend de ses technologies le progrès économique et, avec elles, la puissance sur le marché mondial. Ce projet idéologique trouvera, sur le Vieux Continent, sa consécration politique en mars 2000. L’objectif stratégique fixé par le Conseil européen de Lisbonne assignera en effet à l’Europe de «devenir l’économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde». Ce qui place de facto la technoscience au cœur de la stratégie de croissance de ce qu’il est aujourd’hui convenu d’appeler la société de la connaissance. La lourde responsabilité d’un avenir économique radieux, en Europe, reposerait ainsi en grande partie sur les épaules de chercheurs désormais priés par leurs bailleurs de fonds publics de se muer en jeunes entrepreneurs chargés de créer de la valeur ajoutée en déposant des brevets et en fondant des spin-offs incubatrices de nouvelles technologies. Instauré en 2000, l’«espace européen de la recherche», transposition dans l’univers scientifique de la stratégie néolibérale de Lisbonne, vise ainsi à «construire le “marché commun” de la recherche et de l’innovation, à l’image de celui qui a été créé dans le secteur des biens et des service (8)». Exclusivement étatique au XXe siècle, la big science étend désormais ses tentacules technoscientifiques à l’échelle européenne via notamment la création de «réseaux d’excellence» transnationaux.
En bousculant la représentation de la science et les rapports entre science, technologie et éthique, la technoscience a contribué à faire émerger, dans la seconde moitié du XXe siècle, une éthique «appliquée» qui lui serait propre: la «bioéthique». Sur le plan philosophique, la force de frappe symbolique que charrient la logique et les idéaux technoscientifiques n’est sans doute pas étrangère à l’essor du transhumanisme, doctrine philosophique apparue à la fin des années 1970 et qui promeut l’usage de la technologie pour améliorer l’homme et l’affranchir du carcan de l’évolution biologique. Au départ descriptif et sans péjoration particulière, le concept de technoscience s’est progressivement teinté d’une connotation négative à mesure que des mouvements de résistance émanant de la société civile se sont appropriés le terme pour fustiger l’idéologie ayant favorisé l’émergence et l’essor d’innovations telles que les organismes génétiquement modifiés, le clonage ou les nanotechnologies.
(1) Gilbert Hottois, Le signe et la technique. La philosophie à l’épreuve de la technique, Paris, Aubier Montaigne, Coll. «Res - L’invention philosophique», 1984, p.59-60.
(2) Si le premier usage de l’adjectif technico-scientifique remonte à 1904, la forme technoscientifique, elle, apparaît au milieu du XXe siècle (Le Grand Robert de la langue française, 1985, p. 192-194). En 1991, Larousse sera le premier dictionnaire français à introduire le substantif technoscience.
(3) «Terre à Terre», France Culture, 26 mai 2006.
(4) Michael Gibbons, Camille Limoges, Helga Nowotny, Simon Schwartzman, Peter Scott et Martin Trow, The New Production of Knowledge. The Dynamics of Science and Research in Contemporary Societies, Londres, Sage Publications, 1994.
(5) Succédant à la première Révolution industrielle, liée au moteur à vapeur et à l’essor des industries textile et métallurgique, la deuxième Révolution industrielle démarre dans les années 1870 avec la maîtrise de l’électricité, l’invention du téléphone et du moteur à explosion, et l’avènement des moyens de communication de masse. La troisième Révolution industrielle prendra, elle, son véritable envol dans les années 1970 avec l’invention d’Internet (Arpanet, 1969), du microprocesseur (Intel, 1971) et de l’ordinateur personnel (Apple, 1977).
(6) John V. Pickstone, Ways of Knowing: A New History of Science, Technology and Medicine, Manchester University Press, 2000, p. 14-15. Sous l’angle historique de l’épistémologie, l’auteur identifie cinq modes d’accès à la connaissance (ways of knowing) que l’on retrouve, en proportions variables, tout au long de l’histoire des sciences: l’herméneutique, l’histoire naturelle, l’analyse, l’expérimentalisme et la technoscience.
(7) Georges Waysand, La contre-révolution scientifique ou le crépuscule des chercheurs, Paris, Anthropos, 1974, p. 205.
(8) http://ec.europa.eu/research/era/index_fr.html.
Bibliographie:
Hottois G., Le paradigme bioéthique, une éthique pour la technoscience, Bruxelles, de Boeck, 1990; Breton P., Rieu, A.-M. et Tinland F., La technoscience en question, Seyssel, Champ Vallon, 1990; Pradès J. (dir.), La technoscience. Les fractures des discours, Paris, L’Harmattan, 1992; Latouche S., La Mégamachine: Raison technoscientifique, raison économique et mythe du progrès, Paris, La Découverte-MAUSS, 1995.
Mots corrélés :
Bioéthique, Connaissance (société de la), Nouvelles Technologies, Spin-Off, Stratégie de LisbonneA paraître dans Les nouveaux mots du pouvoir. Abécédaire critique, Pascal Durand (Coord.), Bruxelles, Aden, avril 2007.
mardi 30 janvier 2007
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Ce CO2 invisible en amont de l’assiette... |
Transporter par avion 1 kg de fraises d’Israël émet 2,6 kg de CO2, soit l’équivalent de 1 litre de pétrole. Pour 1 kg d’agneau de Nouvelle-Zélande, l’addition environnementale est encore plus salée: 15 kg de CO2 ou 5,6 litres d’or noir. En moyenne, les produits acheminés en Europe par avion génèrent des émissions de CO2... 60 fois plus élevées que par bateau.
Dans le contexte actuel du réchauffement climatique, cette réalité-là interpelle. D’où une pétition, lancée par un collectif spontané de citoyens (dont l’auteur de ces lignes) dans la foulée d’une «Opinion» parue ce matin dans La Libre Belgique. Son but? Interpeller les partis politiques belges pour qu’ils légifèrent en la matière et imposent aux distributeurs l’application de logos (un avion rouge et un bateau bleu, par exemple) indiquant systématiquement et clairement le mode de transport utilisé pour l’acheminement intercontinental des marchandises.
Pas question de réclamer l’interdiction d’importer des produits frais par avion. Les membres du collectif «Avion Rouge», puisque c’est son nom, ne sont pas des «Khmers verts». Indépendants de tout parti politique, ils partagent juste le souhait ferme, comme citoyens et consommateurs, de pouvoir poser des choix d’achat et de non-achat en toute connaissance de cause.
Pour signer la pétition, c’est par ici...
mardi 23 janvier 2007
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Téléphonie mobile: trafic d’influence à l’OMS? |
Un haut-fonctionnaire suspecté d’avoir pédalé pendant 10 ans pour l’industrie
Opérateurs, fabricants de téléphones portables, pouvoirs publics: tout le monde, sans exception, se réfugie derrière les sacro-saintes recommandations de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) en matière de rayonnement électromagnétique. Mais l’OMS est-elle vraiment si neutre et objective que cela?
Noyautage, lobbying intensif, trafic d’influence, financement intéressé... : en juillet 2000, un comité d’experts indépendants mandaté par l’OMS publiait une bombe de 260 pages détaillant par le menu les sombres tactiques utilisées par les cigarettiers pour miner les campagnes antitabac de l’OMS. Au même moment, pour désamorcer le scandale, l’agence onusienne émettait 15 pages de recommandations afin qu’à l’avenir son travail ne soit plus jamais sapé de la sorte par des intérêts industriels. Mais aujourd'hui, l’OMS a-t-elle réellement tiré les leçons du passé? De plus en plus de monde en doute.
Ces dernières années, l’étau de la suspicion s’est notamment resserré autour d’un homme qui, jusqu’il y a peu, détenait un pouvoir considérable. Si le nom de Mike Repacholi n’évoque rien pour le commun des mortels, il donne par contre de l’urticaire à de nombreux scientifiques ainsi qu’aux associations militant pour l’instauration de normes d’émissions électromagnétiques plus sévères.
Pétition et lettres ouvertes
Physicien et docteur en biologie, Mike Repacholi a été ces dix dernières années le coordinateur du Projet international pour l’étude des champs électromagnétiques (ou «projet CEM»), lancé par l’OMS en 1996. Son rôle? Celui de «supersecrétaire» chargé de coordonner des programmes de recherche dans le monde entier afin d’évaluer les éventuels risques sanitaires liés aux lignes à haute tension, antennes relais et autres GSM. Sur la base des résultats scientifiques obtenus, l’OMS émet alors des recommandations mondiales de santé publique.
Or les détracteurs de M. Repacholi lui reprochent d’avoir systématiquement évacué ou minimisé les études «dérangeantes» pour l’industrie, impliqué celle-ci dans le processus de décision, écarté des scientifiques de renom des groupes d’experts réunis par ses soins à l’OMS, mais aussi d’avoir été très timoré dans ses recommandations de santé publique et d’avoir fait financer «son» projet CEM en grande partie par les industriels de la téléphonie mobile. En caricaturant à peine, l’homme est accusé, ni plus ni moins, d’avoir pédalé pendant dix ans pour l’industrie.
Une pétition internationale a circulé pour réclamer sa tête. Sans résultat. En juillet dernier, sauvé par l’âge légal de la retraite, M. Repacholi a quitté l’agence onusienne par la petite porte. Ce qui n’a pas empêché six ONG françaises d’adresser, en octobre et en décembre derniers, deux lettres ouvertes à la direction générale de l’OMS pour qu’elle diligente au plus vite une enquête sur les agissements suspects de M. Repacholi durant son mandat.
Expert judiciaire pour l’industrie
«Le projet CEM était corrompu dès le départ, estime Andrew Marino, professeur de biologie cellulaire au Centre des sciences de la santé de l’université de Louisiane (Etats-Unis). Michael Repacholi était connu depuis plus de six ans comme consultant rémunéré et porte-voix des compagnies responsables de générer de la pollution électromagnétique.» Ce qui est sûr, c’est que M. Repacholi a été embauché par une compagnie d’électricité australienne, en 1990, pour témoigner comme expert en sa faveur dans un procès intenté par des fermiers de Nouvelle-Galles du Sud opposés à l’installation d’une ligne à haute tension sur leurs terres. Fin 1995, quelques mois avant de prendre la tête du projet CEM à l’OMS, M. Repacholi s’est à nouveau complaisamment prêté à ce petit jeu. Pour le compte de l’opérateur de téléphonie mobile néo-zélandais BellSouth, cette fois. Il s’agissait alors d’argumenter en faveur de l’opérateur contre des riverains de Christchurch opposés à l’implantation d’une antenne relais à 70 mètres d’une crèche...
Deux ans plus tard, M. Repacholi «a également tout fait pour minimiser et étouffer les résultats fracassants d’une étude réalisée sur des souris transgéniques en Australie, se souvient Etienne Cendrier de l’association Robin des toits. Cette étude, réalisée en double aveugle, montrait un risque de tumeur doublé lorsque les souris étaient exposées deux heures par jour, durant 18 mois, au rayonnement d’un GSM.» Ces souris, génétiquement modifiées pour développer facilement des tumeurs, sont couramment utilisées en recherche pour «gagner du temps», afin d’anticiper les effets d’un médicament ou d’un facteur environnemental qui, normalement, n’apparaîtraient qu’après de nombreuses années. Coordonnée par M. Repacholi dès 1993, cette recherche menée à l’Hôpital royal d’Adelaïde fut à l’époque financée par l’opérateur australien Telstra.
Selon le journaliste scientifique Stewart Fist, qui a suivi cette affaire de très près pour le quotidien The Australian, les coauteurs de cette étude explosive lui ont assuré à l’époque qu’elle avait été refusée par les prestigieuses revues scientifiques Nature et Science pour des raisons «politiques» – Science justifiant son refus en arguant qu’une telle publication «créerait la panique». D’après M. Fist, ces revues de premier plan auraient toutes utilisé l’argument selon lequel les résultats devaient d’abord être répliqués. Le protocole de recherche était pourtant solidement ficelé et les résultats hautement significatifs sur le plan statistique (p < 0.01). Ce qui n’a pas empêché M. Repacholi de qualifier à plusieurs reprises ces résultats de «non concluants et insignifiants».
De curieux revirements
Louis Slesin, chimiste physicien, docteur en sciences environnementales du MIT et rédacteur en chef de la lettre spécialisée Microwave News, blâme quant à lui M. Repacholi pour ses nombreux revirements au cours de son mandat. «En février 2003, à Luxembourg, le coordinateur du projet CEM a annoncé qu’il existait désormais “suffisamment de preuves” pour préconiser des politiques préventives notamment en matière de rayonnements radiofréquence et micro-ondes [ceux de la téléphonie mobile, NDLR]. Or, quelques semaines plus tard, il est revenu sur cette position sans la moindre justification.»
Autre exemple? A Ottawa, en juillet 2005, M. Repacholi déclare à la presse que «l’OMS recommande que les enfants utilisent des kits mains libres». Mais peu après, il réaffirme une position antérieure de l’OMS selon laquelle «les données scientifiques actuelles ne montrent aucun besoin de prendre la moindre précaution particulière en matière d’utilisation des téléphones portables».
Louis Slesin reproche également à M. Repacholi d’avoir favorisé l’industrie, en impliquant celle-ci dans la prise de décision au sein même de l’OMS. Le 3 octobre 2005, un groupe d’experts s’est réuni à Genève pour finaliser un document établissant des Critères de santé environnementale pour les champs électromagnétiques d’extrêmement basse fréquence. Louis Slesin a révélé que l’industrie avait «joué un rôle majeur à chaque étape du développement» de ce texte.
«Des documents montrent que Leeka Kheifets [alors collaboratrice de M. Repacholi, NDLR] a joué un rôle central dans la rédaction de l’avant-projet.» Or Mme Kheifets, professeure d’épidémiologie à l’université de Californie de Los Angeles, travaille depuis longtemps pour l’Institut de recherche de l’industrie électrique étasunienne (EPRI), même si son curriculum vitæ académique se garde bien de le mentionner. Il indique juste qu’en 1995 et 1996, elle a reçu le Performance Recognition Award décerné par l’EPRI. En 2005 pourtant, l’année même où Mme Kheifets a contribué à l’avant-projet de texte pour l’OMS, elle a dévoilé au journal Environmental Health Perspectives que l’EPRI avait financé ses travaux, et au British Medical Journal qu’elle travaille pour l’EPRI et qu’elle est consultante pour l’industrie électrique.
Selon Louis Slesin, Mme Kheifets a préparé l’avant-projet avec l’aide, entre autres, de trois représentants de cette même industrie. L’avant-projet a ensuite été envoyé à un grand nombre d’experts, comme cela se fait habituellement, afin de recueillir leurs commentaires. Parmi eux, cinq représentants de l’industrie électrique ont eu tout le loisir de remettre en question les passages gênants pour les intérêts du secteur qui les emploie.
Pas d’observateurs indépendants
Par ailleurs, le 3 octobre 2005 à Genève, lors de cette fameuse réunion du groupe d’experts (indépendants) chargés de finaliser les Critères de santé environnementale, huit représentants de l’industrie électrique ont été invités par M. Repacholi en tant qu’«observateurs».
Aucun autre observateur (syndicat, association de consommateurs ou ONG écologiste, par exemple) n’a par contre été convié à cette réunion. «Grâce à Repacholi, concluait Slesin en octobre 2005, l’industrie électrique a été et continue d’être un partenaire à part entière dans la rédaction de ce document – un texte qui sera la position officielle de l’OMS sur les champs électromagnétiques pour les années à venir. Le plus déconcertant, c’est que personne à l’OMS ne pense qu’il fait quoi que ce soit de mal.»
Mais peut-être est-ce parce que l’OMS ne finance pas le projet CEM. En effet, M. Repacholi était contraint de réunir lui-même son budget de fonctionnement (tout comme Mme van Deventer aujourd’hui). Comme il l’a expliqué lors d’une réunion à Istanbul, en 2004, «le projet CEM peut recevoir des fonds de n’importe quelle origine via l’Hôpital royal d’Adelaïde, un intermédiaire établi avec l’accord du département juridique de l’OMS en vue de rassembler les fonds pour le projet». Peut-on dès lors légitimement lui en vouloir d’être allé chercher l’argent là où il le trouvait, c’est-à-dire en grande partie chez les industriels du portable? Une question à retourner à l’administration centrale de l’OMS et à son service juridique, qui ont autorisé ce curieux mécanisme de financement que Slesin n’hésite pas à assimiler à du «“blanchiment”» d’argent industriel.
Plus de 40% du budget financé par l’industrie du portable
Si officiellement le projet CEM «est financé uniquement par des contributions extra-budgétaires venant des pays et agences participantes», il est établi qu’il reçoit chaque année – depuis 2005 en tout cas – plus de 150.000 $ du Mobile Manufacturers Forum (MMF), le lobby des fabricants de portables basé boulevard Reyers à Bruxelles. Contacté par le magazine belge Imagine, Michael Milligan, secrétaire général du MMF, se borne à rappeler que les versements se font «en accord avec les demandes de l’OMS et via la procédure agréée et mise en place par celle-ci». Il se félicite par ailleurs de «l’expertise de l’OMS, particulièrement en ce qui concerne l’information qu’elle produit et qui repose sur une science d’excellente facture».
La GSM Association (GSMA), l’autre lobby de l’industrie, qui regroupe près de 700 opérateurs dans 213 pays, contribue également au budget constitué par M. Repacholi et, aujourd’hui, par Mme van Deventer. «La GSMA fournit 50.000 € par an depuis la fin des années 1990, précise son porte-parole David Pringle. Cette somme s’est élevée à 150.000 € en 2005 et 2006. Nous revoyons le montant chaque année, mais nous prévoyons de continuer à soutenir cet important travail au même niveau de financement dans le futur.» Pringle précise en outre que la GSMA «ne joue aucun rôle au sein du Comité consultatif indépendant qui fait le point sur les activités du projet CEM de l’OMS».
D’autres groupes d’intérêts financent également le projet CEM. Ainsi, la FGF, une association «indépendante» largement financée par l’industrie de la téléphonie mobile allemande, subventionne le projet à concurrence de 15.000 € par an. Au total, il s’avère que l’industrie du mobile a financé, à elle seule, plus de 40% du budget du projet CEM de l’année fiscale 2005-2006 – lequel s’élevait à 725.000 $. Cette proportion de financement industriel ne tient évidemment pas compte du possible soutien financier de l’industrie électrique.
«Si ce n’est pas une violation des règles de l’OMS, c’est certainement une violation de l’esprit des règles», s’indigne Louis Slesin, qui s’interroge comme beaucoup de monde sur l’indépendance réelle de M. Repacholi durant son mandat à la tête du projet CEM. Slesin souligne d’ailleurs que les seuils d’exposition prônés par l’OMS ne sont pas suivis par plusieurs pays. «Mike veut nous faire croire qu’il est la voix de la raison, mais en réalité ce sont ses positions qui sont déphasées par rapport à celles de nombreux gouvernements nationaux. La Chine, l’Italie, la Suisse, la Russie et le Luxembourg ont tous adopté des limites d’exposition préventives – rejetant directement les appels de Mike pour harmoniser les standards de rayonnement. De plus, des commissions d’experts en Angleterre, France, Allemagne, Belgique, Irlande, Suède, Autriche, Russie et Taiwan ont toutes émis des avis décourageant les enfants d’utiliser des téléphones mobiles.»
Un retraité très actif
Depuis sa retraite française d’Aix-les-Bains, au bord du Lac du Bourget, Mike Repacholi se contente de discréditer son principal détracteur. «Je ne me préoccupe pas des commentaires de Slesin car il ne me contacte jamais pour valider ses informations, nous écrit-il. Ses articles n’ont donc aucune crédibilité. Il a publié tellement d’informations erronées. Assurément, les scientifiques dont l’opinion m’importe n’accordent aucune foi à ses écrits. Il a eu l’occasion de se montrer utile dans le domaine des champs électromagnétiques mais a échoué lamentablement.»
Présidente du Centre de recherche et d’information indépendantes sur les rayonnements électromagnétiques (CRIIREM) et cosignatrice de la lettre ouverte à la direction générale de l’OMS, Michèle Rivasi estime au contraire que Louis Slesin est un «lanceur d’alerte» susceptible de secouer le cocotier genevois. «J’espère vraiment qu’Emilie van Deventer, qui remplace Repacholi, témoignera de plus de vigilance dans le choix des experts et qu’elle associera à l’avenir la société civile dans la prise de décision. Ayant effectué de nombreuses mesures dans des habitations exposées aux antennes relais, je suis convaincue – et je suis loin d’être la seule – que nous sommes à l’aube d’importants problèmes de santé publique.»
Depuis sa mise à la retraite, M. Repacholi n’est pas resté inactif. Bien au contraire. Renouant avec un vieil atavisme, il ne s’est pas privé de «consulter» pour l’industrie électrique étasunienne. Le 26 octobre 2006, soit moins de quatre mois après son départ de l’OMS, l’homme témoignait pour le compte de la Connecticut Light and Power Co. et de la United Illuminating Co. afin d’influencer le Conseil chargé du choix des implantations des lignes à haute tension dans l’Etat du Connecticut. Cette instance publique est actuellement en train d’harmoniser les normes d’exposition de la population aux champs électromagnétiques émis par les lignes à haute tension.
L’exposé de M. Repacholi visait à montrer que les normes en vigueur sont trop strictes et qu’il serait scientifiquement fondé de les assouplir, minimisant au passage les nombreux résultats d’études montrant que le risque de leucémie infantile est accru à proximité des lignes à haute tension. Pour appuyer son audition, M. Repacholi n’a pas hésité à exploiter de façon douteuse des documents de travail de l’OMS non encore finalisés. En effet, pas moins de six coauteurs de ces textes lui ont reproché d’avoir déformé certaines conclusions ou d’en avoir présenté des extraits de façon partiale et trompeuse.
Nul ne sait combien d’argent M. Repacholi a touché pour réaliser son rapport d’expertise de 56 pages. Deux autres consultants ayant récemment travaillé pour les deux mêmes compagnies électriques ont tous deux été rémunérés au tarif de 400 $/heure.
Un rapport de l’OMS «appauvri»
Quelques jours après cette «pige» pour l’industrie électrique, l’ex-haut fonctionnaire de l’OMS se retrouvait au centre d’une polémique médiatique. En Angleterre, cette fois, dans une enquête sur les armes à uranium appauvri (UA) réalisée par Angus Stickler, journaliste à la BBC. Sur les ondes de Radio Four, le Dr. Keith Baverstock, professeur en sciences de l’environnement de l’université de Kuopio (Finlande) et ex-directeur du service de radioprotection du Bureau européen de l’OMS, accusait son ancien supérieur hiérarchique, Mike Repacholi, d’avoir minimisé les dangers de l’UA pour les populations vivant à proximité de sites bombardés.
Des projectiles conventionnels contenant de l’UA ont été utilisés en 1991 pendant la guerre du Golfe, en 2003 contre l’Irak, mais aussi en Bosnie, en Serbie, au Kosovo et, selon des sources non-officielles, en Afghanistan. Très dur et très dense, l’UA est principalement utilisé dans les armes anti-char. Quand un obus explose, il génère un nuage de poussières contenant des oxydes d’uranium. Inhalées ou ingérées, ces particules toxiques et radioactives peuvent, à long terme, causer des cancers et des malformations chez les nouveaus-nés. Dans le monde, plusieurs initiatives visent aujourd’hui à interdire ces armes. En Belgique, une récente proposition de loi allant dans ce sens a été déposée par le député socialiste Dirk Van der Maelen.
Un rapport de synthèse de l’OMS, coordonné par M. Repacholi et publié en 2001, a notamment conclu que «[d]ans les zones de conflit où l’uranium appauvri a été utilisé, il n’est pas nécessaire de soumettre les populations à un dépistage ou à un contrôle généralisé des effets éventuels sur leur santé». Pour M. Repacholi, il faut que «l’exposition soit importante pour observer des effets sur la santé». A ses yeux, «l’uranium apauvri est fondamentalement sain». Il faudrait en ingérer «une grande quantité» pour observer des effets sanitaires négatifs. Or Baverstock lui reproche précisément d’avoir écarté, lors de la réalisation de ce rapport, pas moins de huit études faisant état d’effets génotoxiques de l’UA, sans qu’une exposition importante soit nécessaire.
«Quand on inhale la poussière, plus elle va se nicher profondémment dans les poumons, plus il est difficile de s’en débarrasser, explique Baverstock. Les particules qui se dissolvent présentent un risque - dû à la radioactivité et à la chimiotoxicité - pour le poumon même et, par la suite, lorsque ce matériaux se diffuse dans le reste du corps et dans le sang, on observe un risque potentiel de leucémie dans des zones comme la moëlle osseuse, le système lymphatique et le foie.» Ces huit études ont pourtant toutes été publiées dans des revues à comité de lecture et auraient logiquement dû être prises en compte dans la synthèse, estime Baverstock. Les jugeant «spéculatives», M. Repacholi a décidé de les écarter.
Un «testament scientifique» sans surprise
Enfin, toujours en novembre dernier, un article scientifique cosigné par Mike Repacholi, Emilie van Deventer et un certain Peter A. Valberg, est paru dans la revue étasunienne Environment Health Perspectives. Portant sur les effets sanitaires possibles des rayonnements électromagnétiques de la téléphonie mobile, l’article concluait – sans surprise – que «l’exposition du public aux niveaux de radiofréquence autorisés pour la téléphonie mobile et les antennes relais n’est pas susceptible d’affecter la santé humaine de façon négative».
Pour Louis Slesin, une chose est claire: les auteurs ont été sélectifs dans le choix des résultats d’étude présentés. «Par exemple, dans une revue des résultats de l’étude Interphone en cours concernant les risques possibles de cancer associés à l’utilisation des téléphones portables, ils omettent de mentionner ce qui est peut-être le résultat le plus inquiétant à ce jour: un risque statistiquement significatif de neurinome acoustique chez les personnes ayant utilisé des téléphones portables pendant plus de dix ans. La question ouverte des risques possibles à long terme est tout simplement ignorée.»
L’auteur principal de cet article, Peter A. Valberg, est un expert de l’évaluation des risques pour la santé humaine. Après vingt années de carrière académique à l’Ecole de santé publique de Harvard, M. Valberg s’est reconverti dans le privé. Il travaille actuellement pour Gradient, une société de consultance en environnement. Sur son site Internet, Gradient explique que ses clients font appel à elle «pour les éclairer sur les questions environnementales qui affectent directement leurs objectifs en affaires et leurs résultats financiers. (...) Nous sommes sollicités pour le sérieux de nos analyses techniques et notre capacité à produire des déclarations claires et à mener des négociations persuasives pour aider nos clients à atteindre leurs objectifs et respecter les lois et les réglementations environnementales.»
Pas étonnant, dès lors, que M. Valberg soit un consultant régulier pour l’industrie électrique étasunienne – ce que son curriculum vitæ se garde pourtant bien de préciser. Afin d’obtenir les permis nécessaires auprès des autorités publiques, de nombreuses compagnies ont fait appel à ses services pour minimiser au maximum les risques sanitaires liés à l’installation de nouvelles lignes à haute tension. M. Valberg a ainsi témoigné pour la Appalachian Power Company (Virginie Occidentale) en 1998, pour Xcel Energy (Minnesota) en 2001, pour la Commonwealth Electric Co. (Massachusetts) en 2003, pour la Vermont Electric Power Co. (Vermont) en 2004, pour la Boston Edison Co. (Massachusetts) en 2005, et pour ITC Transmission (Michigan) en 2006.
Les compétences de M. Valberg ne se limitent cependant pas au domaine des champs électromagnétiques émis par les lignes à haute tension. En 1997, lorsque le Bureau d’évaluation des risques sanitaires environnementaux de Californie a souhaité classer les particules fines émises par les moteurs diesels dans la catégorie des polluants toxiques, M. Valberg a témoigné en faveur de la Engine Manufacturers Association, le lobby des motoristes étasuniens, pour minimiser les risques sanitaires liés à l’inhalation de ces particules. Et à l’automne dernier, M. Valberg est intervenu en faveur des cigarettiers étasuniens dans le cadre d’un procès qui les oppose à un groupe de fumeurs de cigarettes light estimant avoir été dupés par des publicités qui présentaient ces cigarettes comme plus saines que les autres.
On connaît les campagnes antitabac de l’OMS et son combat contre leur sabotage par les cigarettiers. Le Centre international de recherche sur le cancer, une agence de l’OMS, considère depuis 2001 que les rayonnements électromagnétiques émis par les lignes à haute tension sont «peut-être cancérogènes pour l'homme». L’OMS a également tiré la sonnette d’alarme à propos des particules fines en rappelant avec force qu’elles constituent un grave problème de santé publique. Qu’un ex-haut fonctionnaire de l’OMS, institution publique internationale censée défendre l’intérêt sanitaire général, cosigne son «testament scientifique» avec un consultant pour l’industrie ayant à de nombreuses reprises défendu des intérêts radicalement opposés aux missions mêmes de l’OMS, n’a visiblement ému personne. Mais qui s’est jamais soucié de M. Repacholi, de son parcours professionnel et de ses conditions de travail?
David Leloup
Cet article est une version actualisée et enrichie d’une enquête publiée dans le bimestriel belge indépendant Imagine. S’il vous a plu, merci de bien vouloir envisager d’acheter le magazine en version papier ou électronique (PDF), voire de vous y abonner.
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