dimanche 12 mai 2019

Michèle Lempereur, Belle-Amie

Photo: Johanna de Tessières

En tâtonnant sur la crête séparant business et politique, la compagne du bourgmestre de Liège joue-t-elle avec le feu ? Veuve de Guy Mathot, Michèle Lempereur a croisé la route de Bernard Wesphael et vit depuis dix ans avec Willy Demeyer. Une liaison dangereuse ?


Par Joël Matriche et David Leloup (Wilfried, mars 2018)

La chanson qui, à l’automne 1999, ouvre le bal du bourgmestre de Seraing est taillée sur mesure pour Guy Mathot (PS) et celle qui se balance à son bras au milieu de centaines d’invités. Interprétée par Sinatra, My Way met en rimes les pensées d’un quinquagénaire qui se satisfait d’une vie pleine et entière, avec son flot de doutes et de regrets. D’une vie « vécue à ma façon ».

Accrochée donc à celui qui fut ministre régional et fédéral, vice-Premier même aux côtés de Martens puis de Marc Eyskens, sénateur, député et bourgmestre aussi, inculpé puis absout, sa seconde épouse : Michèle Camille Anny Lempereur, née le 16 avril 1961 à Ougrée, actuelle compagne du bourgmestre de Liège, Willy Demeyer (PS). Ces images, capturées par l’équipe de Strip-Tease, sont vraisemblablement les premières images filmées de Michèle Lempereur et Guy Mathot.

(...)


En janvier 2006, elle rencontre l’écologiste Bernard Wesphael aux vœux de la télévision locale RTC-Télé Liège. Chef de groupe au Parlement wallon, il est à l’apogée de sa carrière politique. Lors de cette soirée mondaine, il déclare sa flamme à la veuve de Guy Mathot. Un inattendu dévoilement suivi d’une invitation au restaurant. C’est le début d’une idylle clandestine qui aurait duré 13 mois. Plusieurs fois par semaine, en soirée, le break BMW Série 3 noir du député est aperçu rue Curie à Seraing, devant le domicile de Michèle Lempereur. « C’était un secret de Polichinelle », lâche un proche de Bernard Wesphael, ce dernier n’ayant pas souhaité se confier à Wilfried. « Bernard a beaucoup souffert de cette clandestinité et c’est la raison pour laquelle ils se sont séparés au printemps 2007. Il a gardé le sentiment qu’il n’était pas assez riche et puissant à ses yeux pour qu’elle daigne s’afficher publiquement à son bras. » Malgré plusieurs témoignages concordants, Michèle Lempereur dément : « Nous avons mangé plusieurs fois ensemble et il est venu à la maison, concède-t-elle. Mais nous n’avons jamais eu de relation. »

(...) 

Lire la suite sur le site de Wilfried, qui a publié ce portrait-enquête dans son numéro 3 paru au printemps 2018 (hormis le paragraphe concernant l’idylle clandestine avec le chef de groupe Ecolo au parlement wallon). En mai 2019, ce texte a reçu le Prix Belfius 2018 dans la catégorie presse locale. Soutenez Wilfried : abonnez-vous.

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mercredi 21 octobre 2015

Franco Dragone cinq jours sur le gril



Photo: Gus Estrella / Creative Commons BY-NC-SA 2.0

Le célèbre metteur en scène louviérois Franco Dragone sera interrogé sur ses montages offshore par les enquêteurs de l’OCRC dès ce jeudi, à Bruxelles, et ce durant cinq jours.

Depuis qu’il est convoqué pour se faire interroger par les enquêteurs qui le suspectent d’«infractions fiscales internationales graves et organisées» et de «blanchiment d’argent», Franco Dragone passe ses journées en compagnie de ses avocats. «Il ne fait plus que ça à temps plein», souffle-t-on à l’oreille de Médor.

Selon une source bien informée, l’interrogatoire de Franco Dragone, qui bénéficie, rappelons-le, de la présomption d’innocence, doit démarrer ce jeudi 22 octobre en matinée. Il aura lieu non pas à Mons, où le dossier est instruit par le juge Alain Blondiaux, mais à… Bruxelles. Il sera en effet réalisé par les limiers de l’Office central pour la répression de la corruption (OCRC), un service de la police fédérale en charge des «gros» dossiers complexes aux ramifications internationales. Ces policiers sont ceux de «Mons», en quelque sorte, rapatriés à Bruxelles depuis le démantèlement de la fameuse cellule Polfin de Jumet.

Pas moins de cinq journées d’audition sont programmées pour recueillir les explications du célèbre metteur en scène concernant les montages offshore de son groupe, créé en 2001 à La Louvière. Des îles Vierges britanniques au Luxembourg, en passant par la Suisse, la Hongrie et Madère, ces montages ont été réalisés principalement par le cabinet d’audit et de conseil Ernst & Young.
Une éventuelle inculpation pourrait survenir au cours, ou au terme, de cet interrogatoire-marathon, lequel devrait se terminer mercredi 28 octobre en fin de journée.
D.Lp.

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lundi 10 novembre 2014

La boîte aux lettres «luxo» de GSK qui valait 7 milliards

Avec l’aide de PricewaterhouseCoopers, le groupe GSK a utilisé un montage au Luxembourg, en 2010 et 2011, pour éviter de payer des impôts sur plus de 150 millions d’euros de bénéfice au Royaume-Uni. Une opération d’évasion fiscale supervisée par deux Belges, dont le directeur financier de GSK Biologicals. Et démantelée par le fisc de Sa Gracieuse Majesté.

On l’a vu, les profits générés par les ventes mondiales de vaccins contre la pandémie de grippe A/H1N1 ont transité par une «boîte noire» au Royaume-Uni, où interviennent au moins trois sociétés du groupe GSK. Si plus d’un milliard d’euros de royalties a bien été rétrocédé à GSK Biologicals en Belgique, où il n’a quasiment pas été taxé, une petite partie des profits générés par le Pandemrix est restée outre-Manche dans ces sociétés. Notamment dans Glaxo Group Ltd., qui a versé en 2010 d’importants dividendes à sa société-mère GSK Finance PLC.

Pour éviter qu’une partie des bénéfices de GSK Finance ne soient taxés à 28%, comme le code des impôts britannique le prévoit, GSK a utilisé un tour de passe-passe luxembourgeois imaginé par le géant de l’audit et du conseil PricewaterhouseCoopers (PwC). Ce dernier conseille à la fois GSK sur le plan fiscal, et certifie les comptes de ses filiales au Royaume-Uni comme au Luxembourg. Un conflit d’intérêts qui soulève bien des questions: on imagine en effet mal l’auditeur britannique PwC remettre en cause les montages du conseiller fiscal PwC au Luxembourg…

Un prêt purement artificiel

Et c’est exactement ce qui s’est passé. «Le montage en question est une arme classique dans l’arsenal des multinationales présentes en Europe», commente Richard Murphy, un expert-comptable britannique militant pour la justice fiscale au sein du Tax Justice Network. «Par le biais d’un prêt purement artificiel, on endette lourdement une société X, située dans un pays au taux d’imposition normal, comme le Royaume-Uni, pour qu’elle rembourse des montants d’intérêts faramineux à une société Y, située dans un paradis fiscal comme le Luxembourg». Ainsi, la société X déduit de sa base imposable les intérêts remboursés à Y, et donc ces intérêts échappent à l’impôt au Royaume-Uni. De son côté, Y récupère ces intérêts, qui sont des revenus très peu voire pas du tout taxés au Luxembourg.

Un tel montage a été mis en place par PwC en octobre 2009, au moment même où GSK commençait à livrer ses toutes premières doses de vaccins pandémiques aux gouvernements. Des documents internes de PwC obtenus par l’agence Premières Lignes pour l’émission Cash Investigation (France 2) indiquent qu’à cette époque, Setfirst Limited, la holding britannique qui détient 70% de la société belge GSK Biologicals, s’apprête à créer une société boîte aux lettres au Grand-Duché: GSK Holding (Luxembourg) Sàrl. C’est cette société qui octroiera un prêt trois mois plus tard à une autre holding britannique du groupe.

Deal express avec le fisc luxembourgeois

L’administration fiscale luxembourgeoise semble avoir été particulièrement diligente pour valider ce montage. Le 19 octobre, un fiscaliste de PwC rencontre le responsable du bureau 6 de l’impôt des sociétés au Grand-Duché, un certain Marius Kohl. Les deux hommes négocient les aspects fiscaux du montage et concluent un deal qui «servira de base pour la préparation des déclarations fiscales des sociétés luxembourgeoises concernées», selon un courrier de PwC consulté par Le Vif/L’Express.

Le 11 novembre, Marius Kohl confirme dans une lettre officielle à PwC que le montage est «en accord avec la législation fiscale et les pratiques administratives en vigueur» au Grand-Duché. En trois semaines seulement, l’affaire était conclue! GSK Holding (Luxembourg) Sàrl, la nouvelle filiale au cœur du montage, pouvait alors être créée devant notaire le 25 novembre.

154 millions taxés à 0,25%

Début 2010 , Setfirst injecte 2,5 milliards de livres sterling (3,2 milliards d’euros) dans le capital de cette nouvelle filiale. Dans la foulée, celle-ci prête la somme astronomique de 6,3 milliards de livres (7,2 milliards d’euros) à GSK Finance. Cette dernière versera en retour 124 millions de livres (154 millions d’euros) d’intérêts à GSK Holding (Luxembourg) pour l’année 2010. Autant de millions qui n’ont pas été taxés à 28% au Royaume-Uni...

Au Luxembourg par contre, PwC a négocié avec le fisc grand-ducal un deal très avantageux pour GSK: ces intérêts, qui sont des revenus pour GSK Holding (Luxembourg), seront taxés au taux ridiculement bas de… 0,25%. Grâce à ce tour de passe-passe, GSK Finance a évité de payer 35 millions de livres (41 millions d’euros) d’impôts à Her Majesty’s Revenue and Customs (HMRC), le fisc britannique. Et GSK Holding n’a payé que 310.000 livres (362.000 euros) au fisc luxembourgeois – soit 112 fois moins que l’impôt qui aurait normalement dû être acquitté en Grande-Bretagne!

Deux Belges au cœur du montage

«Ce type de montage est présenté comme légal, mais les inspecteurs du fisc britannique ne voient pas les choses de cette façon. Leur but est de démontrer que ces montages sont artificiels et donc, même s’ils sont légaux au Luxembourg, n’ont aucune valeur juridique au Royaume-Uni», commente Richard Murphy. En 2011 le fisc britannique a découvert le pot aux roses et exigé le démantèlement du montage. Après tout, le prêt aurait pu se faire directement entre les deux filiales britanniques Setfirst et GSK Finance, sans passer par le Luxembourg…

Des documents obtenus par Le Vif/L’Express auprès du registre des sociétés luxembourgeois indiquent que deux Belges ont piloté cette opération d’évasion fiscale: Denis Dubru, directeur financier et administrateur de GSK Biologicals, et Georges Dassonville, un Namurois qui travaille pour GSK au Luxembourg depuis une dizaine d’années. Les deux hommes étaient au cœur du montage: ils étaient les gérants de GSK Holding (Luxembourg) jusqu’à sa radiation du registre des sociétés en mars 2012...

Pour le fisc britannique, les bénéfices réalisés au Luxembourg devaient être taxés en Grande-Bretagne. «On a essayé de prouver qu’on avait de la substance ici – des bureaux, des employés, des équipements – bref qu’on n’était pas qu’une simple boite aux lettres, mais en fin de compte, nous avons dû passer un accord avec le fisc britannique», expliquait Georges Dassonville à nos confrères de Cash Investigation en mai dernier. Le deal? Une amnistie fiscale pour GSK si elle rapatrie ses milliards au Royaume-Uni avant fin 2011, ce qu’elle a fait. Pas rancunier, le fisc anglais…

Joints par Le Vif/L’Express, MM. Dubru et Dassonville n’ont pas souhaité réagir. «Denis Dubru a été désigné administrateur de GSK Holding par la direction du groupe essentiellement pour des raisons de proximité avec le Luxembourg. Son mandat n’a pas de lien avec les activités “vaccins” de GSK Biologicals», a commenté le porte-parole de GSK Biologicals.

David Leloup


Enquête réalisée avec le soutien du Fonds pour le journalisme en Communauté française et publiée dans Le Vif/L'Express du 24 août 2012

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Comment GSK profite du paradis fiscal belge

Les «superprofits» de la grippe A/H1N1 décryptés


Les ventes mondiales de vaccins Pandemrix contre la pandémie de grippe A/H1N1 en 2009-2010 ont généré 2,3 milliards d’euros de chiffre d’affaires pour le groupe britannique GlaxoSmithKline. De ce jackpot, la filiale belge GSK Biologicals, basée à Rixensart, a récolté plus d’un milliard d’euros de bénéfices. Taxés à moins de 3%, comme le montre notre enquête. En cause, deux mesures controversées qui ont transformé la Belgique en véritable paradis fiscal pour multinationales: la déduction sur les revenus de brevets et les intérêts notionnels.

«Pourquoi vous intéressez-vous aux ventes de Pandemrix alors que nous vendons 1,1 milliard de doses de vaccins chaque année, et que nous allons investir deux milliards d’euros pour la recherche en Belgique?» Au téléphone, Pascal Lizin, porte-parole de GSK Biologicals, masque mal son irritation face à nos questions concernant le vaccin anti-grippe A/H1N1 commercialisé par la branche belge du groupe britannique GlaxoSmithKline. Invoquant le «secret commercial», il refusera de répondre à la quinzaine de questions que nous lui avons adressées la veille par courriel.

Pourtant, plusieurs de ces questions visaient une simple mise à jour de chiffres divulgués en février 2010 par Jean Stéphenne, alors patron de GSK Biologicals, dans les colonnes de Trends-Tendances. D’autres questions, il est vrai, étaient plus délicates: validées par un expert fiscal chevronné, elles sollicitaient des précisions sur plusieurs anomalies identifiées dans les comptes annuels de la firme de Rixensart (questions disponibles ici) .

Un vaccin sur deux livré par GSK

On n’en a pas véritablement pris la mesure en Belgique: il y a trois ans, GSK Biologicals a joué un rôle majeur sur la scène internationale pour répondre à la pandémie de grippe A/H1N1. L’entreprise installée dans le Brabant wallon a assuré «plus de 50% des commandes mondiales de vaccin dans 60 pays, et plus des deux tiers en Europe», selon Jean Stéphenne, à la barre de l’entreprise jusqu’en avril dernier.

Quels sont les profits réalisés par GSK sur ces ventes exceptionnelles? Où et comment ont-ils été taxés? Après plusieurs mois d’enquête, et après avoir épluché les comptes annuels du groupe, Le Vif/L’Express a retracé une partie des flux financiers liés aux revenus du Pandemrix. Les résultats, surprenants, font notamment apparaître la Belgique comme le principal paradis fiscal utilisé par le groupe britannique pour «défiscaliser», en 2010 et 2011, plus d’un milliard d’euros de profits résultant des ventes mondiales du vaccin.

Notre enquête révèle également que deux employés belges de GSK, dont le directeur financier et administrateur de GSK Biologicals, apparaissent dans un montage au Luxembourg, jugé abusif par le fisc britannique. Ce montage, utilisé par le groupe GSK pour défiscaliser une partie des profits de la pandémie restés au Royaume-Uni en 2010, a été démantelé par le fisc britannique l’an passé (lire «La boite aux lettres “luxo” de GSK qui valait 7 milliards»).

Des contrats signés dans l’urgence

En avril 2009, le virus de la grippe A/H1N1 découvert au Mexique affole l’Organisation mondiale de la santé (OMS). En juin, l’agence onusienne déclare l’état de pandémie, malgré un très faible nombre de décès. Les gouvernements paniquent et, dans l’urgence, signent des contrats avec les laboratoires pharmaceutiques qui disposent d’un vaccin expérimental. En août, GSK Biologicals, la division vaccin du groupe GSK, annonce des commandes fermes de Pandemrix pour 291 millions de doses. Début octobre ce chiffre grimpe à 440 millions.

Mais, rapidement, la pandémie fait «pschitt». D’éminents médecins évoquent une «grippette». Le tsunami de décès annoncé s’évapore à vue d’œil. Puis, nouveau coup de théâtre: on apprend à l’automne qu’une seule dose de vaccin suffit pour immuniser un individu. Or tous les gouvernements ont commandé deux doses par personne, suivant les recommandations d’un groupe d’experts de l’OMS... Sous pression, GSK consentira – bien que rien ne l’y oblige contractuellement – à amputer les commandes de 32%.

Bilan de cette première «pandémie» du 21e siècle? D’abord qu’elle n’en était peut-être pas une: l’OMS a recensé 18.449 décès dus au virus, soit 14 à 28 fois moins que les 250 à 500.000 décès dus chaque année à la simple épidémie de grippe saisonnière... Ensuite, qu’un tiers des 15 experts qui ont directement conseillé l’OMS avant et pendant la pandémie avaient des liens d’intérêts avec les laboratoires pharmaceutiques, dont GSK. Des commissions d’enquête parlementaire diligentées par le Conseil de l’Europe et plusieurs pays, dont la France, fustigeront également ces conflits d’intérêts et le manque de transparence de l’OMS, même si un rapport ultérieur commandité par l’agence onusienne «blanchira» partiellement cette dernière.

Des ventes mondiales pour 2,3 milliards d’euros

Enfin, lors de cet événement qui a mis la planète en émoi, GSK Biologicals a vendu quelque 300 millions de doses de son vaccin Pandemrix (appelé Arepanrix hors Europe) sur les cinq continents. Des ventes extraordinaires qui ont généré un chiffre d’affaires de 976 millions d’euros fin 2009 et de 1,34 milliard en 2010, selon les derniers rapports annuels du groupe britannique. Soit un total de 2,3 milliards d’euros, déboursés par les contribuables des gouvernements acquéreurs.

Un chiffre vertigineux pour un fiasco qui ne l’est pas moins. Car en pratique, moins d’un vaccin pandémique sur quatre vendu par GSK a été administré dans le monde. La majorité des surplus se sont périmés dans des hangars puis ont été détruits, le reste ayant été revendu ou donné aux pays en développement...

Sanofi-Aventis, Novartis et Baxter ont aussi vu leur chiffre d’affaires dopé par la grippe, mais c’est GSK qui s’est de loin taillé la part du lion. Ces ventes record ont même permis au groupe britannique de ravir la place de numéro un mondial des vaccins à son rival Sanofi-Aventis en 2010.

70% du prix couvert par un brevet

Combien ces ventes ont-elles rapporté à GSK en termes de bénéfice net? Pour répondre à cette question, il faut rappeler que le Pandemrix est vendu sous la forme de deux fioles. La première contient l’antigène, c’est-à-dire des fragments du virus A/H1N1 mort qui nous immunisent contre le virus vivant. La seconde renferme un adjuvant, c’est-à-dire un cocktail de substances diverses (huile de foie de requin, vitamine E, etc.) qui stimulent la réaction immunitaire.

Baptisé AS03 pour «Adjuvanted System 03», ce composé laiteux sur lequel GSK a très peu communiqué a été développé à Wavre au début des années 1990. En mars 1999, GSK Biologicals obtiendra le brevet européen n°EP 0735898 protégeant l’AS03 jusqu’en 2014. En cas de pandémie, le grand défi consiste à produire très rapidement de l’antigène pour répondre à une demande très forte. L’AS03 permet principalement à GSK d’utiliser, dans une dose de vaccin, quatre à huit fois moins d’antigène H1N1 que ses concurrents. L’adjuvant AS03 permet donc à GSK, pour une même quantité d’antigène, de vendre quatre à huit fois plus de vaccins, et donc de servir quatre à huit fois plus de monde qu’avec un vaccin sans adjuvant.



Le contrat secret signé entre l’Etat belge et GSK en juillet 2009 pour la «fourniture de vaccins pandémiques contre la grippe» – un contrat-type pour tous les gouvernements d’Europe et d’Amérique du Nord – précise la valeur que l’entreprise attribue à l’AS03. Selon les termes de ce contrat révélé par Le Soir en mai 2010, chaque dose de Pandemrix a été facturée aux contribuables 8,5 euros hors TVA. Un prix qui se décompose comme suit: 1 euro pour l’antigène ; 6 euros pour l’adjuvant ; et 1,5 euros de «droit de mise à disposition», des frais de logistique. Autrement dit, le prix de l’adjuvant représente à lui seul plus de 70% du prix du vaccin!

Le royaume belge, paradis des royalties

Ce que les gouvernements ont payé, c’est avant tout de la propriété intellectuelle. La grande majorité des ventes de Pandemrix a donc été rétrocédée sous forme de royalties (sorte de droits d’auteur) à la filiale du groupe qui détient le brevet de l’adjuvant – en l’occurrence GSK Biologicals. Ce qui de prime abord pourrait sembler étrange.

En effet, la plupart des multinationales «délocalisent» leur propriété intellectuelle (brevets, marques, logos) dans des filiales enregistrées dans des paradis fiscaux, où les royalties sont peu voire pas du tout taxées. Mais ce serait méconnaître la Belgique, que la revue spécialisée Managing Intellectual Property place désormais sur le même pied que les îles Caïmans, le Luxembourg, les Pays-Bas et Singapour…

Beaucoup de gens ignorent en effet qu’avec la déduction de revenus de brevets en vigueur depuis l’exercice d’imposition 2008, la Belgique s’est muée en véritable «paradis fiscal pour les sociétés riches en propriété intellectuelle», dixit le cabinet international d’avocats Bird & Bird. En clair, 80% des royalties touchées sont exonérées d’impôt.



Combinée avec les très controversés «intérêts notionnels» et d’autres avantages fiscaux, cette mesure permet de réduire l’impôt des sociétés à peau de chagrin (lire encadré ci-dessous). «La déduction de revenus de brevets complète une série d’autres incitants fiscaux, dont la déduction pour investissement et le crédit d’impôt en recherche et développement, des réductions de charges salariales pour le personnel scientifique, l’exonération fiscale des aides régionales, et la déduction des intérêts notionnels», résume Pieter Van Den Broecke, avocat fiscaliste chez Linklaters.

Deux «cadeaux» pour tuer l’impôt

Dans des revues fiscales internationales, des juristes belges « vendent » la Belgique comme le paradis fiscal idéal pour les sociétés riches en brevets et en fonds propres. Pour payer peu voire carrément pas d’impôt, le but du jeu est d’exploiter simultanément deux niches fiscales dont les effets s’additionnent : la déduction sur les revenus de brevets et les intérêts notionnels. Explications.

Déduction sur les revenus de brevets. La loi-programme du 27 avril 2007 permet à une société qui détient un brevet de déduire de sa base imposable 80% des revenus bruts générés par ce brevet (royalties). Seuls les 20% restants sont donc taxés au taux normal de l’impôt des sociétés (33,99%), ce qui réduit donc le taux de taxation réel à 6,8%. Ainsi, une société qui gagne 100 millions d’euros de royalties ne sera en réalité imposée que sur 20 millions à 33,99%. Elle ne paiera donc que 6,8 millions d’impôts. Sauf que… elle peut encore « actionner » le mécanisme des intérêts notionnels pour réduire davantage – voire faire disparaître complètement – cet impôt résiduel.

Déduction d’intérêts notionnels. Une entreprise « pauvre », obligée d’emprunter à une banque si elle veut investir, peut déduire de sa base imposable les intérêts qu’elle rembourse à la banque sur son emprunt. Depuis la loi du 22 juin 2005, une entreprise « riche », qui elle investit directement sur fonds propres (sans emprunter, donc), peut déduire elle aussi des intérêts « notionnels », c’est-à-dire fictifs, de sa base imposable. Comme si elle s’était empruntée de l’argent à elle-même… Ces intérêts théoriques sont fixés, pour l’année 2011, à 3,485% des fonds propres de l’entreprise (son capital et ses bénéfices accumulés depuis sa création). Exemple : une société qui réalise 5 millions d’euros de bénéfices et dispose de 100 millions de fonds propres pourra déduire 3,485 millions (3,485% de 100 millions) d’intérêts notionnels de ses bénéfices. Elle ne sera donc taxée que sur 1,515 millions d’euros au lieu de 5 millions. D.Lp


Une tuyauterie complexe

En se plongeant dans les comptes annuels du groupe GSK, Le Vif/L’Express a reconstitué une partie de la «tuyauterie» comptable utilisée par le groupe pour minimiser ses impôts sur les revenus de la grippe A/H1N1 (voir infographie animée ci-dessous).



Pour résumer, on peut dire qu’entre GSK Biologicals (qui a orchestré la fabrication des vaccins) et les gouvernements (qui ont acheté tous ces vaccins), il y a une «boite noire» constituée d’au moins trois sociétés britanniques au travers desquelles l’argent a transité. Les règles comptables internationales utilisées pour élaborer les comptes annuels des sociétés concernées ne permettent pas d’identifier tous ces flux intra-groupe.

Ce qui est sûr, en revanche, c’est que GSK Biologicals a vendu des vaccins à une société britannique de la «boite noire» pour 401,6 millions d’euros, répartis sur 2009 et 2010. Et que le bénéfice réalisé sur ce montant (une fois les coûts de production déduits) a en grande partie échappé à l’impôt grâce au mécanisme des intérêts notionnels.

Ensuite, d’après le contrat belge révélé en 2010, tous les gouvernements en Europe et en Amérique du Nord ont payé leurs vaccins à GSK Export Ltd., la plateforme d’exportation mondiale du groupe établie au Royaume-Uni. Ce serait donc GSK Export qui aurait livré la marchandise aux gouvernements dans le monde entier, et récolté les 2,3 milliards d’euros de ventes mondiales de vaccins.

L’essentiel de ces fonds, une fois les coûts de logistique déduits, semblent alors être «remontés» dans la comptabilité de Glaxo Group Ltd., société britannique qui contrôle GSK Export à 100%. Finalement, Glaxo Group versera en 2009 et 2010 à GSK Biologicals, la société belge, des royalties pour un total estimé à 1,06 milliard d’euros (les rapports de gestion ne donnent pas les chiffres exacts mais il est possible de les déduire assez précisément). Le rapport de gestion 2009 de GSK Biologicals indique ainsi que Glaxo Group Ltd. lui a versé des royalties «extraordinairement élevées fin 2009 grâce aux ventes du vaccin Pandemrix», soit environ 400 millions d'euros. En 2010, on dépassera les 650 millions.

Des profits taxés à moins de 3%

A quel taux la marge réalisée sur ce milliard de royalties a-t-elle été taxée? Il est possible d’estimer le taux maximum théorique de taxation, mais pas le taux exact. En effet, ce taux dépend directement des coûts de développement du vaccin qui n’avaient pas encore été totalement amortis en 2009 et 2010. Mais les différents scénarios élaborés avec notre expert fiscal sont limpides: dans l’hypothèse où ces coûts étaient déjà intégralement amortis en 2009, le milliard d’euros de royalties a été taxé à seulement 3,44%, du fait de l’impact des intérêts notionnels sur le taux théorique de 6,8% (dû, pour rappel, à la non taxation de 80% des revenus de brevets).

Si, par contre, une partie de ces coûts devait encore être amortie, plus ces coûts sont importants, plus le taux d’imposition est faible! Exemple: si les coûts à déduire correspondent à 10% des royalties perçues, le taux d’imposition chute à 1,76%. Et si les coûts atteignent 20%, le taux passe à 0%...

Perte sèche pour l’Etat belge? Sur les seules ventes de Pandemrix, plus de 320 millions d'euros d’impôts ont échappé, en toute légalité, au fisc belge. Mais la déduction sur les revenus de brevets, combinée aux intérêts notionnels, n’a bien entendu pas servi qu’à défiscaliser les profits liés au Pandemrix. Grâce à ces deux avantages fiscaux, GSK Biologicals a déduit 2,6 milliards d’euros de sa base imposable entre 2008 et 2011 (voir tableau ci-dessous). En quatre ans, ces déductions ont permis à l’entreprise d’éviter de payer 891 millions d’euros d’impôts nets.



David Leloup


Enquête réalisée avec le soutien du Fonds pour le journalisme en Communauté française et publiée dans Le Vif/L'Express du 24 août 2012

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mardi 7 octobre 2014

Elio Di Rupo, cet «activiste antitabac bien connu»...


Ex-fumeur ayant beaucoup clopé en rédigeant sa thèse de doctorat, le Premier ministre sortant Elio Di Rupo apparaît dans une dizaine de documents disponibles dans les archives en ligne de l’industrie du tabac.

En février 1994, en plein scandale Agusta-Dassault, alors qu’il vient de remplacer Guy Coëme au poste de vice-Premier, Elio Di Rupo a l’honneur d’être qualifié d’«activiste antitabac bien connu» dans une note interne de la British American Tobacco:



Avec le recul, l’appréciation compendieuse du fabricant des Lucky Strikes, qui se réfère vraisemblablement aux prises de position antitabac de Di Rupo lorsqu’il était député européen (1989-1991), était un brin prématurée. On se souviendra que fin 2009, celui qui était alors président du PS avait, via son blog, remis en cause le vote d’une loi en faveur d’une interdiction généralisée du tabac dans tout l’Horeca à partir du 1er janvier 2012. Une mesure pourtant recommandée par les... institutions européennes!

Intitulée «L’Horeca sans fumée: avançons progressivement…», sa note (quasi introuvable aujourd’hui sur la toile) faisait valoir des arguments économiques. «Pour pas mal de gens, fumer est une manière de déstresser», écrivait-il en se référant à la crise et au chômage. Mais Di Rupo relayait aussi les craintes de faillites (imaginaires) agitées par la Fédération des cafés de Belgique (Fedcaf), le lobby des cafetiers: «Dans le contexte actuel qui est si difficile, je ne peux rester insensible à leurs arguments», écrivait alors le président du PS. Electoralisme quand tu nous tiens...

Résultat de cette saillie bloguesque? Les discussions à la Chambre ont été reportées, et deux exceptions temporaires valables jusqu’au 1er janvier 2014, visant à protéger les petits cafés populaires et les casinos, ont été ajoutées au texte. Il aura fallu que la Ligue flamande contre le cancer saisisse la Cour constitutionnelle pour que celle-ci annule ces exceptions et fixe au 1er juillet 2011 l’interdiction totale de fumer dans les cafés.

Sans quoi il aurait fallu attendre 2014, donc.

David Leloup

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dimanche 6 juillet 2014

UBS Belgium : des clients parlent...

(c) Belga
Nous avons pu nous entretenir avec plusieurs clients d’UBS Belgium, la banque visée par une instruction judiciaire à Bruxelles. Le témoignage de ces fortunes supérieures à 500.000 euros permet de mieux cerner leurs profils sociologiques. Et la mécanique interne de la banque.

Quand la mèche est allumée, il faut courir. Vite. Le 30 mai dernier, pièces et témoignages à l’appui, M... Belgique détaillait en exclusivité l’ouverture d’une instruction judiciaire à Bruxelles à l’encontre de la banque UBS Belgium. L’antenne belge du géant bancaire suisse est en effet soupçonnée d’avoir démarché de grosses fortunes domiciliées en Belgique pour leur proposer l’ouverture de comptes offshore non déclarés. Il fallait donc s’attendre à des perquisitions.

Elles ont eu lieu le jeudi 19 juin. Vers dix heures du matin, plusieurs dizaines de policiers ont saisi des caisses de documents au siège de la banque, avenue de Tervueren à Bruxelles, ainsi qu’au domicile de son patron, le Suisse Marcel Bruehwiler. Un client représentatif des abus présumés commis par la banque a également été perquisitionné. On ignore toujours l’ampleur exacte de la fraude, mais le parquet de Bruxelles l’estime déjà à plusieurs milliards d’euros.

Le CEO inculpé

Marcel Bruehwiler a immédiatement été privé de liberté puis entendu par les enquêteurs. Le parquet avait demandé l’inculpation et la mise sous mandat d’arrêt du patron d’UBS Belgium pour «organisation criminelle, blanchiment, fraude fiscale et exercice illégal de la profession d’intermédiaire financier en Belgique». Mais il n’obtiendra finalement du juge d’instruction Michel Claise qu’une inculpation pour ces quatre chefs. Les documents saisis sont à présent analysés et plusieurs clients entendus par les enquêteurs.

Comme nous le révélions, l’enquête s’appuie en grande partie sur les témoignages détaillés d’anciens employés de la banque: «Il s’agit de personnes qui ont été licenciées ou même qui ont démissionné parce qu’elles n’étaient pas d’accord avec la manière de fonctionner d’UBS Belgium», précise la porte-parole du parquet de Bruxelles.

Si l’identité du client perquisitionné n’a pas été dévoilée, M… Belgique a pu s’entretenir avec plusieurs clients d’UBS Belgium. Leurs témoignages permettent de mieux cerner leurs profils et la mécanique interne de la banque. Rappelons qu’UBS Belgium est une banque privée, c’est-à-dire spécialisée dans la gestion de fortune, et qu’elle n’accepte que les clients qui déposent plus de 500.000 euros.

Baby-boomers français

Président-fondateur d’un groupe industriel «actif dans la construction et les produits mécaniques», Thierry Delfosse, 67 ans, vit à Rhode-Saint-Genèse depuis 14 ans. Cet ingénieur français retraité «adore les Belges et la Belgique». Il dispose d’un compte chez UBS Belgium depuis une dizaine d’années et gère lui-même ses économies, dont le montant est inférieur à un million d’euros, dit-il. «Je suis devenu client d’UBS Belgium après avoir rencontré un sympathique chargé d’affaires sur un terrain de golf dans le nord de la France.»

Notre homme a revendu sa PME en Belgique. Mais il n’a pas souhaité qu’UBS fasse fructifier ses avoirs: «La banque m’a proposé des produits structurés [souvent risqués, NDLR], mais j’ai refusé. Je préfère gérer moi-même ma fortune. Je ne suis pas un boursicoteur mais l’économie m’intéresse. Les illettrés en économie ne vivent pas dans notre monde. Ils ne comprennent pas pourquoi la dette est un problème, pourquoi il faut de l’austérité. Donc je ne vois pas comment ils savent voter. Les médias et le gouvernement, via l’école publique, sont responsables de cette situation.»

Les contacts de Thierry Delfosse avec la banque? Quatre ou cinq appels téléphoniques par an. «En ce qui me concerne, ils ont toujours respecté les règles. On ne m’a jamais proposé de compte offshore. Il est vrai que je ne suis pas un “gros poisson”. Je suis un petit client avec un petit compte. Si je peux aider UBS à défendre son intégrité, je serais ravi de le faire. C’est une bonne banque, les interlocuteurs sont compétents, efficaces.»

Du Madoff dans les dents

Gérard B., lui, est beaucoup moins loquace. Ce client d’UBS Belgium qui réside en bordure du verdoyant parc Duden, à Forest, se crispe au quart de tour quand nous lui demandons ce qu’il pense des perquisitions réalisées au siège de sa banque: «Comment savez-vous que j’ai un compte là-bas?» Désarçonné, il nous raccroche presque au nez…

Ce qui n’est pas le cas de Guy B., fidèle à UBS Belgium depuis 2003. Il n’a pas sa langue en poche: «Les banquiers sont tous des bandits en col blanc! Quelle que soit la stratégie d’investissement qu’ils vous proposent, ils vous font tous signer au préalable une décharge les exonérant de toute responsabilité en cas de pertes.» Son gestionnaire de fortune, rencontré chez UBS, lui a fait perdre pas mal d’argent: «Je me suis pris plein de Madoff dans les dents!»

Comme Thierry Delfosse, Guy B. est un baby-boomer français. Ou plutôt l’était: «J’ai pris la nationalité belge. Je suis fan des Diables Rouges! Il y a des bonnes frites et de la bonne bière ici. La France est un pays communiste qui taxe ses citoyens comme des cochons!» Aujourd’hui retraité, Guy B. était propriétaire de plusieurs supermarchés Champion franchisés dans le sud-ouest de la France. En 2002, il s’installe à Uccle. Mais pas pour les frites: un an plus tard, il revend toutes ses affaires en empochant une belle plus-value. «En France, j’aurais été taxé à environ 25 %. En Belgique je n’ai rien payé du tout...» Comme son ex-compatriote Thierry Delfosse.

Cimenter la confiance

A l’instar de toutes les fortunes convoitées par les banques privées, Guy B. a été invité par UBS Belgium à des «événements» pas innocents, dont un concert de musique classique et un congrès de philanthropie en Suisse. «Les banquiers chouchoutent leurs clients pour les conserver et tenter d’obtenir toujours davantage de fonds à gérer. Ces événements cimentent la confiance», analyse-t-il.


Directeur exécutif de l’agence de communication Emakina, Pierre Gatz n’est pas un client d’UBS Belgium. Mais il se souvient bien avoir été courtisé par une chargée d’affaires, Anne-Sophie E., dès 2004. «J’ignore encore comment elle a obtenu mes coordonnées. Mais elle m’a envoyé des invitations pour des événements organisés par la banque. Elle m’appelait au téléphone aussi. UBS utilisait des techniques relativement agressives pour recruter de nouveaux clients. Ils s’imaginent que nous avons des coffres remplis de billets!»

David Leloup

Initialement publié dans M... Belgique du 27 juin 2014


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vendredi 20 juin 2014

UBS ou la stratégie des «grosses patates»

Raoul Weil, l’architecte de la stratégie mondiale d’UBS d’industrialisation de la fraude fiscale.
Chasser les «grosses patates», c’est-à-dire les petits millionnaires. Ils sont bien plus nombreux que les ultra-riches dont la fortune se compte en dizaines de millions. Et trois fois plus rentables pour UBS. Voici la stratégie mondiale de la banque à l’origine de ses déboires judiciaires. En Belgique et ailleurs.

C’est à cause de lui, en grande partie, que la justice bruxelloise enquête aujourd’hui sur UBS Belgium. Raoul Weil est l’architecte de la stratégie mondiale de la banque visant à «industrialiser» la fraude fiscale. Ex-numéro trois d’UBS, il était, jusqu’à son inculpation en 2008 par la justice américaine, le directeur de la division Global Wealth Management & Business Banking, et membre de la direction générale d’UBS.

A l’aube des années 2000, depuis Zurich, il aurait donné instruction d’accroître les activités du département «international», c’est-à-dire celui des comptes offshore non-déclarés, en sachant sciemment que cela violait la législation américaine et celle des autres pays. Selon son acte d’inculpation de novembre 2008, Raoul Weil aurait «conspiré» contre le fisc américain en aidant quelque 20.000 Américains fortunés à lui dissimuler environ 20 milliards de dollars…

Mais sa stratégie était globale: «UBS vampirisait les fortunes du monde entier», explique un ancien cadre. Après les Etats-Unis, la justice a ouvert en 2012 des enquêtes sur les pratiques d’UBS en France et en Allemagne (lire ci-contre). En Belgique aujourd’hui. Demain en Espagne, au Royaume-Uni, au Brésil et en Inde? A voir: l’homme connaît bien des secrets. De ceux qui pourraient faire tomber un gouvernement. Ce qui expliquerait pourquoi la justice belge n’est «que» la quatrième à enquêter sur UBS. Et pourquoi Weil est resté cinq ans en cavale, en voyageant, alors qu’il a un mandat d’arrêt international sur le dos depuis janvier 2009…

«Profilers» talentueux

Quoi qu’il en soit, nous nous sommes procuré un document exclusif qui expose, en 127 slides, la stratégie mondiale développée par Raoul Weil. Elle a été exposée en long et en large, à Zurich, le 7 juin 2006, lors d’un séminaire interne organisé par la banque où étaient présents tous les responsables de «zones» d’UBS – France, Allemagne, Iberia (Espagne, Portugal), Amérique du Nord, Amérique latine, etc. – et leurs équipes.

Le «plan Weil»? Mettre le paquet sur le recrutement des «petits millionnaires», soit les fortunes «entre 500.000 et deux ou trois millions d’euros», explique un ex-cadre. Bien plus nombreux que les ultra-riches, ils sont trois fois plus rentables pour la banque. En interne, on les appelle les «core affluents».

Lors de cette «Core Affluent Convention 2006», ils sont surnommés les «grosses patates». L’objectif de la banque est de délocaliser tout ou partie de leur fortune vers la Suisse. «Si vous cherchez des petites patates… vous trouverez des petites patates», avertit le responsable de la zone Amérique du Nord. Il faut au contraire aller «à la recherche des grosses patates».

La recette? Mettre sur pied dans chaque pays une équipe de «profilers» talentueux chargés d’identifier de nouveaux clients potentiels via une procédure très méthodique. Celle-ci implique notamment des recherches approfondies dans des bases de données internes et externes (Dun & Bradstreet, les Pages blanches, Google…). Une vraie chasse au riche assistée par ordinateur. Et l’équipe qui ramènera le plus d’argent frais gagnera un stage de voile à Valence!

«Soyez imprévisibles»

Lors de cette convention, un document baptisé «Security Risk Governance» est distribué par le département marketing à tous les chargés d’affaires – suisses et autres – qui vont devoir rencontrer ou recruter des clients à l’étranger. Un véritable manuel pour apprenti James Bond.

Les consignes? Ne jamais traverser la frontière avec «des données clients sous forme électronique ou papier». Prévoyez toujours une «histoire crédible» pour les douaniers: «faites simple et le plus proche possible de la vérité». On vous questionne? «Restez calme, poli et coopératif.» En cas de contrôle, si vous avez des données sensibles sur votre ordinateur, «tapez trois fois un mauvais code PIN et l’accès y sera bloqué».

Une fois la douane franchie, on ne fait pas ce que l’on veut. Il s’agit d’«éviter les hôtels où descendent la plupart des banquiers, comme le Hilton à Tel Aviv». Soyez même «aussi imprévisible que possible (changez de restaurant, de société de taxi, de lieux de rendez-vous avec les clients…)». Utilisez des clés USB cryptées. Et surtout, «n’oubliez pas d’effacer toute donnée sensible avant de franchir la frontière en sens inverse». En cas de problème «appelez la hotline 24/7» en Suisse ou contactez l’ambassade.

Qui a parlé d’«organisation criminelle»?

David Leloup


Des enquêtes aux Etats-Unis, en France et en Allemagne

La Belgique est donc le quatrième pays où la justice enquête sur les sulfureuses pratiques d’UBS. Les Etats-Unis ont donné le la. Puis la France et l’Allemagne ont suivi. A chaque fois, la banque helvète est accusée d’avoir encouragé l’évasion fiscale de clients locaux vers la Suisse.

Ainsi, pour éviter un procès humiliant, UBS a payé 780 millions de dollars à la justice américaine en 2009. La banque avait ouvert et géré 19 000 comptes offshore non déclarés à des citoyens américains, détournant ainsi plus de 18 milliards de dollars des radars du fisc. Le géant suisse a aussi été contraint de révéler à Washington l’identité de 4 450 clients américains, ouvrant ainsi une brèche historique dans son secret bancaire.

Restait à d’autres à s’y engouffrer. En France, deux juges d’instruction saisis pour «démarchage illicite» et «blanchiment de fraude fiscale» enquêtent sur UBS depuis avril 2012. La maison-mère suisse, UBS AG, a été mise en examen (inculpée) en mai 2013 pour démarchage illicite sur le sol français. UBS France, son ex-patron, les anciens dirigeants des bureaux de Lille et Strasbourg ont été mis en examen, eux, pour complicité de démarchage illicite.

En Allemagne, enfin, le parquet de Bochum (Land de Rhénanie du Nord-Westphalie) a ouvert une enquête sur la base de données bancaires figurant sur un disque dur volé qu’il a acheté en 2012. UBS est également dans le viseur du parquet de Mannheim (Land du Bade-Wurtemberg) où des clients et plusieurs filiales d’UBS ont été perquisitionnés. Pour échapper à des poursuites pénales, la banque est prête à payer jusqu’à 200 millions d’euros au fisc allemand.
D.Lp

Enquête publiée dans M... Belgique du 30 mai 2014


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lundi 16 juin 2014

La banque UBS Belgium sous enquête pour aide à la fraude fiscale


UBS Belgium, la filiale belge de la banque suisse UBS, est sous le coup d’une instruction judiciaire ouverte par le parquet de Bruxelles. Celui-ci soupçonne la banque de «blanchiment d’argent» dans le cadre d’une «organisation criminelle». Sur fond d’évasion fiscale de clients belges vers la Suisse. Enquête.

Chefs d’entreprise, sportifs, diamantaires, people…: des contribuables belges fortunés auraient été approchés, au cours de ces dix dernières années, par des chargés d’affaires suisses de la banque UBS afin de leur proposer l’ouverture d’un compte offshore non déclaré en Suisse. Avec la complicité d’UBS Belgium, la filiale belge du géant bancaire suisse, des montants importants auraient ainsi illégalement quitté le plat pays pour celui du gruyère.

La porte-parole du parquet de Bruxelles, Jennifer Vanderputten, a confirmé à M… Belgique qu’une instruction judiciaire a bien été ouverte à l’encontre d’UBS Belgium pour des faits de «blanchiment d’argent» dans le cadre d’une «organisation criminelle». L’enquête a été confiée au juge financier bruxellois Michel Claise, spécialisé dans la lutte contre la criminalité en col blanc.

Hôtels de luxe

Selon nos informations, l’instruction a été ouverte fin 2013 et reposerait notamment sur un témoignage très détaillé. Des chargés d’affaires suisses d’UBS, dont un certain «M.S.», descendaient régulièrement à l’hôtel Conrad, un palace cinq étoiles situé avenue Louise à Bruxelles, et dans un hôtel chic de Gand, pour y rencontrer des clients avérés ou potentiels. En toute discrétion. A partir de juin 2006, ces banquiers en goguette ont même été tenus de respecter des consignes de sécurité dignes d’un James Bond. Un tel démarchage de clients, par des commerciaux suisses sur le territoire belge, est illégal: la maison-mère, UBS AG, qui emploie ces commerciaux, ne dispose pas des autorisations requises.

Des enquêtes judiciaires pour des faits similaires ont été ouvertes contre UBS aux Etats-Unis en 2007, puis en France et en Allemagne en 2012. Ce qui fait de la Belgique le premier «petit» pays à s’attaquer au mammouth bancaire suisse. Car avec des actifs sous gestion estimés à 1.705 milliards de dollars en 2013, la banque, qui compte 60.000 employés dans plus de 50 pays, se profile comme le premier gestionnaire de fortune mondial.

La Belgique, marché lucratif

Pour UBS, l’aventure belge démarre à l’été 2002 avec l’ouverture d’une filiale à Bruxelles. La banque ouvrira ensuite un bureau à Anvers en 2006, puis un troisième en 2008 à Gand. Un essor rapide dû au fait que la Belgique figure parmi les vingt plus gros marchés au monde pour la banque privée, c’est-à-dire les services de gestion de fortune. Les entrepreneurs du baby-boom atteignant petit à petit l’âge de la retraite, ils cèdent leur société et décrochent le jackpot.

Pour recruter de nouveaux clients, UBS Belgium mise notamment sur le sponsoring d’événements culturels et sportifs. Une stratégie globale, appliquée dans le monde entier. Ainsi, de 2004 à 2010, UBS a été le principal partenaire de la Chapelle musicale Reine Elisabeth. En 2009, quelques mois après l’ouverture de sa succursale à Gand, la banque s’est mise à sponsoriser le Royal Latem Golf Club. Le club est situé dans la banlieue chic de Gand, à Sint-Martens-Latem, commune où le revenu moyen par habitant est le plus élevé du royaume. Et si, en 2010, UBS s’est mise à sponsoriser le championnat du monde de Formule 1, la banque exploitait déjà de longue date le circuit de Spa-Francorchamps pour «entrer dans l’intimité» de ses clients les plus fortunés (lire ci-dessous).

«Team offshore»

Selon des témoignages et des documents, le démarchage illicite de clients d’UBS Belgium par des chargés d’affaires suisses aurait existé dès le tout début des opérations belges de la banque. Un courriel de février 2003 montre par exemple qu’il existait déjà à cette époque, entre la Suisse et la Belgique, des contacts directs à propos de clients d’UBS Belgium.

Dès 2003, des contacts directs existaient, entre la Suisse et la Belgique, à propos de clients d’UBS Belgium (le «team offshore» est composé de chargés d’affaires suisses):


Dans cet échange entre la responsable du bureau d’UBS de Bâle (Y.R.) et une cadre d’UBS France (S.G.), on apprend que l’employée d’UBS Belgium en charge de la clientèle française est invitée à un événement organisé par UBS France à Strasbourg… où sera présent le «team offshore». C’est-à-dire une équipe de chargés d’affaires suisses, soucieux d’une seule chose: attirer dans la confédération un maximum de fonds de clients étrangers.

Cette employée d’UBS Belgium avait semble-t-il régulièrement des contacts avec ses collègues helvètes lors d’événement organisés par la banque en France. Le 9 novembre 2005, elle devait être présente (un collègue l’a finalement remplacée), avec quatre clients, au théâtre des Champs-Elysées à Paris, où de nombreux chargés d’affaires suisses avaient fait le déplacement à l’occasion d’un concert de l’UBS Verbier Festival Orchestra. S’agissait-il de présenter les premiers aux seconds?

Le nom d’une autre cadre revient dans les documents internes d’UBS que nous avons pu consulter. De 2006 à 2008, elle a été la responsable des «key clients» à Bruxelles, c’est-à-dire des fortunes supérieures à 30 millions d’euros. Elle avait invité trois Belges lors d’un événement «philanthropie» organisé par la banque le 30 mai 2007 à Paris. Un événement où, comme par hasard, étaient présents plusieurs chargés d’affaires suisses, dont Dieter Kiefer, le patron de la banque pour l’Europe de l’ouest, services onshore et offshore.

La «filière lilloise»

A côté de ces contacts occasionnels entre commerciaux suisses et cadres ou clients d’UBS Belgium, le bureau lillois de la banque aurait joué un rôle bien plus structurant de pourvoyeur d’argent frais. Vers la Belgique d’abord, puis la Suisse ensuite. C’est ce que l’on pourrait appeler la «filière lilloise».

Un document suggère d’ailleurs des liens très forts entre le bureau de Lille et UBS Belgium. Il s’agit de la répartition interne à UBS des… loges de l’Opéra de Lille, où s’est tenu, le 24 juin 2004, le concert d’inauguration du bureau lillois d’UBS France. Quatre loges de quatre places et une de six étaient allouées, ce soir-là, au gratin d’UBS Belgium. Le même nombre que celles attribuées à la maison-mère suisse. C’est dire l’importance accordée aux collègues belges…

Ce document reflète la distribution interne à UBS des loges de l'Opéra de Lille lors de l’inauguration du bureau lillois de la banque en 2004. Il suggère des liens très forts entre le bureau d’UBS de Lille et UBS Belgium, qui récolte autant de places que la maison-mère suisse:


Dans le cadre de l’enquête judiciaire en cours sur UBS, en France, le responsable du bureau de Lille, Hervé d’Halluin, a été mis en examen (inculpé) en juillet 2012 pour complicité de démarchage illicite. Selon nos informations, il aurait organisé plusieurs chasses dans le nord de la France en vue de rabattre, vers Bruxelles, des entrepreneurs français tentés de revendre leur entreprise sur le sol belge. Objectif de la manœuvre: éviter légalement de payer les impôts français sur les plus-values réalisées, soit environ 25% du prix de vente. En Belgique en effet, les bénéfices réalisés sur la revente de titres ne sont pas taxés.

Hervé d’Halluin n’a pas souhaité répondre à nos questions. Mais il a témoigné dans le cadre d’un litige concernant un collègue, en mai 2010, devant le conseil des prud’hommes – le tribunal du travail en France. Dans son audition, le banquier déclare avoir «eu connaissance de pratiques de transfert de fonds non déclarés». En particulier de «démarchage actif par des chargés d’affaires suisses de clients français.»

Clients «piqués» aux Français

Hervé d’Halluin a ainsi reconnu avoir participé à «des réunions (…) avec des responsables commerciaux» où était discutée la «mise en œuvre des synergies entre l’activité domestique et internationale». En clair: le transfert de fortunes françaises vers la Suisse. Et ce, souvent via la Belgique. Car l’activité du bureau de Lille portait «essentiellement sur des cessions d’entreprises. Lille est près de la frontière [belge], ils [les entrepreneurs] se délocalisent et vendent après.»

Dans le cadre de ces activités, Hervé d’Halluin ajoute: «J’ai vu des prises de mandat de cession réalisées par des équipes internationales alors qu’elles devaient être effectuées par des chargés d’affaires français.» Autrement dit, des chargés d’affaires suisses se seraient mêlés de la vente d’entreprises françaises sur le sol belge, «piquant» ainsi des clients aux Français.

Ces clients français de la «filière lilloise», rabattus vers la Belgique, font-ils l’objet de suspicions d’infractions pénales? «Certains oui, car il ne s’agit pas seulement d’optimisation fiscale mais d’évasion fiscale à terme, en se servant de la Belgique comme d’un relais, explique un ancien employé d’UBS France. Les entrepreneurs français ont compris le filon que la Belgique offrait. Lors d’une cession, on déclare ce que l’on veut. Et on peut jouer sur cet argument pour négocier le prix. Et derrière la Belgique, il y a la Suisse. Mettez-vous à la place d’un Français qui cède sa société sur le territoire belge. La transaction se fait chez vous, et donc le montant officiel reste en Belgique. Mais une part non déclarée peut très bien s’envoler en Suisse via une sous-évaluation volontaire du prix de cession.» Reste à la justice belge, qui serait en contact avec son homologue française, à confirmer ce scénario.

Chouchou des médias

En 2010 et 2011, UBS Belgium est devenue la coqueluche de la presse spécialisée. Elle a été élue «meilleure banque étrangère du royaume» par le magazine financier Euromoney, et «meilleure banque privée du royaume» par MoneyTalk (supplément du magazine Trends/Tendances). Rien ne semblait pouvoir l’atteindre. Pas même les déclarations explosives d’un journaliste. En avril 2012, Antoine Peillon, auteur de Ces 600 milliards qui manquent à la France (Seuil), avait déclaré au Soir qu’il détenait des preuves d’évasion fiscale organisée par UBS Belgium: «Oui, je peux affirmer qu’il y a eu un démarchage de clients à des fins d’évasion fiscale réalisé au niveau du bureau UBS de Bruxelles (…). Des documents en ma possession le prouvent.»

A l’époque, la justice n’avait pas bougé. De nouveaux éléments l’ont visiblement contrainte à changer son fusil d’épaule.

David Leloup



Quand UBS pistait l’argent frais à Francorchamps

Sur la piste, dans les paddocks et sur les routes qui mènent au circuit, le spectacle est partout. Ces 25 et 26 juin 2005 aux Ferrari Days de Spa-Francorchamps, plus de 400 Ferrari et Maserati provenant des quatre coins d’Europe sillonnent le secteur. C’est ici qu’Etienne de Timary, le directeur du bureau d’UBS à Lyon, a emmené deux de ses plus importants clients. Son objectif? Les faire rêver comme des gamins. Et récolter un max de «net new money». De l’argent frais, dans le jargon.
«Beaucoup de clients potentiels à Lyon sont fans d’automobile et de Ferrari. Cet événement est un des meilleurs que j’ai vécus pour entrer dans l’intimité d’un client. Ça peut être un fantastique vecteur d’argent frais si les invités sont bien choisis et passionnés de voiture», écrit Etienne de Timary dans son compte-rendu de l’événement destiné à ses patrons suisses. «Mon client a pu conduire sa propre voiture sur le circuit de Spa et il a même fait un tour avec un pilote professionnel. La loge UBS avait la meilleure vue sur le virage de l’Eau rouge et était juste à côté du restaurant.»
Résultat des courses? 750 000 francs suisses confiés directement par le client à UBS, qui prélève 3% pour gérer les fonds, soit 22 500 francs. Mais surtout, le client charmé s’est engagé à confier 8,25 millions de francs l’année suivante à son banquier préféré. Cerise sur le gâteau: «Mon client me présentera la plus grosse fortune de Dijon!!»
Sur la piste de l’argent frais, UBS était ce jour-là en pole position.
D.Lp

Enquête publiée dans M... Belgique le 30 mai 2014

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