Tourné le samedi 10 août sur la plage d’Ostende par le réalisateur flamand Nic Balthazar (qui représenta la Belgique aux Oscars avec Ben X), ce clip a rassemblé bien plus de figurants pour sa réalisation que de citoyens dans les rues de Bruxelles pour manifester, ce samedi 6 décembre, pour une loi nationale visant à réduire annuellement les émissions de CO2. S’ils étaient 6.000 à fouler le sable ostendais cet été, ils ne furent que... 500 à battre le pavé de la capitale quatre mois plus tard:
Le 2 décembre, les syndicats européens du métal ont mobilisé pour leur part quelque 11.000 personnes contre la mise aux enchères des quotas de CO2 à partir de 2013 dans l’industrie lourde. Donc contre le climat, à cause du chantage à l’emploi exercé par les lobbies industriels:
On comprend ces hommes et ces femmes qui défilent en récitant poliment le bréviaire patronal. Ils ont des factures à payer, comme tout le monde. Leur cortège constituait néanmoins un «long paradoxe contemporain», comme l’a souligné Paul Hermant dans sa chronique radio sur la Première. A l’instar de la fuite des cerveaux (brain drain) et de la fuite des capitaux (tax evasion), c’est toute la question de la «fuite du carbone» (carbon leakage) qui se pose ici crûment. Et on n’a pas fini d’en parler tant qu’un accord mondial sur le climat — un «Kyoto 2» négocié l’an prochain à Copenhague — n’aura pas été signé...
dimanche 7 décembre 2008
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2008 expliquée à ma fille |
mardi 4 novembre 2008
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Ces papys «verts» de l’atome... |
Alors que le rejet de l’atome constitue un des piliers historiques du mouvement environnementaliste, une petite poignée de papys écolos ou assimilés ont, ces dernières années, déclaré leur flamme à l’atome. Au nom d’une «urgence climatique» à agir, d’une relève renouvelable tardant à s’organiser. Relativement bien médiatisés dans la presse anglo-saxonne, ces «traîtres à la cause» ou «écologistes intelligents», selon les points de vue, sont quasi inconnus de ce côté-ci de l’Atlantique.
«Des fondateurs de Greenpeace»
Répondant aux questions des auditeurs ce lundi matin sur La Première, la présidente du CDH Joëlle Milquet a fait référence (vers 7’10’’) à l’un d’entre eux en évoquant «des fondateurs de Greenpeace» qui préconiseraient un allongement de la durée de vie des centrales nucléaires belges. En réalité, le Canadien Patrick Moore est le seul et unique cofondateur de Greenpeace à avoir retourné sa veste anti-nucléaire. Et il n’a jamais évoqué le cas particulier des centrales belges...
Alain Hubert aime Electrabel qui aime l’atome
Le cas d’Alain Hubert, également cité par Mme Milquet, est différent. L’explorateur des pôles ne s’est en effet jamais affiché comme anti-nucléaire et il soutient – discrètement – l’atome depuis des années. Fin 2003, invité à parler à des enfants par la centrale de Tihange, il déclarait déjà que «l’option nucléaire est le seul moyen pour la Belgique de couvrir ses besoins en énergie à moyen terme sans causer de perturbations économiques et sociales de grande ampleur», selon le bulletin du Forum nucléaire belge de janvier 2004 (p.11). Etonnant? Pas vraiment: GDF-Suez et sa filiale Electrabel ont largement sponsorisé la station polaire Princess Elisabeth, réalisée sous la houlette de la Fondation polaire internationale présidée par... Alain Hubert.
Mais revenons à nos papys «verts» de l’atome. Dans le monde anglo-saxon, ils ne sont aujourd’hui plus que trois. Mais la relève est prête. Elle se trouve en France. Et quelle relève!Cofondateur de Greenpeace à Vancouver en 1971, ce Canadien de 61 ans quitta le navire écologiste en 1986, après en avoir été l’un des cinq directeurs internationaux. En 1976, il décrivait les centrales nucléaires comme «les engins les plus dangereux que l’homme a jamais créés. Leur construction et leur prolifération est la chose la plus irresponsable, et même la plus criminelle, qui a jamais eu lieu sur la planète.» Depuis 2006, contre monnaie sonnante et trébuchante, Moore s’est mis à chanter les louanges de l’atome pour le compte de l’industrie nucléaire étasunienne. Après avoir quitté Greenpeace, et avant d’embrasser la cause de l’atome, il a travaillé comme consultant pour les industries minière, forestière, biotechnologique et du PVC. James Lovelock
Père de la théorie Gaïa, selon laquelle la planète serait un organisme vivant autorégulé, ce scientifique britannique de 88 ans prône depuis 2004, une «nucléarisation massive» de la planète pour endiguer le réchauffement climatique. Lovelock ne conçoit notre salut que dans le développement technologique: réflecteurs géants dans l’espace pour repousser une partie du rayonnement solaire, solidification et enfouissement du CO2, création d’aliments synthétiques pour donner à la planète une chance de récupérer, etc. Et si le pire devait néanmoins arriver? Les survivants pourraient selon lui émigrer vers l’Arctique, devenu doux. Les riches se baladeraient alors dans des yachts propulsés à l’énergie solaire et les pauvres se divertiraient de voyages virtuels...Cet évêque anglican, qui fut administrateur des Amis de la Terre pendant des années, a fait son coming out nucléaire à 85 ans, six mois avant de décéder en mai 2005. Pour lui comme pour Lovelock, la messe était dite: sans nucléaire point de salut climatique. Et si les gouvernements tardent à embrasser l’atome c’est uniquement à cause des médias et du «lobby environnemental» qui diabolisent l’énergie nucléaire, déclarait-il à la BBC en compagnie de Bruno Comby (lire ci-dessous). Stewart Brand
Créateur de la revue Whole Earth Catalog, figure de la contre-culture et de la vague écologiste US, Brand s’est fait connaître en 1966 en lançant une campagne réclamant à la NASA qu’elle publie ses premières images de la Terre vue de l’espace. Ce futurologue aujourd’hui âgé de 69 ans déclara sa flamme à l’énergie nucléaire (et aux OGM) en 2005, dans un article très commenté de la prestigieuse Technology Review du MIT. Afin d’éviter que les déchets radioactifs des pays nucléarisés ne se retrouvent dans de mauvaises mains, Brand y plaidait notamment pour l’avènement d’un fournisseur mondial de combustible nucléaire qui récupérerait et retraiterait tous les déchets de la planète. Un Big Brother atomique, en somme.C’est le jeunot et seul francophone de la bande. Inventeur du «stressomètre» et auteur de nombreux ouvrages dont l’un propose au lecteur «les meilleures recettes à base d’insectes», cet ingénieur français de 48 ans préside l’Association des écologistes pour le nucléaire (AEPN) qui revendique 9.000 membres dans le monde – dont James Lovelock. En 1991, Comby publie Nature contre SIDA (un livre qui remet en question la réalité du SIDA) aux éditions Vivez Soleil, dont le directeur d’alors est un certain Maître C.T. Schaller, gourou de la secte Institut de santé globale et auteur d’ouvrages sur l’urinothérapie. Comby fut par ailleurs membre durant six ans de la secte de Montramé (Seine-et-Marne), dont le gourou Guy-Claude Burger a été condamné pour exercice illégal de la médecine et a écopé, en 2001, de 15 ans de prison pour pédophilie.
lundi 3 novembre 2008
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La consommation d’une auto dépend de la longitude! |
Question: combien consomme la BMW X3 dans sa version 3.0si? Réponse: cela dépend du style de conduite du conducteur, de la nature des trajets, du relief, du trafic, de l’état des routes, du carburant utilisé, de l’utilisation de l’airco et du chauffage, de la largeur des pneus, de leur niveau de pression, etc. OK, mais quels sont les chiffres officiels de ce 4x4 de loisir qui envahit nos villes depuis peu? Réponse: ça dépend de la longitude. En effet, le test en vigueur aux Etats-Unis (FTP-75 révisé) n’est pas le même que le test japonais (10-15) qui lui-même diffère de l’européen (NEDC).
Armé d’une calculette (solaire), Médiattitudes a défié pour vous les miles par gallon (MPG) étasuniens et autres kilomètres au litre (km/l) japonais. Bref, nous sommes en mesure de vous révéler que la même BMW X3 consomme officiellement, aux cent kilomètres et en cycle combiné, 12,4 litres aux States contre 11,9 au Japon, et seulement 10,1 en Europe. Soit une différence de plus de deux litres ou 23%!
Autre exemple: La dernière Honda Accord 2.4 engloutit 9,4 litres aux USA contre 8,3 au Japon et 8,8 dans l’UE. Soit 1,1 litre ou 13% d'écart.
Pour la route: la Cadillac CTS 3.6 boit officiellement 12,4 litres aux Etats-Unis, 12,5 au Japon et 11,4 en Europe.
Conclusion? Notre échantillon est bien trop restreint pour généraliser. Mais ce petit coup de sonde semble toutefois indiquer que le test étasunien serait le moins éloigné de la réalité (valeurs systématiquement élevées), l’européen le plus conservateur (valeurs constamment sous-évaluées) et le japonais le plus volatil (valeur plancher pour la Honda, mais maximale pour la Cadillac). Bref, les voitures ne semblent pas toutes égales face à ces tests, dont l’issue apparaît relativement aléatoire.
mercredi 6 août 2008
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Des vacances en avion, train, autocar ou voiture? |
«Les avions modernes atteignent des consommations de 3,5 litres aux 100 km par passager. L’Airbus A380 et le Boeing 787 Dreamliner visent les 3 litres aux 100 – mieux qu’une petite voiture familiale!», claironne l’Association internationale du transport aérien (IATA), puissant lobby regroupant 230 compagnies qui représentent 93% du trafic mondial de passagers. Cela correspond «à moins de 75 grammes de CO2 par passager par km», renchérit Airbus, qui avance le chiffre de 2,9 litres pour son A380. Bref, à écouter l’industrie aérienne, la planète se porterait mieux si tout le monde prenait l’avion et laissait sa voiture au garage...
Le problème, c’est que le lobby des airs «oublie» quatre facteurs qui ont un impact non négligeable sur les chiffres qu’elle cite. Primo, le taux de remplissage des avions. Il est de 70% en moyenne. Or les chiffres de 2,9 à 3,5 litres de kérosène «aux 100 km par passager» sont en fait valables aux 100 km par... siège disponible dans l’avion! La nuance est de taille: si un A380 est rempli à 70%, la consommation réelle par passager doit être majorée de 1,2 litre aux 100 km, et les émissions de 32 g par km.
Secundo, le taux d’occupation des voitures. Sur les longues distances (celles sur lesquelles l’automobile peut concurrencer les long et moyen-courrier), ce taux est supérieur au taux moyen de 1,6 personne par voiture utilisé par les avionneurs dans leurs calculs.
Tertio, les chiffres de 2,9 à 3,5 litres ne sont valables que pour les vols long-courrier effectués par de très gros avions. L’immense majorité des appareils en compétition avec le transport terrestre (train, autocar, voiture) sont plus petits et volent sur de plus courtes distances. Leur rendement énergétique est donc bien moins bon que 3,5 litres aux 100 km par siège. Il n’est peut-être pas inutile de rappeler également que sur les quelque 17.000 avions qui sillonnent aujourd’hui la troposphère, on ne dénombre que... cinq A380. Le Dreamliner, lui, ne sortira pas des cartons de Boeing avant fin 2009.
Quarto, l’impact climatique des autres rejets que le CO2 est tout simplement ignoré... alors qu’il est, au minimum, équivalent au seul impact du CO2.
La seule étude indépendante qui compare différents modes de transport, sur de longues distances, en tenant compte de ces quatre facteurs, arrive à des conclusions bien différentes de celles de l’industrie aérienne.
L’impact climatique de l’avion est en effet de 5 à 10 fois plus important que celui de l’automobile sur un vol court-courrier (500 km), et de 2,3 à 6 fois supérieur sur un moyen-courrier (1.500 km). La palme revient néanmoins à l’autocar et aux trains Intercity (IC), qui sont les modes de transport contribuant le moins au réchauffement climatique. Les TGV, vu leur vitesse très élevée, ont un rendement environnemental moins bon que les IC. Ils «scorent» donc logiquement moins bien que ceux-ci.
lundi 4 août 2008
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L’aviation, c’est 5 à 12% de l’impact des Européens sur le climat |
Qu’on se le dise: au niveau mondial, l’aviation représentait en 2000 entre 4 et 9% de l’impact total des activités humaines sur le climat. A l’échelle de l’Union européenne uniquement, on naviguait entre 5 et 12% en 2005. Ces fourchettes relativement larges reflètent une incertitude scientifique: celle de l’impact climatique exact, en haute altitude, des rejets autres que les émissions de CO2 — principalement les oxydes d’azote, les traînées de condensation et les aérosols (particules en suspension). Il est établi que ces rejets ont, au minimum, un impact sur le réchauffement climatique équivalent à celui du seul CO2 émis par les avions. Mais cet impact pourrait être jusqu’à quatre fois plus grand. Autrement dit, pour connaître l’impact total de l’aviation sur le climat, il conviendrait de multiplier l’impact du seul CO2 par un facteur 2 à 5. C’est énorme, et voici pourquoi.
Oxydes d’azote. Les oxydes d’azote (NOx) ont deux effets antagonistes sur le climat. D’un côté, ils augmentent la concentration d’ozone (O3) – puissant gaz à effet de serre – aux altitudes de croisière (10-12 km). De l’autre, ils réduisent la durée de vie d’un autre gaz à effet de serre: le méthane (CH4). Le hic, c’est que ces effets opposés ne s’annulent pas: l’impact délétère de l’ozone sur le climat est loin d’être compensé par la disparition accélérée du méthane.
Traînées de condensation. Ces traces blanches rectilignes de vapeur d’eau qui persistent dans le ciel après le passage des avions ont aussi un double effet antagoniste sur le climat. Elles agissent comme un «miroir», en réfléchissant une partie de la lumière solaire qui entre dans l’atmosphère, mais également comme «couvercle», en empêchant une partie du rayonnement infrarouge (chaleur) émis par la surface terrestre de s’échapper vers l’espace (effet de serre). Ici aussi, la balance penche vers un réchauffement de l’atmosphère. Notons aussi que les vols de nuit sont pires pour le climat que les vols en journée, puisque l’effet «miroir» est inopérant la nuit et ne peut donc pas atténuer l’effet «couvercle».
Cirrus. La vapeur d’eau et les aérosols (particules en suspension dans l’air) émis par les avions peuvent modifier la quantité et les propriétés des cirrus, ces nuages filamenteux blancs formés de cristaux de glace à haute altitude (6 à 12 km) et qui ont un effet de serre important. C’est particulièrement le cas dans les régions où le trafic aérien est dense, comme le Benelux. Si l’air dans lequel l’avion évolue est saturé de vapeur d’eau, les traînées de condensation peuvent persister plusieurs heures et s’étaler. Si bien que l’on ne peut plus les distinguer des cirrus naturels. L’ampleur exacte de ce phénomène sur le climat reste mal connue.
vendredi 9 mai 2008
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Ne tournons plus autour du pot... |
Regardons les chiffres en face. Les émissions de gaz à effet de serre dues au transport routier ont augmenté de 26% entre 1990 et 2005, alors que durant cette même période de grands secteurs économiques comme ceux de l’industrie et de l’énergie ont réduit les leurs. Si le transport n’avait décollé ainsi, il y a des années que l’Union européenne (UE) aurait atteint l’objectif de Kyoto. Le secteur du transport est aujourd’hui responsable de 20% des émissions de gaz à effet de serre d’origine humaine dans l’UE, dont une grosse moitié (12%) est due aux voitures particulières.
En attendant qu’une véritable politique de mobilité intégrée voie le jour, comment donc orienter le marché vers les véhicules peu gourmands en carburant? En jouant notamment sur la fiscalité «verte» et en renforçant l’information aux consommateurs, avance-t-on souvent. Or justement sur ce second point, et vu l’urgence climatique, ne serait-il pas particulièrement opportun que la législation existante qui régit les mentions environnementales sur les publicités automobiles soit – enfin – respectée, et que les contrevenants soient sévèrement sanctionnés?
Des infos «précises, utiles et comparables»
L’objectif de cette directive européenne, proposée il y a bientôt 10 ans par la Commission et adoptée fin 1999 par le Parlement et le Conseil, est très clair. Que dit le texte? «Que l’information joue un rôle décisif dans le fonctionnement des forces du marché; que la fourniture d’informations précises, utiles et comparables sur la consommation de carburant et les émissions de CO2 spécifiques des voitures particulières est susceptible d’orienter le choix des consommateurs vers les voitures qui consomment moins de carburant et qui dégagent, par conséquent, moins de CO2, incitant ainsi les constructeurs à prendre des mesures en vue de réduire la consommation de carburant des voitures qu’ils fabriquent» (Directive 1999/94/CE, préambule, point 5).
S’ils affichaient clairement ces deux valeurs «précises, utiles et comparables» sur leurs publicités, pas de doute que les constructeurs ajusteraient leur stratégie marketing. Et leur production. Le rutilant 4x4 ou la grosse cylindrée qui engloutit 10 litres aux 100 km ne tiendrait plus le haut du pavé publicitaire. Or aujourd’hui, force est de constater que la pub tire le marché automobile vers le haut – la seule étude d’envergure disponible sur le sujet est éloquente à cet égard. Non, si la loi était respectée, on assisterait au contraire à une guerre «éconologique» entre constructeurs, une course poursuite commerciale sur le boulevard technologique, voie royale menant vers des véhicules moins énergivores et moins polluants.
90% des acheteurs jaugent la conso
Contrairement à ce que d’aucuns affirment, la consommation de carburant est un critère important lors de l’achat d’un nouveau véhicule – et il le sera de plus en plus avec la flambée permanente des prix pétroliers. Une étude récente réalisée en France montre en effet que 90% des automobilistes accordent une attention «importante» ou «très importante» à la soif de pétrole d’une voiture susceptible de s’attirer leurs faveurs. Un critère qui se classe en quatrième position sur l’échelle des priorités, juste après la sécurité, la fiabilité et le prix de vente.
Lire les suites de la campagne AdvertiseCO2.eu dans le numéro de mai d'Imagine.
mardi 29 avril 2008
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Feedburner est-il fiable? |
lundi 28 avril 2008
mercredi 5 mars 2008
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Les pubs pour autos seraient illégales en Europe |
Des ONG belges et européennes lancent une campagne internationale pour inciter les citoyens à porter plainte en masse contre les publicités pour voitures. Objectif: que la consommation de carburant et les émissions de CO2 des véhicules soient enfin mentionnées en grands caractères. Comme le prévoit une directive européenne que personne n’avait remarquée jusqu’ici.
La quasi-totalité des publicités pour voitures diffusées en Belgique et en Europe, dans les journaux, les magazines et sur les panneaux d’affichage, ne respecteraient pas la directive 1999/94/CE relative à la «disponibilité d’informations sur la consommation de carburant et les émissions de CO2». Pierre Ozer, chercheur au Département des sciences et gestion de l’environnement à l’université de Liège, en est convaincu.
Il se réfère à l’arrêté royal du 5 septembre 2001 qui transpose la directive en droit belge, lequel précise que la consommation et les émissions de CO2 d’un véhicule «doivent être facilement lisibles et au moins aussi visibles que la partie principale des informations figurant dans la [publicité]». Or, estime le chercheur, ce n’est pas le cas, les émissions étant systématiquement mentionnées en tout petits caractères. Il a donc porté plainte, à titre privé, contre une quinzaine de pubs auprès du Jury d’éthique publicitaire (JEP), l’organe d’autorégulation belge du secteur, ainsi qu’auprès de la Direction générale Contrôle et Médiation du SPF Economie.
Une ONG en justice?
Mais ces plaintes pourraient bien n’être qu’une mise en bouche avant une véritable action en justice. Le nœud du problème se trouve en effet dans l’interprétation de «facilement lisibles» et de «partie principale des informations», deux notions non définies par le législateur. «Ce serait à un juge de trancher, mais dans la pratique il me semble qu’il y a peu de marge pour l’interprétation, estime Me Alain Lebrun, un des deux seuls avocats spécialisés en droit de l’environnement reconnus par l’Ordre des barreaux francophones de Belgique. Sur une affiche, c’est facile: l’information principale, c’est le slogan. Et donc les émissions de CO2 devraient être mises sur le même pied graphique que celui-ci. Elles devraient “sauter aux yeux”, en quelque sorte.»
Me Jean-Marc Rigaux, lui aussi spécialisé en droit de l’environnement, estime «jouable» une action en justice fondée sur l’argumentation de M. Ozer. Mais selon les deux experts, un citoyen lambda ne pourrait pas faire respecter cet arrêté devant un tribunal. «Il faudrait qu’il démontre qu’il subit un préjudice direct à cause des émissions de CO2 émises spécifiquement par les voitures», explique Me Rigaux. Ce qui est impossible.
Par contre, une ONG pourrait facilement invoquer la loi du 12 janvier 1993, estiment les avocats. «Cette loi permet à une ASBL environnementale d’intenter une “action en cessation” contre l’auteur d’une violation d’une législation visant à protéger l’environnement, explique Me Lebrun. C’est le cas ici: on peut considérer que l’affichage obligatoire des émissions de CO2 est une norme de police économique à portée environnementale.»
L’Etat en ligne de mire
L’action en cessation s’entreprend devant le tribunal des référés. Elle est rapide (trois à huit jours) et expose le contrevenant à des astreintes s’il ne met pas fin au comportement délictueux. En cas de condamnation, un constructeur pourrait être contraint de retirer toutes ses affiches ou de coller sur chacune d’elles un «complément» précisant les émissions de CO2 en plus grands caractères…
Une ONG pourrait également décider de poursuivre l’Etat belge. L’article 11 de l’AR du 5 septembre 2001 précise en effet que «les fonctionnaires et agents désignés par le Ministre qui a les Affaires économiques dans ses attributions sont désignés pour rechercher et constater les infractions». Or, en six ans, aucun procès-verbal n’a jamais été dressé…
Ce même laxisme pourrait aussi valoir à l’Etat une plainte auprès de la Commission, ajoute Me Rigaux. «Là, un citoyen seul ou une ONG pourrait agir contre n’importe quel Etat membre. Si la Commission estime la plainte recevable, elle la transmettra à la Cour de justice des communautés européennes à Luxembourg.»
Porter plainte en cinq minutes
Pour l’heure, une coalition d’associations européennes vient de lancer une campagne invitant un maximum de citoyens à emboîter le pas au chercheur liégeois. «Sa démarche est simple et reproductible “à l’infini” puisque presque 100% des publicités pour autos seraient en infraction», explique Jeroen Verhoeven des Amis de la Terre Europe.
«Il suffit de prendre une photo de chaque pub parue dans la presse ou affichée dans la rue, puis d’envoyer la plainte via le site web de la campagne, ajoute Sophie Bronchart d’Inter-environnement Wallonie. L’argumentation juridique est fournie, cela ne coûte rien et peut se faire en quelques minutes.»
Les ONG s’engagent de leur côté à assurer à ces plaintes des suites politiques voire judiciaires, tant à l’échelle belge qu’européenne...
David Leloup
Article exclusif publié dans le numéro de mars du magazine belge Imagine demain le monde. S’il vous a plu, merci de bien vouloir envisager d’acheter le magazine en version papier ou électronique (PDF), voire de vous y abonner. La presse indépendante ne vit que grâce à ceux qui la soutiennent.
UPDATE 06/03:
Le quotidien belge La Libre Belgique de ce jeudi 6 mars reprend l’information en manchette.
mardi 4 mars 2008
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La pub auto en sursis? |
Dans son édition de mars, le magazine Imagine publie, pour la première fois, ce à quoi pourraient bien ressembler les publicités automobiles d’ici peu. Sur le quatrième de couverture du bimestriel belge, cette vraie fausse pub mettant en scène le très symbolique 4x4 du président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, n’est en fait que la traduction graphique des propositions en matière de publicité automobile adoptées à une large majorité par... le Parlement européen, à Strasbourg fin octobre 2007.
Dans le rapport Davies, qui apporte le son de cloche du Parlement sur la stratégie de réduction des émissions de CO2 des voitures, les eurodéputés se sont clairement prononcés pour «qu’un pourcentage minimum de 20% de l’espace [publicitaire soit] réservé à des informations relatives à la consommation d’énergie et aux émissions de CO2». L’hémicycle européen considère que «les dispositions législatives exigeant l’apposition de mises en garde sanitaires sur les paquets de cigarettes constituent un bon exemple» à suivre, et voit «le format A-G utilisé pour comparer l’efficacité énergétique de certains produits électriques comme un modèle». Il suggère en outre «l’introduction d’un code de la publicité contraignant interdisant les allégations écologiques trompeuses».
Le rapport Davies n’est qu’une résolution du Parlement: il n’a pas de valeur contraignante. Mais il devrait servir de feuille de route pour amender la directive 1999/94/CE dont le processus de révision vient de débuter. En vertu du principe de codécision, le Parlement aura en effet le dernier mot (avec le Conseil des ministres) dans ce dossier, ainsi que dans celui de la nouvelle législation «voiture et CO2» déposée sur la table par la Commission fin décembre 2007. Ce projet de règlement, en cours d'élaboration, fait l'objet depuis ses tout débuts d'un lobbying industriel ayant rarement atteint de tels sommets. Outre les constructeurs, le lobby des agences de pub et celui des... éditeurs de journaux – eh oui! – ont commencé leur travail de sape en coulisses.
En 2006, l’industrie automobile a dépensé près de 6 milliards d’euros en publicité rien qu’en Europe de l’ouest (1), dont 208 millions en Belgique. Les mesures fracassantes du Parlement européen relatives à la pub auto n’ont pas fait l’objet d’une seule ligne dans les journaux belges et français (2).
(1) Dans neuf pays: Belgique (208 millions d’euros), France (1595 M€), Allemagne (1300 M€), Italie (809 M€), Pays-Bas (253 M€), Espagne (569 M€), Suède (229 M€), Suisse (193 M€) et Royaume-Uni (805 M€). En Belgique, les 208 millions se ventilent comme suit: 83 M€ en presse écrite; 52 M€ en télé; 44,5 M€ en affichage urbain; 24,5 M€ en radio; et 4 M€ en cinéma (source: European Association of Communications Agencies).
(2) Recherche effectuée sur PressBanking.be et Internet entre le 20 et le 31 octobre 2007, notamment sur les titres suivants: La Libre Belgique, Le Soir, L'Echo, Vers l'Avenir, Le Vif/L'Express, Trends-Tendances, Cash, Knack, Bizz, Le Monde, Les Echos, Libération, Le Nouvel Observateur.
mardi 15 janvier 2008
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Le double discours des constructeurs |
A ma gauche, les discours écolos des constructeurs automobiles qui, pour peu, jureraient la main sur le cœur qu’ils œuvrent à sauver le climat. A ma droite, les pubs qu’ils placent quotidiennement dans les médias. Entre les deux, Pierre Ozer, chercheur au département des sciences et gestion de l’environnement à l’université de Liège. En cette période de Salon de l'auto «écologique», le valeureux chercheur a voulu savoir si ces deux discours étaient cohérents. Pour ce faire, il a passé au peigne fin toutes les éditions parues en 2006 des quotidiens Le Soir et La Libre Belgique, et des hebdos Le Vif/L’Express et Trends-Tendances. Armé d’une bonne loupe, notre scientifique a scrupuleusement relevé les émissions de CO2 (cycle mixte) des véhicules vantés dans chacune des pubs. Objectif: comparer sur une année complète l’offre publicitaire des constructeurs (bâtonnets rouges sur le graphique) avec la demande réelle des automobilistes selon les chiffres de vente officiels de la FEBIAC (bâtonnets bleus), le tout en classant les véhicules en six catégories d’émission de CO2.Les résultats, tous médias confondus, sont éloquents: la pub automobile tire clairement le marché vers le moins-disant environnemental puisque 80% des annonces chantent les louanges de bolides dont les émissions sont supérieures à la moyenne européenne (160 g de CO2/km en 2006). Alors qu’une voiture vendue sur dix émet moins de 120 g de CO2/km, seule une publicité sur... 400 promeut ce type de véhicules! A l’inverse, les engins qui «crachent» au moins 1 kg de CO2 tous les 4 km ne représentent que 1,4% des ventes... mais près de 15% des pubs passées dans les journaux analysés!
Brève parue dans le bimestriel Imagine (janvier 2008), disponible dans toutes les bonnes librairies.
dimanche 2 décembre 2007
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La saison des casseroles |
La fin de l’année et son cortège de bilans en tout genre approchent à grand pas. Aussi, des deux côtés de l’Atlantique, plusieurs ONG soucieuses d’éthique et de transparence démocratiques organisent-elles un scrutin. Son but? Désigner les pires personnalités, lobbies ou institutions dont les activités en 2007 ont visé à influencer l’opinion publique ou les décideurs politiques au bénéfice d’intérêts strictement particuliers. Bref, à pervertir discrètement la démocratie.
Ainsi, sur le Vieux Continent, le Prix du Pire lobbying de l’Union européenne 2007 sera décerné par quatre ONG internationales (1) ce mardi 4 décembre à Bruxelles (dès 18h30 au bar du Botanique, pour les curieux). En lice, une éminente personnalité belge et européenne, qui a des allures de favori: le vicomte Etienne Davignon. Son tort? Etre l’un des conseillers spéciaux du commissaire Louis Michel sur «le rôle du secteur privé dans le développement économique de l'Afrique subsaharienne», alors même qu’il est actionnaire (pour plus de 350.000 euros) et membre du conseil d’administration de Suez, une multinationale qui cherche à développer de nouveaux marchés énergétiques notamment... en Afrique subsaharienne (dixit son Rapport annuel 2006, pages 54 et 69). Conflit d’intérêt? La Commission s’en est défendue. Mais n’a guère convaincu...
Les challengers de l’ex-vice président de la Commission sont le trio BMW-Daimler-Porsche (qui cherche par tous les moyens, et avec succès jusqu'ici, à repousser des mesures contraignantes sur les émissions moyennes de CO2 des nouvelles voitures commercialisées en Europe), le pétrolier espagnol Repsol (qui a poussé Bruxelles à promouvoir largement les agrocarburants industriels), l’Association européenne des cabinets de conseil en affaires publiques (EPACA) et l’agence bruxelloise de lobbying Cabinet Stewart (qui luttent toutes deux activement contre un projet de législation visant à rendre transparent le lobbying européen à Bruxelles).
Un second prix, celui du pire «écoblanchiment» (néologisme québécois pour traduire greenwashing), couronnera le champion 2007 de l’hypocrisie écologique. Les nominés? Les pétroliers ExxonMobil (Esso) et Shell (pour des pubs mensongères avérées), le géant britannique de l’armement BAE Systems (pour la promotion de ses «balles écologiques sans plomb»), Airbus (pour son A380 «propre» et «écologique») et le lobby allemand de l’industrie atomique (qui se présente comme le «protecteur du climat» dans la presse teutonne). Tous ont été conviés à venir dire un mot sur scène en cas de victoire lors de la cérémonie...
Aux Etats-Unis, c’est le Center for Media and Democracy, une association auscultant depuis des années le «monde trouble des relations publiques», qui décernera très prochainement ses Falsies Awards 2007. Littéralement, le terme falsies désigne des prothèses mammaires. Une image pour qualifier tous ceux qui cherchent à se faire passer pour ce qu’ils ne sont pas. Comme la Clean and Safe Energy Coalition (qui, sous couvert d’écologie, fait la promo de l’atome en ayant recruté un cofondateur de Greenpeace qui a retourné sa veste), les entreprises qui ont trafiqué Wikipedia (décelables grâce au génialissime WikiScanner), le lobby du lait en poudre pour bébés et le géant pharmaceutique Merck (qui tous deux financent de fausses associations citoyennes faisant la promo de leurs produits) ou encore Philip A. Cooney (le lobbyiste de l’industrie pétrolière engagé par la Maison blanche et qui a réécrit des rapports officiels sur le réchauffement climatique)...
Pas de doute, la saison des casseroles est ouverte!
(1) Le bureau européen des Amis de la Terre, l’association anglaise SpinWatch, l’allemande LobbyControl et la batave Corporate Europe Observatory, pour laquelle j’ai l’honneur tout récent de mener quelques travaux de recherche.
mardi 13 novembre 2007
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Le 4e pouvoir dans les cordes |
«Merci à Clearstream, à la BGL et à Fortis, merci à la Menatep, à Nicolas Sarkozy et à Dominique de Villepin, aux plaintes et aux embarras judiciaires que chacun m’occasionne. Sans eux, nous ne ferions pas ce genre de soirée.» Denis Robert manie bien sûr l’ironie. Mais il est heureux, aussi. Samedi 10 novembre, la salle de la Passerelle à Florange, près de Metz, était comble. La soirée, organisée par son comité de soutien, visait à récolter des fonds pour aider l’ex-journaliste à couvrir ses frais de justice consécutifs au tsunami de poursuites judiciaires dont il fait l’objet depuis des années.
Sans relâche. «Alors que nous venons de gagner au Luxembourg deux procès montés par la BGL et le groupe Fortis, six (nouvelles) lettres recommandées viennent d’arriver à la maison qui m’annoncent que mes adversaires, Fortis en l’occurrence, viennent de me réassigner en France sur la base de plaintes quasi identiques à celles déposées au Luxembourg (toujours diffamation), écrivait samedi matin l’auteur de Révélation$ et La boîte noire. Une nouvelle preuve que ces empaffés ne me lâcheront jamais la grappe. Une nouvelle preuve que j’ai dû toucher là où ça (leur) fait mal.»
Guy Bedos, tête d’affiche de la soirée, a regretté l’absence des «plus grands éditorialistes de la presse dite libre, de gauche, parce que c’est un scandale ce qui arrive là à [Denis Robert], il a fait son métier».
En décembre 2006, l’association Reporters sans frontières avait déjà condamné la «multiplication des poursuites à l’encontre de Denis Robert dans le cadre de l’"affaire Clearstream"», un «"matraquage" [qui] témoigne d’une volonté de le réduire au silence.» A ce jour, 459 journalistes seulement, parmi lesquels Florence Aubenas, Bernard Langlois, Paul Moreira, John Paul Lepers ou Denis Delbecq, ont envoyé un scan de leur carte de presse en soutien à Denis Robert. Parmi eux, seulement trois Belges...
La Fédération européenne des journalistes (FEJ), qui représente plus de 250.000 journalistes dans plus de 30 pays, manifestait le lundi 5 novembre un peu partout en Europe contre les «pressions économiques et politiques, la marchandisation de l’information, l’autocensure, la précarité et le non respect du principe de protection des sources». Pour faire passer ce message, la FEJ, l’AJP et son pendant néerlandophone, la VVJ, avaient même réalisé un chouette pastiche de tabloïde.
Cela n’aura pas suffit. Selon PressBanking, Le Soir est le seul média de presse écrite belge francophone (1) à s’être fendu d’un papier dans son édition du lendemain (373 mots en page 38).
Du côté des partis politiques, ni le PS, ni Ecolo, ni le CDH n’ont soutenu cette action par voie de communiqué. Il fallait lorgner à droite, du côté de l’avenue de la Toison d’or, pour trouver une news solidaire avec les revendications de la FEJ...
Ironie du sort, ce même 5 novembre, en France, le quotidien économique Les Echos était racheté par Bernard Arnault, PDG du groupe LVMH, première fortune de France et septième de la planète.
(1) Recherche effectuée entre le 1/11 et le 12/11 sur les quotidiens et hebdomadaires suivants: Vers l’Avenir - toutes éditions, Le Courrier, Le Soir, La Dernière Heure, L’Echo-Actualités (2007), Le Jour Liège, Le Vif/L’Express, La Libre Belgique, La Tribune de Bruxelles, L’Avenir du Luxembourg, Le Jour Verviers, Trends/Tendances, Le Jour Huy-Waremme, Vers l’Avenir Brabant Wallon, Le Courrier de l’Escaut, Vers L’Avenir - Namur, La Nouvelle Gazette - La Province (archives), La Meuse - La Lanterne (archives), Grenz Echo, Cash NL, Nouvelles Graphiques, Knack Internetpoket, Knack Multimedia, Knack Gezondheid, Le Vif/L’express Weekend, De Huisarts, Guide de poche Internet, Knack Boeken, Le Journal des Enfants, Cash Personal Finance NL, Nest FR, Knack Focus, Le Vif Multimedia, Plus NL, Cash FR, Cash Personal Finance FR, Cash Beleggersalmanak, E-Tendances, Knack Weekend, Plus FR, SBJ Finance, Industrie NL, BIZZ FR, BIZZ NL, Knack, Cash Almanach de l’investisseur, Semper FR, Sports FR, Le Généraliste, Dotgov FR, Le Vif/L’express Santé, E-Trends, Dotgov NL, Trends, Semper NL, Business in Meeting, Coup d’oeil, Industrie FR, Nest NL, Grafisch Nieuws, Sports NL.
vendredi 7 septembre 2007
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Inquiétudes autour du WiFi |
Il permet de surfer sans fil sur Internet et même, depuis peu, de téléphoner. En plein essor dans le monde, il s’invite même dans les écoles. «Il», c’est le WiFi. Et comme aucune étude scientifique ne prouve son innocuité, il relance le débat sur l’impact potentiel des champs électromagnétiques sur la santé.
Surfer sans fil sur Internet confortablement assis dans son canapé, son jardin, à la terrasse d’un café ou dans un aéroport: voilà la prouesse technologique que permettent les réseaux WiFi. Très pratiques et moins chers que leurs homologues câblés, ces réseaux qui exploitent les ondes hertziennes pour transmettre de l’information numérisée sont en plein essor à l’échelle planétaire. La ville de Singapour est déjà entièrement «wifisée» et plusieurs autres (Amsterdam, Paris, San Francisco, Chicago...) ont l’intention de le devenir pour combler la «fracture numérique».
En Belgique, on n’en est pas encore là. Le plus grand réseau sans fil gratuit – 78 antennes sur le campus de la Plaine (ULB et VUB) à Bruxelles – ne fait encore que 0,5 km². Mais le WiFi est déjà très présent chez les particuliers. Au sud du pays, plus d’une connexion Internet sur trois est de ce type et 18% de tous les ménages possèdent une antenne WiFi sous leur toit, d’après l’Agence wallonne des télécommunications (AWT). Comme une antenne émet jusqu’à 30 mètres environ dans toutes les directions, il est plausible que plus de la moitié de la population belge se trouve aujourd’hui sous l’influence régulière des ondes WiFi.
L’Angleterre en émoi
Jusqu’ici, c’était essentiellement la nocivité potentielle des GSM et des antennes relais de téléphonie mobile qui posait question. Le débat s’élargit désormais aux réseaux WiFi. En Angleterre, un syndicat d’enseignants a ainsi réclamé fin avril au ministre de l’Enseignement britannique «une étude scientifique complète sur les effets sanitaires des réseaux WiFi dans les écoles, tant sur les élèves que les professeurs». Des associations de parents ont embrayé, réclamant le démantèlement des réseaux WiFi scolaires.
Fin mai, la BBC enfonçait le clou en révélant, dans une enquête qui a fait couler beaucoup d’encre, que l’intensité des champs électromagnétiques (CEM) présents dans une classe «wifisée» était en moyenne trois fois plus grande que celle des CEM émis par une antenne relais de téléphonie mobile à 100 mètres, et en diffusant le témoignage du directeur de l’Agence de protection sanitaire du Royaume Uni incitant à la prudence. Il est vrai qu’outre-Manche, le WiFi se retrouve dans plus d’une école primaire sur deux et dans quelque 70% des établissements secondaires...
En Belgique, par contre, aucun chiffre officiel n’existe sur la proportion d’écoles «wifisées», mais il est probablement très faible. En effet, les connexions Internet fournies par les pouvoirs publics aux établissements scolaires sont câblées par défaut. L’installation éventuelle du WiFi se fait exclusivement à l’initiative des directeurs d’école, nous explique-t-on à l’AWT et au Centre d’informatique pour la Région bruxelloise (CIRB).
Les enfants physiquement plus vulnérables
Sur le plan scientifique, le flou règne. Il n’existe aucune étude épidémiologique sur d’éventuels effets néfastes du WiFi. Et quand bien même, on manque de recul. «Il faut savoir qu’il existe un certain nombre d’effets potentiels à long terme qu’il ne sera pas possible de détecter avant 2015 au plus tôt», commente André Vander Vorst, professeur émérite à la faculté des sciences appliquées de l’université catholique de Louvain et membre du Conseil fédéral de santé et d’hygiène (CSH). Face au boom actuel des technologies sans fil (lire encadré ci-dessous), ce spécialiste des CEM estime qu’avec le WiFi comme avec le banal téléphone sans fil DECT, hyper répandu mais beaucoup moins médiatisé, «on manque grandement de prudence car on ne fait jamais qu’augmenter le niveau global des émissions dans la même bande de fréquences – les micro-ondes – dont les effets biologiques, au premier ordre, sont similaires quelle que soit la fréquence.»
Si la «fronde anti-WiFi» a embrasé les écoles anglaises, c’est aussi parce que des enfants sont concernés au premier chef. Ils passent environ sept heures par jour en classe et seront plus exposés à des CEM au cours de leur vie que n’importe quelle autre génération qui les a précédés. «Il existe de bonnes raisons de penser que les cellules jeunes sont plus sensibles aux CEM que les cellules adultes, explique André Vander Vorst. On sait par ailleurs qu’une épaisseur d’environ 5 cm de corps humain est nécessaire pour “blinder” nos organes internes contre les CEM diffusés par un GSM émettant à 900 MHz. Si l’on considère un torse d’adulte de 40 cm de diamètre, les 30 cm à l’intérieur du torse seront donc protégés. Dans le cas d’un torse d’enfant de 20 cm de section, seuls 10 cm seront isolés. Leurs organes internes sont donc plus exposés que les nôtres.»
Inquiétudes de Salzbourg à San Francisco
Le Royaume Uni n’a pas le monopole de la méfiance à l’égard du WiFi. En Autriche, le Département de santé publique du land de Salzbourg recommande officiellement, depuis décembre 2005, «de ne pas installer de réseau WiFi et DECT dans les écoles et les crèches», au nom du principe de précaution. Car selon le Dr Gerd Oberfeld, à la tête de ce département, les premiers résultats d’études empiriques réalisées sur des personnes sensibles montrent que «les symptômes observés jusqu’ici sont les mêmes que ceux observés dans les études réalisées sur les antennes relais de téléphonie mobile: maux de tête, difficultés de concentration, nervosité, problèmes de mémoire, etc.»
Au Canada, le recteur de l’université de Lakehead (Ontario) a mis un frein à l’essor du WiFi sur le campus en février 2006, histoire de protéger les 15.000 étudiants sous sa tutelle d’éventuels risques à long terme. En Allemagne, soucieuse de ne pas réaliser une «expérimentation humaine à grande échelle», la responsable des services chargés de l’enseignement à Francfort a interdit, en juin 2006, le WiFi dans toutes les écoles «tant que l’innocuité des communications sans fil n’aura pas été démontrée». Cet été, c’est carrément le gouvernement allemand qui a recommandé «de préférer autant que possible l’utilisation de solutions câblées traditionnelles plutôt que de connexions sans fil». A San Francisco, des groupes de riverains s’opposent actuellement au projet du maire et de Google qui souhaitent «wifiser» la ville au moyen de 2.200 nouvelles antennes. Et en France, le CRIIREM (Centre de recherche et d’information indépendantes sur les rayonnements électromagnétiques) s’est inquiété, juste avant l’été, du boom commercial des nouveaux téléphones portables «hybrides», capables de conjuguer les signaux GSM et WiFi et donc de passer d’un réseau à l’autre sans rupture de conversation.
Craintes fondées ou largement exagérées? Quoi qu’il en soit, il semble que, si les inquiétudes concernant les ondes GSM devaient un jour être confirmées, les autres technologies comme le WiFi, le WiMAX, l’UMTS et le DECT devront être balisées avec la même sévérité. Il va cependant falloir s’y résoudre: seul le temps qui passe nous donnera la réponse... D.L.
Ces ondes qui font débat GSM. Téléphonie mobile de 2e génération (2G). Fréquence: 900 et 1800 MHz (dualband). DECT. Téléphonie sans-fil numérique pour les entreprises et les particuliers. Portée: environ 30 m à l’intérieur, jusqu’à 300 m en champ libre. Fréquence: 1900 MHz. UMTS. Téléphonie mobile de 3e génération (3G) à haut débit. Permet de transmettre de la vidéo. Fréquence: 2100 MHz. WiFi. Accès sans fil à Internet, à la maison ou dans des «hotspots» (points d’accès publics dans les gares, aéroports, hôtels…). Portée: quelques dizaines de mètres. Fréquence: 2400 MHz. WiMAX. «Grand frère» du WiFi, le WiMAX permet des connexions Internet à très haut débit par voie hertzienne. Portée: plusieurs km. Fréquence: 3500 MHz. Les fréquences utilisées par ces différentes technologies appartiennent toutes à la famille des micro-ondes (qui s’étend grosso modo de 900 à 300 000 MHz). Pour André Vander Vorst, «il n’existe a priori aucune raison scientifique de penser que ces différentes fréquences peuvent avoir des effets distincts sur le vivant. Une variation de fréquence d’un facteur 2 ou 3 ne change pas grand chose. Par exemple, les fours à micro-ondes industriels qui cuisent le pain fonctionnent à 430 MHz ou à 960 MHz, alors que la norme pour les micro-ondes domestiques est fixée à 2450 MHz». Ce qui compte avant tout, ce n’est pas la fréquence mais l’intensité cumulée de ces champs électromagnétiques sur le long terme. Or la norme fédérale en vigueur, jugée trop laxiste par le CSH (qui en préconise une 50 fois plus sévère...), repose sur l’exposition aiguë, pendant 30 minutes, d’un adulte en bonne santé. Cette norme ne protège que contre l’échauffement des tissus. Tout autre effet biologique est donc de facto ignoré... D.L. |

mardi 7 août 2007
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«Tu seras une sorte de Duhamel populiste» |
Lu dans la dernière édition du Plan B, bimestriel français de critique (féroce) des médias, ce courriel de Laurent Joffrin envoyé il y a quelques mois à Pierre Marcelle. Le premier est directeur de publication et PDG de Libération depuis novembre 2006, le second y est journaliste et chroniqueur depuis 1988. Sa chronique, quotidienne jusque fin 2006, est devenue hebdomadaire début 2007.
Obtenu de «source syndicale», ce document sociologique en dit long sur les relations de pouvoir au sein de la rédaction depuis l’arrivée de Joffrin, sur le saupoudrage cynique des différentes tendances de la gauche plébiscitées par le quotidien et, plus généralement, sur la marge de manœuvre des journalistes sous l’ère Rothschild:Date: 19 janvier 2007
Subject: Ce que nous évoquions samedi
Mon cher Pierre,
Comme je te l’ai dit, ta décision de rester au journal m’a surpris. Il n’est pas en mon pouvoir de l’empêcher, d’autant qu’un calcul réaliste m’incite à ménager cette partie du public. Mais ce maintien en poste – cette «reddition», comme tu dis – doit être assortie des conditions que nous avons définies.
1) Le contenu de ta chronique est soumis par nature à la relecture du chef de service quelle qu’elle soit... Elle a droit de correction plein et entier, qu’il s’agisse ou non de censure. J’arbitrerai en cas de besoin.
2) Elle ne peut occuper une place supérieure en visibilité et en aura que celle de Schneidermann ou de Duhamel. Tu seras une sorte de Duhamel populiste... Il en faut. Mais pas plus, comme nous en sommes convenus. En tout état de cause, c’est la responsable des pages «Rebonds» qui doit trancher sous mon autorité. Un cours nouveau s’instaure à Libération: le temps de l’autogestion est terminé.
Bien sûr, si ces conditions te paraissent insupportables ou draconiennes, le guichet est ouvert. Tel est mon avis, qui correspond à celui de la hiérarchie et de la partie raisonnable du journal...
Amicalement,
Laurent
Le «guichet» évoqué par Joffrin est le guichet de départ pour quitter le journal, dont Marcelle n’a pas souhaité profiter fin 2006...
Le 19 juin 2007, sa chronique «Smoking» était amputée de quelque 1650 signes. Ce passage rouspétait gentiment, mais légitimement, contre ce petit avis publié quelques jours plus tôt par Libération dans sa rubrique «Carnet», sans consultation préalable de la rédaction:L’équipe de Libération s’associe à la tristesse d’Edouard de Rothschild et de sa famille à l’occasion du décès du baron Guy de Rothschild.
Guy de Rothschild avait 98 ans. Il était le père d’Edouard de Rothschild, l’actionnaire dit «de référence» de Libération, qui détient près de 39% du capital.